lundi 24 octobre 2016

Le Cap garde son cap

Soixante-quinze (75) jours après son sacre national, le club de débat du Cap-Haïtien a organisé un tournoi individuel de débat : un type de compétition différent de ce qui se fait habituellement dans le Programme Initiative Jeunes de FOKAL, dont le club fait partie. Ce tournoi s'est réalisé le samedi 1er octobre 2016, à l’université du Roi Henri Christophe du Cap-Haïtien (URHC).

En présence des nouveaux membres du club, environ une cinquantaine de jeunes recrutés en septembre 2016 à la fin des vacances d’été qui viennent de plusieurs établissements scolaires de la ville du Cap (les collèges Regina Assumpta, Externat Saint François Xavier, Modèle, Notre-Dame, Saint Joseph, l'Essor, Pratique du Nord ; les Lycées Nationaux Philippe Guerrier, Dutty Boukman, Bréda), des étudiant-es de l'URHC, du Centre national de formation à distance, ainsi que des parents et ami-es qui ont été invités à prendre part à l’activité.
L’objectif de cette compétition inédite a été de donner le goût et l'envie du débat aux nouveaux membres du club et de faire émerger des talents cachés parmi eux, et de savoir quel rôle conviendrait le mieux à tel ou tel jeune de façon à construire des équipes beaucoup plus équilibrées, beaucoup plus complémentaires et surtout beaucoup plus efficaces pour représenter le club dans les tournois officiels de FOKAL.

Le format utilisé pour un tel tournoi, reste le même que celui utilisé par le programme de débat de FOKAL, le format Karl Popper, néanmoins avec quelques modifications : chaque joueur avait l'obligation de faire les 3 discours différents du format Popper, le premier, le deuxième et le troisième ; les différents contre-interrogatoires ont été supprimés.
Donc le match est à un « un contre un », et les débatteurs ont le même temps de paroles que  dans le format Karl Popper régulier soit (6 minutes, 5 minutes et 5 minutes, y compris 6 minutes et 30 secondes de préparation). Les débats sont jugés sur la forme, c’est-à-dire la qualité de l’expression, la fluidité du discours, et sur le fond, autrement dit la pertinence des arguments, la cohérence de ces derniers avec le sujet et bien évidemment les supports apportés pour chaque cas. La durée de chaque rencontre était de 45 minutes.

Le tournoi s'est déroulé autour du sujet : « L’état haïtien devrait interdire la mendicité dans les rues ». Il y eut huit (8) participants : Jean Élie François, Johanna Augustin, Briana A. Philemy, Findji Pierre, Lovinsky Fils-Aimé, Schneidine Poux, Frislin Pascal, Boris Edska Bordenave provenant de différentes institutions de la ville. Quatre (4) filles et quatre (4) garçons répartis en deux groupes de quatre. Chaque joueur a joué trois matches en phase de poules et les deux meilleurs joueurs de chaque poule se sont retrouvés pour disputer les demi-finales, et les vainqueurs des demis sont passés  directement en finale.
L'argumentaire de cet énoncé s'est tourné autour du critère de l'ordre public et du développement touristique pour le cas affirmatif, sur le critère de la solidarité humaine pour le cas négatif. Trois arguments forts ont marqué les discours affirmatifs. Selon eux, premièrement « ne pas interdire la mendicité dans les rues constituait l'expression d'une impuissance publique ou encore de mal gouvernance », supporté par une déclaration du philosophe français des Lumières, François Voltaire : « Tout pays où  la mendicité fait rage est mal gouverné ».

Deuxièmement, la mendicité représente « une source d’insécurité pour l’économie du pays »  dans la mesure où des brigands se cachent derrière ce phénomène pour voler, détrousser et braquer des institutions privées, ainsi que d'honnêtes citoyens ; d’où l’arrêté du 24 septembre 2012 émis par le commissaire du gouvernement de Port au Prince, actuel sénateur de la république M. Jean Renel Senatus « qui interdit la mendicité à proximité des banques commerciales et des institutions publiques et privées ». Pour finir, la mendicité affecte le développement du tourisme dans le pays.
Les discours des cas négatifs, élaborés autour du principe de la solidarité humaine, étaient soutenus par trois arguments principaux. Le premier stipulait que « la mendicité ne doit pas être interdite mais, plutôt être combattue » parce qu’elle ne constitue pas en soi un délit (mineur ou majeur) et encore moins un crime. Elle ne saurait d’ailleurs en être un. Le meilleur moyen de combattre la mendicité, c'est de s'attaquer à la base véritable du problème : la pauvreté.

Deuxièmement, « criminaliser la mendicité est discriminatoire » car elle portera atteinte à la liberté individuelle, et conduira à l'irrespect du droit fondamental de l’être humain, qui est le droit à la vie. Interdire à quelqu'un qui n'a pas d'autres moyens de subsister de mendier, c'est l'interdire de vivre, le mener directement à sa tombe, et donc une violation flagrante des droits de l'homme.
Et pour clore,  « l’état ne peut pas interdire la mendicité dans les rues quant lui-même est le premier mendiant ». Cette position met l'accent sur le fait que le budget national est financé chaque année jusqu'à 70 % par la communauté internationale et que pour organiser nos élections, à chaque fois il nous a fallu le financement de pays donateurs. 

Findji et Lovinsky qui disputaient leur premier tournoi de débat, ont créé la surprise en se hissant au dernier carré du tournoi : Findjy a battu François Jean Élie (Meilleur débatteur du tournoi local en Avril 2016) en phase de poule, et il l'a retrouvé encore en finale après un match serré contre Lovinsky. Les deux sont les révélations de cette compétition. « J’étais loin de me douter que Findji était capable de débattre à un tel niveau. Je ne lui connaissais pas ce potentiel », déclara Edwin Berly Pierre-Louis, animateur du club, après avoir jugé le match opposant Findji à Jean Élie en phase de poule. « Ce jeune maîtrise à la lettre les discours 1 et 3. J'ai jamais rencontré de discours 1 si bien charpenté », approuva Jefferson Fabien, un autre juge. 

Lovinsky, pour sa première expérience avec le débat formel, ainsi que sa première participation à un tournoi de débat, s'est révélé être un futur débatteur de classe nationale, en dépit de quelques faiblesses dues à son inexpérience. Il s'est frayé un chemin parmi tous ces compétiteurs pour atteindre les demi-finales de la compétition. « Il ne lui manque que la concision et la clarté du langage, il a un très gros potentiel pour le débat », a commenté Saint-Hubert Jean Reynald, juge ayant aidé à la réalisation de la compétition.


