jeudi 25 août 2016

D'anciens débatteurs du club de Cote-Plage témoignent

Dans le cadre des activités ayant rapport à la célébration de ses 15 ans (16 ans maintenant), le club de Côte-plage donne la parole aux anciens membres du club dans une rubrique témoignage.


Ils sont de toutes les époques, maintenant professionnels ou universitaires vivant tant en Haïti qu’à l’étranger. Ils reviennent, le temps d’un témoignage, parler aux jeunes de la communauté de débat pour les encourager à continuer sur la voie de l’arme de la dialectique.


« J’ai fait mes premières expériences dans le club de débat en 2000. J’étais à époque en terminale au Collège de cote-plage. C’était une expérience très intéressante et formatrice. On nous apprenait la culture de la tolérance et le pluralisme des idées qui sont les principes de base de la démocratie. Au début, j’étais très timide lorsque j’intervenais car j’avais peur de faire des fautes de français, les formateurs de l’époque, Mr Gâteau et Mr Tranquille, nous incitaient à participer d’avantage car ils nous disaient qu’on apprend mieux en faisant des erreurs, Nous étions plusieurs, venant de classes différentes. Je me rappelle de Guy Gérald Fabre, de Gutenberg Destin, de Marie France Louis, de Billy Montout, de Ténéus Julio et moi-même. J’avoue avoir beaucoup de choses au club de débat. Je souhaite que cette expérience continue sa route dans le pays, Selon moi, le club de débat s’impose  à travers ses méthodes et ses pratiques, comme un centre d’apprentissage incontournable  à la démocratie pour les jeunes.
 Martineau Benoit JEAN
 2001


A mon avis, l’un des plus grands bénéfices que j’ai tiré de ma formation de débatteur dans le club de Côte-plage est cette capacité à entretenir une idée ou une opinion sans pour autant la partager. Le fait de préparer une argumentation pour et contre lors d’un débat m’a permis de me mettre dans la peau de l’autre et du coup il devient plus facile de comprendre la position adverse et de mieux se situer par rapport à sa propre position. En un mot, ce programme m’a permis de transformer mon petit miroir dans lequel je ne voyais que ma petite opinion en une fenêtre à travers laquelle je peux voir le monde.

Guy Gérald FABRE
 Débatteur à Côte-Plage en 2001
Animateur du club de Cayes 2009-2011


Structure ta pensée, structure ta vie

J’étais encore une adolescente quand j’ai rejoint le programme de débat lancé par la Fokal qui s’accentuait sur la maîtrise du discours, la construction l’argumentation et la structure de la pensée. Certains y voyaient un espace où ils pouvaient discuter des sujets philosophiques et sociaux. D’autres y participaient juste pour les différentes rencontres interscolaires et la possibilité de se faire de nouveaux amis. Pour moi le club de débat était une école, un espace où je pouvais être moi-même et plus encore.

Chaque concours de débat que j’ai eu la chance de prendre part m’a aidé à comprendre que je devais toujours donner le meilleur de moi, même si la défaite était évidente. Mon équipe n’a jamais gagné un match mais défaite après défaite ma confiance en moi grandissait. Défaite après défaite, je m’efforçais de donner le meilleur de moi. J’apprenais à mieux travailler en équipe et à encourager les autres autour de moi à devenir meilleur et à croire en leur capacité. Mon expérience dans le débat m’a aidé à me surpasser et à faire de chaque opportunité dans ma vie professionnelle en succès.

Ces quelques lignes ne suffiront pas pour exprimer ma gratitude envers cette fondation qui a joué un rôle si important dans ma vie. Bien sûr, j’ai eu la chance de rencontrer des gens talentueux qui m’ont aidé à sculpter celle que je suis aujourd’hui.

En cette occasion de célébration, je voulais sincèrement remercier la Fokal et souhaiter qu’elle puisse continuer à dénicher les trésors insoupçonnés en chacun de ces jeunes qui prennent part à ces programmes.
Merci de tout cœur.

