Un an après le tremblement de terre qui a dévasté Haïti le 12 janvier 2010, plus d'un million de personnes vivent encore dans des conditions de plus en plus chaotiques. Dans des tentes (abris provisoires), où elles sont hébergées, les femmes sont très exposées aux agressions et surtout les agressions sexuelles. Battues, harcelées et même violées, cette catégorie est souvent livrée à elle-même.
Selon le rapport d'Amnesty International intitulé « Haïti, Doublement touchées », des femmes s'élèvent contre les violences sexuelles dans les camps haïtiens, plus de 250 cas de viols dans plusieurs camps ont été signalés au cours des 150 premiers jours qui ont suivi le tremblement de terre de janvier. Un phénomène qui continue à se perpétuer.
Voulant acquérir plus d’informations sur la situation des femmes dans certains sites de la zone, lancer et approfondir les réflexions sur la problématique de la femme, plus d’une vingtaine de jeunes du groupe Vague Du Futur de Darbonne/ Léogane et autres lecteurs de la bibliothèque ont marqué la journée internationale de la femme avec ce thème: La situation des femmes haïtiennes dans les camps à Léogane… Que faire ? Le mardi 8 mars, peu après 4h pm, dans les locaux de la bibliothèque Rasin Lespwa, les jeunes s’étaient déjà réunis attendant la mise en contexte de l’activité du jour et les objectifs poursuivis.
D’entrée de jeu, les jeunes étaient invités à exprimer ce que le 8 mars représente pour eux. Si pour certains, elle est une journée où se multiplient les manifestations et ateliers de réflexions autour de la problématique de la femme, d’autres croient que le 8 mars a une signification beaucoup plus profonde. Elle est une occasion en or pour se rappeler à tous les conditions d’inégalité dans lesquelles vivent les femmes. Cette date revendique aussi les luttes menées par les femmes contre toutes formes d’exploitation et de discrimination.
Ensuite l’un des animateurs a défini le mouvement féministe comme « un mouvement qui charrie les revendications de la femme afin d’améliorer ses conditions au sein de la société. C’est un long combat qui doit interpeller la conscience de tous qu’ils soient grands, jeunes ou petits afin d’aider les femmes à sortir de cette situation », a-t-il renchéri.
Tout de suite, afin de pénétrer le vif du sujet, trois ateliers furent formés. Les réflexions des jeunes allaient se porter sur les trois questions :
• Comment voyez-vous la situation des femmes dans les camps ? Quelles sont les formes de violences les plus courantes dont elles sont victimes ?
• Que doivent-elles faire pour remédier à cette situation ?
• Quel rôle peut jouer la femme haïtienne dans la reconstruction d’Haïti ?
Environ vingt minutes étaient accordées à chaque groupe dont, après discussions, un rapporteur, délégué par le groupe, a partagé avec les autres participants le résultat du travail effectué.
Ainsi, Le rapporteur du groupe 1 a-t-il profité des 5 minutes qui lui ont été attribuées pour dénoncer les différentes formes de violences comme viol, harcèlement, agressions verbales que les femmes subissent à longueur de journée, et ce phénomène dénommé GIVE TO GIVE qui sévit dans les camps, lors des distributions de l’aide humanitaire. Certaines femmes, plus particulièrement les jeunes filles, sont souvent obligées d’échanger leur corps pour obtenir la carte qui leur permettra de bénéficier soit de la nourriture soit des bâches plastiques. « C’est humiliant et inacceptable ! » a-t-il dit d’un air furieux, comme pour dégager ses frustrations.
Plus loin, il affirme que les parents doivent assumer leurs responsabilités en inculquant aux enfants une bonne éducation sexuelle au sein de la famille. Ce qui leur permettra de connaitre la grande valeur de leur corps.
Pour pallier à cette situation, la porte parole du groupe 2 propose que les femmes s’organisent en groupe pour, non seulement, faire valoir leur droits mais aussi discuter de leurs problèmes et dénoncer les formes de violences dont elles sont l’objet. « Nou pap fè silans pou vyolans sou fanm kaba ! ». C’est en ces mots qu’elle a fini son exposé qui a été chaudement applaudi par le public.
Le rapporteur du groupe 3 quant à lui affirme que les femmes ont un rôle prépondérant à jouer dans la reconstruction d’Haïti. En Haïti, les femmes représentent plus que 52% de la population. A l’échelle internationale, l’expérience réussie de certaines femmes peut nous prouver aussi de quoi nos fanm vanyan sont capables.
De vives discussions ont suivi la présentation des rapports. Et l’énergie dégagée et constatée fait de cette activité une réussite. Pour plus d’un, cette séance a été révélatrice de nouvelles pistes de réflexion sur la problématique de la femme en Haïti. Les jeunes pensent que des mesures urgentes et adéquates sont nécessaires pour faire face aux problèmes de violences faites aux femmes. Ils croient que l’Etat, la société civile et tous les acteurs de la vie doivent se joindre la main pour un futur beaucoup plus prometteur.
Max Grégory SANT FLEUR et Maxandre BIEN AIME
Animateurs du VDF Darbonne/Léogane