Les principaux gagnants de ce tournoi sont d'abord Jean Élie François, sacré Champion pour la première fois, qui confirme son statut de super-débatteur du club ; ensuite Findji Pierre qui est sorti vice-champion à la surprise générale, et Lovinsky Fils-Aimé qui a remporté le titre de « Révélation du tournoi »; et en dernier lieu, Alendy Almonor, qui a été désigné par le vote des différents participants Meilleur juge.

Après un petit sondage mené auprès des personnes présentes par le biais d'une petite fiche de commentaire anonyme, le résultat a montré que le public a été très satisfait, que ce soit les juges, les membres du club, et les invités aussi. Cet événement a eu un impact positif sur tous les spectateurs. D’aucuns étaient vraiment enthousiasmés par le débat formel. D'ailleurs, une jeune élève de la ville a déclaré : « Je n'avais jamais imaginé que les débats pouvaient se passer aussi bien. Je suis épatée ! Malgré mon emploi du temps assez chargé, je vais me débrouiller pour participer aux rencontres du club et devenir une très grande débatteuse». Un autre participant, de passage dans la ville du Cap ce samedi, s'est exclamé : « Je n'ai jamais vu pareille chose de ma vie ! Et n’était-ce parce que je ne vis pas en Haïti, j’aurais participé activement et intégré le programme ».
Je ne peux terminer cet article sans envoyer des remerciements spéciaux à Ejymson VALMIR qui nous a donné cette idée, et deux(2) autres jeunes du club, Arnelle Philémy et Yves-Mary Saint-Hubert, qui se sont donné corps et âme pour l'organisation et la réussite ce tournoi.

Alendy ALMONOR

Animateur du Club de Débat du Cap-Haïtien

jeudi 20 octobre 2016

Christ-Roi solidaire des jeunes du club de Camp-Perrin, victimes de Matthew

Le club de débat de Christ-Roi a pris une initiative extraordinaire qui fait honneur à ses membres. Sous le leadership des deux animateurs du club, Alfred Désir et Joel Lazard, les jeunes ont décidé dans un grand élan de solidarité de venir en aide à leurs camarades des clubs de Camp-Perrin, région agricole totalement ravagée par l’ouragan Matthew. Ce projet a pris forme après ce que les 2 animateurs et les  jeunes du club ont vu, lu et entendu dans la presse et sur les réseaux sociaux de l’ampleur de cette catastrophe environnementale et humaine dans le grand sud.

Ils ont collecté entre eux divers produits nécessaires, allant de la nourriture (sacs de riz, farine, caisses d’huile, de spaghetti, boites de sauce tomate, des paquets de biscuits, des aliments en conserve…) à d’autres articles de consommation courante (produits de toilette et de lessive, vêtements pour adultes et enfants, draps et serviettes…). Cela faisait plaisir à voir tous ces jeunes qui se sont donnés rendez-vous samedi 15 octobre, au centre culturel Pyepoudre à Bourdon, le local du club, pour apporter chacun leur contribution personnelle et procéder également à la répartition en kit des produits récoltés.
Les gros contributeurs de cette campagne de dons ont été Paula Clermont Péan, fondatrice et directrice de Pyepoudre, Islande Baptiste, directrice du centre Katherine Dunham de FOKAL à Martissant, Alfred Désir,  animateur du club, et ces 3 dynamiques jeunes du club : Clarisse Altidor qui a organisé la semaine précédente une journée de couleur dans son école pour récolter des fonds pour financer l’achat des produits, Genise Mexius qui a fait le tour d’églises protestantes du centre-ville de Port-au-Prince pour recueillir des dons des fidèles, et Kervens Herby Timothée qui a fait une importante donation.

Le lendemain matin très tôt, à bord du véhicule d’un ami, Alfred Désir et Joel Lazard accompagnés de 5 jeunes du club, se sont rendus dans le Sud, transportant avec eux les ressources collectées. Leur mission a été triple : constater de leurs yeux l’étendue des désastres causés par les fureurs de l’ouragan Matthew dans le Sud; manifester leur solidarité avec leurs collègues et camarades des clubs touchés dans le Sud (Cayes et Camp-Perrin) ; remettre au club de Camp-Perrin les fournitures qui leur étaient destinées.

Sur la route, depuis Petit-Goâve jusqu’aux Cayes, aux dires d’Alfred Désir, la délégation n’a vu que ruines et désolation : partout des arbres déracinés ou defeuillés, des bananeraies et cocoteraies entièrement détruites, des maisons à terre ou sans toit, ponts emportés, des habitants hagards errant dans ce champ de ruines. La nature s’est couchée.

Ayant été averti la veille par Alfred de l’arrivée de la délégation, Alex Sylné, animateur du club de Camp-Perrin, avait convoqué ses jeunes chez lui (le local de réunion du club sert d’abri provisoire aux victimes de la zone) pour accueillir la délégation de Christ-Roi. L’autre animateur du club, Pierre Sony Daudier, était également présent. La rencontre, ayant lieu à 11h am, a été empreinte d’émotion : les débatteurs camp-perrinois témoignaient chacun de leur vécu durant le passage de l’ouragan. La délégation écoutait religieusement, posait parfois des questions pour mieux comprendre, compatissait avec la détresse de ces jeunes.

A la fin de la rencontre, tous les jeunes camp-perrinois du club, ont pris chacun un des kits disponibles, remerciant les représentants du club de Christ-Roi, et par là même tous les jeunes de ce club pour cette noble marque de solidarité et de générosité à leur égard. La femme d’Alex, très reconnaissante a préparé à manger aux 7 membres de la délégation de Christ-Roi.

Le débat n’enseigne pas seulement le savoir et le savoir-faire aux jeunes, mais aussi le savoir-vivre… ensemble !!! Christ-Roi vient de faire le premier pas vers eux. FOKAL suivra.

Jean-Gérard Anis
Coordonnateur du PIJ
FOKAL

Visite du club de Christ-Roi au club de Camp-Perrin

Suite au passage du cyclone Mathieu qui a ravagé plusieurs communes du Sud du pays en particulier Camp-Perrin, les Jeunes du Club PIJ de cette commune (Programme Initiative Jeunes) ont reçu la visite d’une délégation de leurs pairs du Club de Christ-Roi.