Marie France-LOUIS
Une ancienne du Club de Débat  de Côte-plage
2001-2004


C'était une expérience très spéciale pour moi parce qu’elle a marqué ma vie de façon incroyable
Je vais mentionner quelque expériences que j'ai eu su sein du club.
J’ai été meilleur débateur 3 fois, Ce qui m'avait permis d’être sélectionné pour représenter Haïti dans un tournoi de débat en Italie
Le débat m'a aidé dans l'actualité à résoudre de façon efficace Des problèmes de la vie quotidienne. Il m'a aidé à avoir un discours concis et précis. Il m'a aidé à vérifier et justifier toute vérité.
Le débat m'a enseigné à lutter avec des arguments, à respecter le point de vue des autres, à être tolérant, patient, sage, humble, envers les autres, peu importe sa croyance et sa façon de penser
Mais le plus grand souvenir que je garde dans mon cœur c’est l’amitié et la confiance que nous avons développé su sein de notre club qui nous avons permis de travailler d'une manière incroyable
Maintenant je vis au Mexique depuis plus de 5 ans, le débat  fait partie de mes meilleurs souvenirs académiques car  j’ai appris que la vérité ne se trouve en personne mais devant nous.
Mes apprentissages dans le club sont infinis. Et aujourd'hui avec beaucoup de fierté  je peux vous dire le débat c'est ma plus grande richesse.

Victor LOUIDOR
2005-2007

 

Mes années dans le club de débat de Côte-Plage comptent parmi les plus belles en termes d’apprentissage, de socialisation, de découverte et d’aventure. J’ai encore une ribambelle de souvenirs et d’histoires à raconter qui n’ont encore rien perdu de leur magie, et qui je pense, n’en perdront rien à travers les ans. Grâce à tout ce que j’ai appris pendant ces nombreuses années soit en termes de connaissance, soit en termes d’attitude, j’ai pu participer valablement à de multiples activités culturelles, sociales ou intellectuelles. 
J’ai pu intégrer l’Université d’Etat d’Haïti et poursuivre mon cheminement jusqu’au bout de mes études au sein de cet établissement. Mon expérience au sein de cette institution qu’est devenue le club de débat de Côte-Plage n’a rien de banale. Au contraire, elle demeure le socle sur lequel je me construis en tant que citoyen valable et utile à la société haïtienne.
Samuel TAILLEFER
2005-2012


J’ai toujours été une personne difficile, je ne me fais pas des amis facilement, j’avais beaucoup de difficulté à m’intégrer dans les différentes classes dans lesquelles j’étais. J’ai été invité dans le club de débat alors que j’étais en 9e année fondamentale. J’ai pensé que ce serait ennuyeux mais dès le premier jour j’en suis tombé amoureux car pour la toute première fois, dans un groupe je me rendais compte que je n’allais pas être jugée pour mes choix, mes opinions sur certains sujets ou pour la personne que j’étais. J’avais comme une nécessité de me sentir dans une communauté comme celle-là.
J’ai eu la possibilité de me construire en mieux, d’améliorer beaucoup d’aptitudes et d’attitudes de mon moi que je croyais si complet. J’ai pu remettre en question certains tabous, des jugements arrêtés que j’avais sur certains sujets. L’avortement en est un exemple car j’ai grandi dans une famille chrétienne. On avait donc cet opinion toute faite que celles qui avortaient étaient des dépravées, des prostituées. Un jour on avait à débattre sur le sujet de la justification de l’avortement. J’ai vite choisi le cas négatifs et je me voyais déjà en train de démanteler ceux qui avaient eu le cas affirmatif. Mais les formateurs, Monod Alphonse et Gutenberg Destin m’ont contrainte de jouer le cas affirmatif. Je leur avais dit que je n’avais aucun argument qui me permettrait de défendre cette position. Guten m’avais répondu que tout était dans les livres, apprend de ce que tu pourras trouver sur le thème. J’ai acquiescé à contre cœur, mais combien grande fut ma surprise quand j’ai trouvé, dans mes recherches, toutes les raisons pour lesquels une femme pouvait avorter.  Et toutes ces raisons étaient hors du panier bien rempli de préjugés que la société m’avait donné. Les recherches sur le thème m’ont appris à faire des concessions, beaucoup de concessions. Je suis devenue plus tolérante envers les autres, leurs opinions, les différentes cultures etc…. Je suis devenue plus ouverte quand on me parle d’un autre sujet, et je comprends que mon opinion n’est pas forcement la bonne. Cela a fait de moi une meilleure personne. J’ai fait plus de lecture, plus de recherche, et j’ai appris à me faire des opinions mieux construite. Je suis devenue plus émancipée, plus mature.  