Conduite par les Animateurs Alfred et Lazare, cette délégation d’une demi-douzaine de jeunes est arrivée à Camp-Perrin aux environs de 11h A.M. Ils ont été reçus par une trentaine de jeunes de Camp-Perrin chez l’animateur principal du club de Camp-Perrin, Alex Sylné.

Objectif de la visite : sympathiser avec les jeunes du club de Camp-Perrin pour la plupart fortement éprouvés par ce fléau et partager avec eux les dons en vêtements, chaussures, nourritures qu’ils ont acquis grâce aux contributions recueillies entre eux et celles qui ont été collectées auprès des parents, d’amis ou d’associations religieuses.

Après quelques minutes consacrées aux témoignages des jeunes de Camp-Perrin sur ce qu’ils ont vécu  lors du passage du cyclone, témoignages qui ont été écoutés avec attention par les jeunes du Club de Christ-Roi, ces derniers ont posé des questions pour avoir de plus amples informations sur le drame et pour se rendre compte aussi de la situation actuelle des jeunes Camp-Perrinois, en particulier de ceux qui fréquentent le club.

Pour Clarisse du Club de Christ-Roi, elle n’aurait jamais imaginé que les dégâts étaient aussi graves. Elle qui rêvait tant de voir ce qu’est un cyclone en a maintenant presque le remords.

Une rencontre fraternelle, où animateurs et jeunes ont exprimé la joie de se retrouver et de partager aussi. Le mot d’Angélo du club de Camp-Perrin semble résumer l’atmosphère cordiale qui a caractérisé cette rencontre : « J’ai découvert à travers cette initiative du Club de Christ-Roi, que les Clubs PIJ, au-delà même de leur mission d’apprendre aux jeunes à débattre, sont avant tout des réseaux de solidarité et cela nous interpelle, nous aussi à voler au secours de nos frères et sœurs en difficulté, dès que l’occasion se présente. »

Après cette belle rencontre, alors que les jeunes de Christ-Roi et leurs animateurs échangeaient sur la cour, des réflexions avec l’animateur principal du club de Camp-Perrin autour du passage du cyclone Mathieu, l’animateur adjoint du dit club, Pierre Sony Daudier, fortement éprouvé lui aussi, dirigeait les distributions.

Plus que les dons eux-mêmes, c’est ce geste combien exemplaire, combien philanthropique, combien solidaire qui prouve que les germes de la construction d’une société basée sur la  solidarité et la compréhension mutuelle sont bel et bien là et qu’il ne faut que les raviver.

Un merci tout à fait spécial au coordonnateur du Programme Initiative Jeunes de FOKAL, Jean-Gérard Anis, qui  le mérite à double titre d’avoir encouragé l’initiative et d’y avoir donné aussi sa contribution, à Alfred et Lazare qui ont accompagné la délégation et donné aussi leur contribution en nature, aux jeunes du club de Christ-Roi qui ont offert un si bel exemple aux jeunes du pays en général ainsi qu’à tous ceux qui leur ont tendu la main pour venir en aide aux jeunes de Camp-Perrin.

Les jeunes de Christ-Roi se sont dits prêts à venir en aide aux jeunes du club de Camp-Perrin dans le cadre d’éventuels projets de reboisement par exemple.

Alex Sylné
Animateur du club de Camp-Perrin

mercredi 19 octobre 2016

LE STYLE MONDIAL DE DEBAT (WORLD SCHOOLS DEBATING FORMAT)

Le style mondial est le format de débat pratiqué aux tournois « World Schools Debating Championships » et « Pan-American Schools Debating Championships ». Les équipes se nomment « Proposition » et «Opposition» et chaque équipe comprend trois membres. Les résolutions abordent de questions importantes sur un plan international (pas des sujets qui ne touchent que le Canada). Les résolutions se présentent sous le format de « Cette chambre croit… » ou « Cette chambre devrait… ».

Chaque équipe doit présenter une thèse supportée par 3 ou 4 arguments. Cette thèse prend la même forme que la thèse d’un texte argumentatif.

Exemple: considérez un débat qui porte sur la résolution suivante: «Cette chambre devrait légaliser l’utilisation de la drogue dans le sport». Une thèse pour la proposition pourrait être: «Parce que la science améliore le sport». Il est important que l’opposition ait aussi une thèse et des arguments constructifs; il ne suffit pas d’attaquer ce que la proposition dit, car le fardeau de la preuve est beaucoup moins important que le fardeau que le « gouvernement » porte dans les débats parlementaires.


Responsabilités des orateurs :

Le contenu des six premiers discours évolue du premier discours contenant exclusivement de la matière constructive au dernier discours de l’opposition qui ne contient que de la réfutation. Le ton commence également avec une présentation plutôt calme d’idées et monte en passion et en énergie jusqu’à la fin du troisième discours de l’opposition.

1ère  Proposition (8 minutes)

Le premier orateur du débat doit définir les termes, introduire la thèse de son équipe et expliquer aux juges comment les arguments seront divisés avant de présenter les deux premiers points de son équipe. La définition des termes doit suivre l’interprétation la plus évidente de la résolution, sans liens indirects ou « modifications farfelues ».

Idéalement, ce discours commencera avec une introduction courte qui explique pourquoi on devrait passer une heure de discussion sur le sujet donné. Les arguments devraient idéalement être d’une longueur égale et faire référence à la thèse de l’équipe.

1ère  Opposition (8 minutes)

Le premier orateur pour l’opposition doit introduire la thèse de son équipe et la division de leurs arguments. Il doit passer jusqu’à deux (2) minutes AU DÉBUT DE SON DISCOURS à réfuter avant de présenter les deux (2) premiers arguments de son équipe pendant six minutes.

2ième  Proposition (8 minutes)

Le deuxième orateur pour la proposition commence avec deux (2) à trois (3) minutes de réfutation, suivie par le dernier argument (ou les deux derniers) constructif de son équipe, discours qui dure cinq (5) à six (6) minutes. Cet argument se doit d’être un point solide avec une solide analyse. Habituellement, le deuxième orateur ne défend pas les arguments de ses partenaires en faisant la contre-réfutation.

2ième  Opposition (8 minutes)

Le deuxième orateur pour l’opposition a un discours symétrique: quatre (4) minutes de réfutation suivies de quatre (4) minutes de discours constructif sur le dernier (ou deux derniers) argument de son équipe.

3ième  Proposition (8 minutes)

Cette position est unique au style mondial. Le troisième orateur ne présente aucun argument nouveau. Son rôle est de réfuter en détail et en profondeur tous les arguments de l’équipe opposée et de défendre les arguments déjà faits par sa propre équipe. Il peut l’accomplir en passant six (6) à sept (7) minutes de réfutation systémique puis une (1) à deux (2) minutes de contre-réfutation.

3ième  Opposition (8 minutes)

Le troisième orateur de l’opposition a les mêmes responsabilités que le troisième orateur de la proposition.


Les Discours de réplique

Les discours de réplique durent quatre (4) minutes et sont livrés par le premier ou le deuxième orateur de chaque équipe, commençant par l’opposition. Pendant le discours de réplique, l’orateur prend le ton calme et désengagé d’un membre de l’auditoire qui analyse pourquoi son équipe devrait gagner le débat. L’organisation prend souvent la forme de deux ou trois thèmes ou de quelques questions importantes. Le discours de réplique n’est pas un discours de réfutation mais c’est un sommaire philosophique du débat.


Les Questions d’information

Il n’y a pas de points d’ordre ni de points de privilège personnel dans le style mondial. Par contre, les questions d’information jouent un rôle important dans l’échange. Les questions d’information peuvent être posées après la première minute et avant la dernière minute de chacun des six premiers discours. Les chronométreurs annoncent la fin et le début du temps protégé en frappant leurs pupitres. Les questions d’information ne peuvent pas être posées pendant les discours de réplique. La règle générale est que chaque orateur devrait poser deux questions d’information et d’accepter deux questions pendant chaque discours.

Idéalement, les questions seront courtes (15 secondes maximum) et pertinentes, elles ne sont pas nécessairement pas sous forme interrogative. Les juges punissent la participation inférieure dans les questions d’information et récompensent les orateurs qui les utilisent bien.


Le Système de pointage

Les juges accordent à chaque orateur une note sur cent (100) avec une échelle effective de soixante (60) à quatre-vingts (80). Les discours de réplique sont notés sur cinquante (50) avec des notes entre trente (30) et quarante (40) alors que chaque équipe reçoit une note sur cent-cinquante (350). L’équipe qui reçoit le plus de points l’emporte et il n’y a pas de matchs nuls. Les juges accordent des notes en trois catégories :

Présentation (40 points)

Les juges considèrent la présentation des discours. La confiance, le ton, le volume, le contact visuel, l’utilisation de l’humour et le rythme sont tous importants. Les notes pour la présentation vont de vingt-quatre (24) pour un discours ordinaire jusqu’à trente-deux (32) pour un discours brillamment engageant.

Contenu (40 points)

Cette catégorie évalue le discours comme si c’était un texte écrit. La logique, la qualité des arguments, l’évidence et l’analyse déterminent la note. On peut donner vingt-quatre (24) points pour un discours qui manque ostensiblement de substance jusqu’à trente-deux (32) pour un discours qui démontre une bonne préparation et une sérieuse analyse.

Stratégie (20 points)

Pour la stratégie, on se pose deux questions: 1- comment l’orateur a-t-il répliqué aux idées de l’autre équipe? 2- Est-ce que l’organisation a été efficace? (temps bien géré, arguments choisis et divisés stratégiquement).

Les discours de réplique sont jugés avec les mêmes catégories, mais avec la moitié des points. Les notes pour les discours de réplique ne comptent pas pour les orateurs qui les donnent, seulement pour l’équipe.


À la fin de leurs délibérations, un des juges explique quelle équipe a gagné le débat, pourquoi cette équipe a gagné et combien de juges étaient en accord et en désaccord.



ada Association de débat d’Argentine

vendredi 14 octobre 2016

Memorandum du PIJ sur le festival Massimidi

Au public en général,
Aux parents, enseignants, à nos collaborateurs-trices, aux jeunes en particulier

Suite à la programmation d’une projection de film documentaire le jeudi 29 septembre 2016 dans le cadre d’un festival de films, FOKAL a fait l’objet d’une succession d’attaques très violentes dans les médias et sur les réseaux sociaux. Le festival de films « Massimadi » était organisé par une association haïtienne de défense des droits humains, KOURAJ.

Au mépris de la constitution et des droits fondamentaux, la FOKAL a été la cible de critiques violentes d’hommes politiques, d’un commissaire du gouvernement, et de nombreux citoyens, parfois anonymes, sur les radios ou les réseaux sociaux. Parmi les attaques figuraient des appels explicites au meurtre et à la destruction des locaux de la Fondation. La FOKAL a choisi de se retirer du festival et de fermer ses portes au public jusqu’à nouvel ordre pour protéger la sécurité physique de ses employés et de son public depuis le 27 septembre 2016. Les pages annexées à ce mémorandum présentent sous forme de questions-réponse certaines problématiques découlant de cette situation.

FOKAL travaille depuis sa création à la promotion des valeurs fondatrices d’une société ouverte et démocratique. Ces valeurs de respect et de promotion des droits humains, de justice sociale, de défense des libertés individuelles et collectives, de respect et de tolérance font partie de la déclaration universelle des droits humains de 1948 ratifiée par Haïti et de la constitution haïtienne de 1987, en vigueur dans notre pays.

Les activités de FOKAL visent, entre autres, à favoriser le débat et l’esprit critique autour des questions de société pour promouvoir la responsabilité individuelle et collective. FOKAL agit également pour faciliter l’accès au savoir et à la connaissance, à l’éducation, favoriser la protection durable de l’environnement et la créativité artistique.

Le programme de débats de FOKAL fait ses preuves depuis vingt ans comme outil d’apprentissage de la démocratie, de la citoyenneté, la résolution de conflits, la tolérance, le respect de l’autre, et le maniement des concepts philosophiques liés à l’argumentation et au raisonnement.

FOKAL demeure engagée auprès des jeunes et des collaborateurs qui animent nos clubs de débat. Nous souhaitons poursuivre le travail dans une atmosphère sereine et respectueuse, en accord avec les valeurs consubstantielles à l’existence d’une société démocratique, pour l’éducation et l’émancipation des jeunes de notre pays.