L’expérience du débat est l’une des meilleures activités qui existe pour les jeunes écoliers car elle vous prépare pour l’école et pour l’avenir car débattre est un exercice que nous faisons continuellement même sans nous en rendre compte Dans le milieu professionnel il est encore plus important de savoir argumenter. Le médecin doit argumenter, parfois, pour convaincre les patients sur la nécessité de la médication qu’il lui offre, le commerçant encore plus pour montrer la qualité de ses produits ou services. Mais le plus important c’est qu’il vous apprend à mieux vendre la personne que vous êtes. J’ai émigré aux Etats-Unis, à l’époque je ne parlais pas anglais, mais cela n’a jamais été un obstacle à mon intégration car j’ai pu bien vendre la personne que je suis ainsi que mes idées et cela c’est grâce au club de débat. Mon intégration a été plus facile que beaucoup d’autres personnes qui n’ont pas eu la chance de participer à un programme comme celui-là.

Au final le club de débat de Côte-plage fut une famille dans laquelle j’ai eu beaucoup d’expérience extraordinaire. Beaucoup de plaisirs, de fou rire, de partage et de fierté surtout avec le titre de championne nationale que j’ai eu en 2010

Un espace de culture personnelle, qui m’a donné plus de maturité, plus de sens de responsabilité, plus de curiosité.

Je ne remercierai jamais assez la FOKAL qui a implémenté le programme de débat dans le pays ainsi que tous ceux et celles qui m’ont accompagné pendant cette vie de débatteuse (Mr Marc Anthony Alix surtout car c’est lui qui m’a incité à participer à cette fantastique aventure.)

J’encourage beaucoup les jeunes à débattre car même s’ils ne se rendent pas encore compte de l’importance de ce programme mais je vous garantis que ce temps que vous passez dans un club n’est pas perdu mais investi.

Isabelle PIERRE-LOUIS
Une ancienne du Club de Débat  de Côte-plage
2004-2011

Débattre c'est s'imposer, s’affirmer, s'extérioriser. Mon cheminement dans le club de débat m’a fait renaître. L'aisance et la facilite avec lesquelles je m'exprime sont les empreintes du débat sur ma petite personnalité. Tout le monde ne sera toujours pas d'accord avec vous peu importe les motifs, mais il ne faut pas baisser les bras pour autant, il faut conserver nos propres idéologies et ces traits uniques qui renforcent notre personnalité telle est à mon avis l'objectif du club de débat. Ainsi donc je lance comme slogan: le club de débat, le bastion des idées novatrices, le club de débat là où l'on s'aime même en dépit des divergences idéologiques

Lynda NEGRIEL
2007-2010


J’étais en 8eme année fondamentale quand j’ai intégré officieusement le club de débat de Côte-Plage. A l’époque ma grande sœur était membre du club, et je devais l’attendre après la réunion pour pouvoir rentrer chez nous. Elle me laissait donc, sur une chaise, dans un des recoins de la salle dans laquelle avait lieu les réunions. Je prenais plaisir à regarder ces jeunes qui discutaient entre eux, je me demandais comment ils arrivaient à ne pas se battre. 3 ans plus tard, j’intégrais le club à mon tour. Ce fut une période extraordinaire pendant laquelle j’ai pu comprendre comment dépasser mes limites, comment utiliser ma capacité à réfléchir pour imposer mes opinions. Je me suis fait une idée plus juste des réalités du monde en comprenant que les choses ne sont jamais aussi simples qu’elles paraissent, ni totalement vrai ou totalement faux. 