Merci.
Jean-Gérard ANIS
Coordonnateur Initiative Jeunes - Youth Initiative Program Coordinator
FOKAL - OPEN SOCIETY FOUNDATIONS HAITI
143, Avenue Christophe - BP 2720 HT 6112 Port-au-Prince, Haïti
Téléphone : (509) 2813 1694 - 
www.fokal.org



ANNEXE – QUESTIONS / REPONSES

1.       En quoi consistait le Festival MassiMadi ?

Massimadi est un festival international LGBTI (lesbien, gay, bisexuel, transgenre ou intersexe.) dont l’objectif est de sensibiliser, éduquer, informer, les membres des communautés africaines et antillaises dans le but de lutter contre l’homophobie dans ces communautés et faire connaître les vécus des personnes de cette communauté. Massimadi Haïti, organisé par l’association haïtienne de défense des droits humains, Kouraj, est un moment de réflexion, d’échanges, de débats et de et sensibilisation sur les questions du pluralisme dans un contexte haïtien, dans l’optique de participer à la création d’un monde plus équitable pour tous et toutes. Tous et toutes étaient invités à participer peu importe la classe sociale, le sexe, l’identité de genre l’orientation sexuelle ou l’appartenance à un groupe religieux.

2.       FOKAL était-elle l’institution organisatrice ou coorganisatrice du festival MassiMadi ?

NON. FOKAL avait choisi d’accueillir une activité du festival (conférence sur l’homophobie, témoignage, suivis d’un documentaire sur ce fait de société) dans sa salle de conférence, pour l’après-midi du jeudi 29 septembre. Nous rappelons que le festival devait durer 3 jours, et se dérouler sur 4 sites différents dans la zone métropolitaine.

3.       C’est quoi le Centre Culturel de FOKAL de l’avenue Christophe à Port-au-Prince ?

Il s’agit d’un immeuble appartenant à et construit pour FOKAL, ouvert en 2003, abritant l’administration et les bureaux des différents programmes, une bibliothèque ouverte au public, un auditorium de 130 places, et quelques espaces pouvant servir à la formation, aux ateliers, aux expositions. Les activités qui s’y déroulent sont gratuites.

4.       Quelles activités ont lieu au Centre Culturel de FOKAL à l’avenue Christophe ?

La FOKAL existe depuis 1995 mais le Centre de l’avenue Christophe existe depuis 2003. Voici les différents éléments composant le local et une brève description des activités:
La bibliothèque Monique Calixte (BMC) offre un catalogue d’environ vingt mille livres de fiction et documentaires portant sur des sujets de connaissance générale, des livres pour les petits, des documents audio-visuels éducatifs. La BMC organise aussi pour les jeunes des clubs de jeu d’échec de scrabble. La BMC compte plusieurs milliers de membres et accueille environ 150 lecteurs par jour.
Les espaces de formation servent aux ateliers de fabrication d’objets ludiques pour les enfants (peinture, cerf volants, fanaux etc.), ateliers de chant, ateliers techniques (graphisme, photo, écriture documentaire, etc.).

L’auditorium de 130 places accueille des événements artistiques de qualité d’artistes Haïtiens et étrangers (musique, danse, théâtre) ; des projections de films documentaires et de fiction (généralement suivis de débats) ; des conférences-débats organisés par FOKAL ou par des organisations de la société civile. A titre d’exemple, nous avons ainsi accueilli des débats sur (la dictature, la justice, la torture, les faux-médicaments, le traitement des brûlures graves ; l’exploitation minière ; les relations Haitiano-Dominicaines ; l’occupation américaine de 1915 ; l’avortement ; le Créole ; le patrimoine culturel Haïtien, etc.). Le but de ces débats est d’informer le public sur les avis d’experts et de permettre l’expression d’opinions divergentes et les échanges dans une atmosphère sereine.

5.       C’est quoi FOKAL et que fait FOKAL ?

La Fondation Connaissance et Liberté, Fondasyon Konesans Ak Libète, FOKAL, est une fondation Haïtienne laïque et apolitique qui œuvre à l’émergence d’une société Haïtienne plus juste, plus solidaire et démocratique. Ces termes « laïque » et « apolitique » signifient que FOKAL n’a statutairement pas le droit de faire la promotion de croyances d’ordre religieux et que FOKAL n’a statutairement pas le droit de soutenir des partis politiques. Néanmoins, elle est ouverte aux débats sur les affaires de la cité et elle défend les droits fondamentaux, y compris la liberté du choix religieux, la liberté du choix politique. Elle soutient les organisations Haïtiennes qui défendent les droits humains en général et les droits des exclus de la société ou des minorités.

FOKAL œuvre à sa mission à travers des programmes (débats, médias, arts et culture, éducation supérieure, etc.) et à travers des subventions (bourses universitaires, appui à la société civile et à la culture, appui à la production).
Son programme de débat à destination des jeunes incarne cet idéal et fait ses preuves depuis 20 ans comme outil pour l’apprentissage à la démocratie, à la citoyenneté, à la résolution de conflits, à la tolérance, au respect de l’autre, et au maniement des concepts philosophiques liés à l’argumentation et au raisonnement.


jeudi 13 octobre 2016

Mot de la Directrice Exécutive de FOKAL

Le 26 septembre 2016, FOKAL a dû fermer ses portes et temporairement cesser les multiples services qu’elle rend à différents secteurs de la population. Une campagne haineuse et mensongère a été orchestrée contre la Fondation et sa Présidente suivie de menaces meurtrières. Un temps d’arrêt s’imposait. Il nous fallait protéger notre staff et les centaines d’enfants, de jeunes et d’adultes qui fréquentent chaque jour notre Centre culturel, pour apprendre et comprendre, pour s’instruire et socialiser dans le respect de l’autre.
Nous n’avons pas cessé de travailler pour autant. Le Conseil d’administration, le personnel, et quelques partenaires proches, ont choisi de faire de cette pause forcée un temps de réflexion et de redéfinition de nos stratégies. Nous avons pris la mesure des défis nouveaux qui sont liés à l’accomplissement même de notre mission qui est de contribuer à la construction d’une société juste et solidaire, garante des droits fondamentaux de la personne, de toute personne sans discrimination, en toute dignité.
Le 18 octobre prochain, FOKAL va rouvrir ses portes. Pour accueillir à nouveaux ces enfants et ces jeunes qui nous demandent de leur redonner accès à l’information, à la lecture, à la culture et au débat. Il nous faudra sans doute rester vigilants, gardant en mémoire les leçons apprises.
FOKAL va rouvrir également parce qu’il y a eu le cyclone Matthew. Constatant l’étendue des dégâts dans toute la presqu’île du sud et dans d’autres régions du pays où nous travaillons avec des organisations paysannes, de femmes, de jeunes, où les bibliothèques communautaires partenaires ont été dévastées, où des membres de notre staff et leurs familles ont été éprouvés, notre engagement citoyen nous porte à aller vers les autres, avec intelligence, dans les limites de nos possibilités, vers ceux et celles qui attendent d’être secourus, aidés, avec compassion et dans l’espoir qu’il est possible de se relever d’une catastrophe. En toute dignité. Les subventions seront ré allouées pour permettre de répondre rapidement aux besoins de nos partenaires. Les liens sur le site de FOKAL seront donc désactivés jusqu’à février 2017.
Au-delà de la solidarité qui s’exprime dans l’instant, nous pensons déjà aux efforts à consentir afin d’aider à moyen et long termes les organisations partenaires de terrain à reprendre en main leurs moyens de travail, de production en vue de la construction d’une économie haïtienne devant tenir compte des vrais acteurs et actrices ainsi que des multiples facteurs climatiques et environnementaux. Nous serons également solidaires de ceux et celles qui veilleront à ce que l’aide humanitaire actuellement en déploiement respecte les efforts de coordination nationale, les règles de transparence nécessaires et prenne en compte les besoins spécifiques des personnes les plus vulnérables.

Port-au-Prince, le 10 octobre 2016

Lorraine Mangonès
Directrice Exécutive


Mo direktris la
26 septanm 2016, FOKAL te oblije fèmen pòt li pou yon ti bout tan epi sispann ofri sèvis bay divès sektè nan popilasyon an. Yon kanpay rayisans ak mantò te òganize kont Fondasyon an ak prezidant li an. Mete sou sa, te genyen menas boule ak lanmò. Li te nesesè pou n fè yon kanpe. Fòk nou te pwoteje ekip la, pwoteje santèn timoun, jèn ak granmoun ki frekante sant kiltirèl la chak jou pou vin chache konesans ak konpreyansyon, pou enstwi tèt yo epi pou aprann viv ansanm nan respè.
Kwaksa, nou pa t sispann travay. Konsèy administrasyon an, ekip la ak kèk patnè pwòch, te chwazi fè kanpo fòse sa a tounen yon moman refleksyon, yon moman pou rebat kat la nan sa ki konsène estraji nou. Nou evalye nouvo defi ki makònnen ak reyalizasyon misyon nou an. Misyon sa a ki se pote kole nan konstwi yon sosyete ki jis, ki solidè, ki garanti nan ladiyite dwa fondamantal moun, tout moun nèt san diskriminasyon.
FOKAL ap relouvri pòt li 18 oktòb k ap vini an. L ap rekòmanse resevwa timoun ak jèn k ap mande rebay yo posibilite pou gen aksè nan bibliyotèk la, nan aktivite kiltirèl yo epi kontinye fè deba. Sandipetèt, n ap oblije rete vijilan, kenbe nan memwa nou leson nou tire yo.
FOKAL ap relouvri tou akòz siklòn Matye ki fè yon latriye dega nan tout zòn Sid peyi a ak nan lòt kote ankò. Nan zòn sa yo, FOKAL travay ak divès patnè : òganizasyon peyizàn, òganizasyon fanm, gwoup jèn, bibliyotèk kominotè siklòn nan ravaje. Epi gen manm nan estaf la ak fanmi yo ki sibi tou. Angajman sitwayen FOKAL mande pou nou mache al kontre ak patnè sa yo k ap tann pou resevwa sekou, pou yo jwenn èd ki bay ak konpasyon tou. Nou vle aji ak entelijans, nan limit kapasite nou, etan nou rete kwè li posib pou n rekanpe apre yon katastwòf, ak tout diyite nou. Reyamenajman pral fèt nan pwogram sibvansyon an pou pèmèt reponn byen vit selon bezwen patnè nou yo. Ki fè, lyen ki sou sit Fokal yo ap bloke epi y ap rekòmanse fonksyone nan mwa fevriye 2017.
Anplis solidarite moman an ekzije, nou deja ap reflechi sou jefò k ap nesesè pou pote konkou bay òganizasyon patnè ki sou teren an, sou yon tan ki pi long. Tout sa, se nan lide pou ede yo reprann kap yo nan travay yo ak nan zafè pwodiksyon, dekwa pou yo rive konstwi yon ekonomi ayisyèn k ap pran an konsiderasyon divès eleman ki gen arevwa ak pwoblèm klima epi ak anviwonnman an. N ap solidè tou ak sila yo k ap rete veyatif sou kesyon èd imanitè k ap mete an plas kounye a, pou li ka respekte jefò k ap fèt pou gen yon kòdinasyon nasyonal, pou gen transparans epi pou atansyon pote tou sou moun ki pi frajil yo.

Pòtoprens, 10 oktòb 2016

Lorraine Mangonès
Direktris ekgzekitiv



Word of the Executive Director

October 13, 2016

On September 26, 2016, FOKAL had to close its doors temporarily and suspend the multiple services it provides to different sectors of the population. Hateful and deceitful campaign was orchestrated against the Foundation and its President [NDR: Michele Duvivier PIERRE-LOUIS] followed by deadly threats. A pause was necessary. We had to protect our staff and the hundreds of children, youth and adults who visit our daily cultural center to learn, understand, educate and socialize themselves in respect of the other.

We have not stopped working so far. The Board, staff, and a few close partners have chosen to make this forced break time for reflection and redefinition of our strategies. We took the measure of the new challenges that are related to the fulfillment of our mission to help build a just and caring society, guaranteeing the fundamental rights of the person, of every person without discrimination, in all dignity.

On October 18, FOKAL will reopen. To accommodate again to these children and young people who are asking us to give them access to information, reading, culture and debate. We will take probably remain vigilant, keeping in mind the lessons learned.

FOKAL will reopen also because of the Matthew hurricane. Noting the extent of damage throughout the southern peninsula and other parts of the country where we work with farmers' organizations, women, youth, where partner community libraries were devastated, where members of our staff and their families were victim, our citizen engagement makes us reach out to others with intelligence, within our possibilities, to those waiting to be rescued, helped, with compassion and hope that it is possible to recover from a disaster. With dignity. The grants will be reallocated to enable rapid response to the needs of our partners. Links on the website of FOKAL will therefore disable until February 2017.

Beyond the solidarity expressed in the moment, we’re already thinking of the efforts needed to help medium and long term field partner organizations to take control of their means of work, production for building a Haitian economy to reflect the real actors and actresses as well as multiple climatic and environmental factors. We will also be in solidarity with those who ensure that humanitarian aid currently deployed respects national coordination efforts, the necessary transparency rules and take into account the specific needs of the most vulnerable.

Port-au-Prince, October 10, 2016

Lorraine Mangonès
Executive Director

vendredi 7 octobre 2016

Ci-git, Camp-Perrin

Chronique d’une tragédie annoncée

Le mot aurait pu s’appliquer à l’ensemble des communes du sud frappées par le cyclone Mathieu, aux dires de gens qui arrivent à Camp-Perrin après maintes difficultés dues notamment aux arbres arrachés qui jonchent les routes.

 Pianissimo, pianissimo, pianissimo…   
 Pourtant, tout a commencé de façon tellement calme, ou disons-mieux, malgré les nouvelles faisant état des dégâts causés à la Jamaïque, à la Martinique par Mathieu, jusque fort tard dans l’après-midi du Lundi 3 Octobre, aucune menace n’était encore visible dans notre ciel. Vers les 5 heures P.M, Jean-Gérard Anis, responsable du Programme Initiative Jeunes de FOKAL m’appelé pour s’enquérir de l’évolution de la situation tout en m’informant que la Jamaïque est déjà fortement touchée, et que prudence est recommandée. Je l’ai rassuré, car, à part qu’il pleuvinait et ce, depuis la matinée, rien de grave n’était à signaler. D’ailleurs, les paysans (j’habite dans une région agricole) se réjouissaient déjà que le cyclone soit  venu sous forme de pluie. Les plus jeunes cependant  ne sont pas contents. Ils rêvaient tant de voir ce que c’est qu’un cyclone dont ils ont seulement entendu  parler par les plus âgés. Patientez mes enfants, vous allez vivre un cyclone, un vrai ;  vous allez vivre l’horreur, vous allez vivre l’enfer…

Piano, piano, piano
      Une heure environ après l’appel d’Anis, j’observais attentivement le paysage. Je regardais en particulier les cocotiers dont les plus hauts secouaient la tête de gauche à droite et de droite à gauche. Cela me parait inquiétant. J’adresse un SMS à Anis : « Timidement, les premières rafales nous parviennent. » Il était 5h43 P.M.

 Mais des cyclones, j’en ai vu : Allen, Gordon, Eric etc… et je pense que celui-ci n’en est qu’un de plus, avec son lot de misères certes, mais tout de même supportable. Camp-Perrin est allé s’endormir avec l’espoir que le Soleil se lèverait le lendemain, timidement certes, mais après tout, les bonnes pluies n’allaient-elles par remplir les sources, gonfler nos rivières et nos canaux d’irrigation et augurer de bonnes récoltes ?

Et les inquiétudes commencent…
         Mais les rafales se sont intensifiées. Vers les dix heures du soir, elles commençaient à être inquiétantes. Passé minuit, la situation a persisté. Mais je ne sais pas quel espoir nous fit croire qu’avec le lever du soleil elle s’améliorerait.  Et les heures ont passé. On appelle ça et là des amis s’informer de leur situation et pour leur dire de bien s’abriter.

 La tragédie est à nos portes…
 Tout a commencé à se dégénérer réellement mardi  entre 4 et 9h du matin. Les bruits les plus surréalistes étaient entendus. Tantôt, on croyait qu’il arrivait un gros camion, tantôt on entendait ou plutôt, on croyait entendre des sifflements ou des grondements. Ma femme semblait même s’en amuser un peu. Elle et moi observions à travers les fenêtres de ma bibliothèque le noir qu’illuminaient à chaque instant les éclairs et commentions avec désolation le sort de ceux qui abritaient les taudis dans les bidonvilles des Cayes et des montagnes avoisinantes, quand nous entendîmes deux détonations. J’ai rien vu. Mais ma femme m’assure qu’il a vu deux feuilles de tôles frapper le câble haute- tension de l’EDH. La situation est passée à « un autre niveau. » Je texte encore une fois à Anis : « Jamais on n’a enregistré une telle catastrophe. »

Rescapés de  l’enfer…
       «  Entendre et voir, c’est deux », dit le vieux proverbe créole : « Tande ak wè se de. » A quatre heures, on ne pouvait plus dormir ; les enfants  réveillés et pris de panique, pleuraient. Quelqu’un frappe à la porte et criait. Avec beaucoup de difficultés, car l’eau entrée à travers les fenêtres démontées et les persiennes rendaient le sol glissant ; on est allé ouvrir la porte, ma femme et moi. On luttait avec la porte qu’une force extraordinaire, attirait et repoussait tout à la fois. « Entrez vite », nous dimes, sans savoir qui c’était. C’était un jeune de 17 ans qui, paniqué, est parvenu à courir un kilomètre sous les tôles qui volaient comme des feuilles et des arbres qui tombaient comme de vulgaires châteaux de cartes, sans  parler de la constante menace d’être charrié et jeté dans la falaise creusée par la Ravine du Sud et qui borde la route.  «  Je ne vois pas la vie pour les miens, ils sont sans doute morts à l’heure actuelle. Oh ma pauvre maman ! Pourquoi n’avez-vous pas voulu me suivre ? » Tant bien que mal nous l’avons consolé, l’assurant que Dieu finirait par leur accorder la vie et que point n’était besoin de se tracasser alors que lui, il était sauvé.  Dehors, l’Apocalypse continue.

On frappe à la porte à nouveau. Ma femme et moi allons ouvrir. C’est mon frère Benjamin dont la maison est à quelques mètres de la mienne. Les tôles de ma maison commencent à s’envoler : «  Eh bien, va vite chercher les autres et reviens au plus vite. Fais attention ! » Il revient. Nous allons rouvrir. Mais cette fois-ci le vent a dit : « Non. Vous ne laisserez entrer personne. » C’était une véritable bataille entre ma femme et moi d’un côté et les éléments déchainés. Ils sont enfin entrés après mille efforts. Maintenant, le hic est de refermer la porte. On risquait, si on sortait d’être emportés par le vent et jetés dans la falaise de la farine du sud qui est à 100 m de la maison. La Ravine du Sud qui depuis des mois, à cause de la sécheresse, était tarie et qui maintenant se faisait à peine entendre. Et quand la Ravine du Sud ne fait pas de bruit, cela veut dire que son lit est rempli, cela signifie qu’elle est dans ses mauvais jours, qu’elle est  dangereuse. «  La force est calme », avait un jour dit un de nos dirigeants.

        « Tiens bon, on va la fermer enfin ! » Car le vent, a lâché la porte. Mais ce n’était qu’une feinte. Brusquement la porte est attirée, comme happée de l’extérieur et en une fraction de seconde est repoussée en sens contraire avec la même violence. Il ne restait dans ma main que les débris de ce qui fut autrefois la porte principale de la maison. En même temps, les murs du porche qui recouvraient l’escalier et dont la toiture en tôles ondulées étaient emportée deux heures auparavant, s’est effondrée et a failli ensevelir sous les décombres, ma femme et moi qui étions en train d’accueillir des voisins qui ayant abandonné leur maison, arrivaient de plus en plus nombreux. L’un d’eux, une jeune femme appelée Nounoune et ses deux garçons qui, habite 100 mètres derrière notre maison a vu s’envoler les tôles de sa maison depuis 4h am. Ils étaient restés accroupis sous une table, ravagés par la peur se croyant à leur dernier jour. Profitant d’une brève accalmie et ils ont abandonné la maison ou plutôt ce qui en restait cherché refuge. Et les tôles ci-haut mentionnées qui ont percuté le câble haute-tension de l’EDH provenaient de leur maison, complètement dépouillée à l’instant. Pour une fois, on s’est réjoui qu’il n’y ait pas d’électricité, car dans la panique générale, plusieurs personnes seraient mortes, électrocutées.

        Il fait presque jour maintenant, et j’écris encore une fois à Anis : « Catastrophe indescriptible ». Le message roule encore sur l’écran du téléphone à l’instant où j’écris sans pouvoir partir. Toute communication était depuis longtemps devenue impossible par téléphone.  

Ci-git, Camp-Perrin…
        De mémoire d’homme, on n’a jamais vécu pareille tragédie à Camp-Perrin. Ceux qui ont cent ans ou à peu près l’affirment. C’est un 12 Janvier 2010 en…vent !  Camp-Perrin, dont il ne reste plus aujourd’hui que le souvenir. Camp-Perrin, jadis l’une des villes les plus vertes du pays ! Camp-Perrin qui faisait l’orgueil de ses fils et le charme de ses visiteurs ! Partout, où que vous alliez, et même à Brouette, quartier résidentiel, où l’on trouve le célèbre collège de Mazenod et autres institutions prestigieuses, oui même à Brouette, toujours un petit protégé des cyclones grâce aux collines qui l’entourent, le même spectacle désolant s’offre à l’œil. Ce qui reste d’arbres sont complètement dépouillés de leurs feuilles. Et la vue porte si loin que des maisons autrefois invisibles, cachés par le vert feuillage des arbres, sont maintenant visibles à des kilomètres. C’est une ville fantôme, digne du décor des films les plus apocalyptiques. Des écoles ont vu leurs toits emportés par la fureur du cyclone et même l’Eglise Sainte Anne, un joyau architectural, s’est effondré. Heureusement, personne n’y était allé chercher refuge à l’appel du curé qui de bonne foi « pódyab » avait invité tous ceux qui se sentaient éventuellement en danger, à venir y chercher « asile ».

Qui pourra évaluer le bilan des dégâts ?
               A l’instant où j’écris, personne ne peut dire encore le bilan exact de ce cataclysme, les communications par voie terrestre, ou même par téléphone étant quasi impossibles. On sait seulement qu’aucun mort direct n’a été enregistré dans la commune de Camp-Perrin : ce qui relève presque du miracle. On sait surtout, que les jours à venir seront sombres, sombres, sombres. Camp-Perrin et tout le reste du département est dans l’urgence d’une aide humanitaire et ce pour longtemps encore, car, les manguiers, les « véritables », les arbres à pain qui jouent un rôle si important dans le quotidien des habitants ne sont plus. On se dit maintenant que malgré le chômage, malgré la misère, trois jours auparavant on était encore très riche, car on avait au moins un toit, les arbres donnaient leurs fruits.
L'église Sainte-Anne de Camp-Perrin après le passage du cyclone
                Qui saura mesurer l’impact écologique de cette catastrophe ? J’ai vu ce matin encore, des jeunes les mains remplies de tourterelles, les unes mortes de froid, les autres encore vivantes, mais engourdies et incapables de s’envoler. La faune domestique a été elle aussi  durement frappée. Des bœufs, des cabris,  qui constituent l’essentiel de l’économie paysanne sont morts, frappés par la violence du vent et des pluies diluviennes. D’autres sont à l’agonie.

Du côté des autorités étatiques, silence, absence…du moins pour l’instant
 Contrairement aux années antérieures, au lendemain de telles catastrophes, des hélicoptères sillonnaient le ciel à basse altitude. Les autorités faisaient acte de présence. Au moment où j’écris ces lignes, rien de ce genre n’est observé, si l’on excepte le cas du Sénateur Hervé Foucand qui, accompagné de deux opérateurs de la compagnie Estrella tente de déblayer les rues principales de la commune, complètement jonchées de branches.

                  Les autorités n’ont-elles pas encore pris conscience de la dimension du drame qui se profile à l’horizon ? Et certainement, vu le rôle que joue Camp-Perrin dans le domaine agricole surtout, pour le tout le pays, ce dernier ne manquera pas d’en pâtir.

            Certains gardent encore l’espoir d’une résurrection, mais ce ne sera pas disent-ils, dans trois jours. On souhaite que, taraudés par la misère les paysans ne coupent pas les arbres restés debout quoique sans feuilles (ou parce que sans feuilles) et que ces derniers en repoussent de nouvelles qui redonneront à Camp-Perrin sa verdure proverbiale et fassent en même temps renaitre l’espoir.
                                                                                             
Alex Sylné,
Animateur du club de débat de Camp-Perrin
Programme Initiative Jeunes - FOKAL


 N.B : Nous n’avons pu établir jusqu’à présent aucun contact avec les jeunes de notre club, et croyez-nous, nous en sommes très tristes, car nous savons dans quelle situation beaucoup d’eux évoluent.

Une année à la tête du PIJ

  cher.es ami.es, Depuis janvier 2022, je suis appelé par la direction de la FOKAL à assumer la charge de la coordination du Programme Initi...