J’ai aimé l’atmosphère de franche camaraderie qui était de mise dans les réunions. On apprenait beaucoup et on s’amusait aussi beaucoup. C’était le parfait mélange du sérieux et du plaisir.
Dans le débat j’ai eu beaucoup de joies, beaucoup de peines aussi en perdant certains matchs. Grace au débat j’ai pu comprendre que la défaite n’en est pas une en soi si on apprend de chaque erreur.

Vive le débat
Vive la culture de la tolérance et du vivre ensemble
Vive le club de Côte-Plage
Getcheen LUBIN
Ancienne du Club de Côte-Plage
2007-2012


J’avoue sincèrement qu’avant  je n’étais pas trop ouvert, j’avais un peu peur de prendre la parole puisque je ne voulais pas faire rire de moi. Ensuite je n’étais pas vraiment convainquant en argumentation.  
Un jour, par curiosité, j’ai été participé à une séance de débat J’ai été  ébahi de ce qui se faisait dans le club, le premier jour j’étais tellement timide que je n’ai pas eu l’audace de réagir comme le faisaient les autres qui participaient.  Après plusieurs séances de débat j’étais finalement arrivé à m’intégrer dans le groupe. Ce qui me frappait le plus c’était la pertinence qu’il y avait dans les réactions. C’est vrai qu’il n’y avait pas un cours ou l’on nous apprenait comment argumenter pour ou contre mais dans les réactions pour ou contre, les élèves autour du responsable, en table ronde, étaient fiers de prendre la parole pour dire ce qui les traversait. Comme bénéfice cela a développé chez moi le sens de l’argumentation je n’étais pas encore en philo mais je pouvais déjà défendre ma position avec des arguments solide et logique. Le club de débat a joué un rôle important pour moi dans le fait qu’il  m’a aidé à développer la capacité de réfléchir non pas de manière superficielle mais en vue de percer les mystères, transcender les phénomènes pour explorer les noumènes des choses.  

 Le temps passe au club de débat n’a pas été un temps perdu, en toute sincérité car aujourd’hui je savoure avec joie les fruits de cette expérience. A mon deuxième stade universitaire j’ai pu découvrir que le débat c’est une arme que l’intellectuel a pour rentrer en confrontation dans le monde du savoir. La preuve en est grande que les grands philosophes savaient, pour émettre les pensées qui ont traversées les siècles et qu’aujourd’hui tous nous sommes bénéficières.  

Le débat a imprimé en moi d’une manière indélébile le sens de la communion intellectuelle. Le vrai intellectuel ne garde pas pour lui les connaissances acquises dans  les livres ou sur l’internet, au contraire il est celui qui cherche par tous les moyens à partager le peu qu’il a comme connaissance. Grâce au débat j’ai découvert une autre méthode d’étudier. Au lieu de rester à répéter les choses pour les oublier dans 3 ou 4 mois le débat donne la possibilité premièrement de comprendre ensuite de maitriser et enfin de mémoriser.

Le débat est l’un des moyens qui peut aider chacun à grandir sans tenir compte du niveau de la personne. Celui qui est moyen peut devenir excellent. Le débat aide à franchir les frontières dans le monde intellectuel, il chasse la paresse intellectuel, la timidité, la peur de s’afficher,  il permet de découvrir les forces cachées en nous. Il ouvre toujours, pour celui qui se donne totalement, sur un horizon meilleur qui permettra sans crainte ni peur de dialoguer avec le monde par le biais du langage. Dans les clubs de débats on expérimente la méthode socratique, on développe les vertus cachées jusqu'à maitriser et exprimer la puissance cognitive stockée dans l’intellect.

     Je félicite le club qui continue, malgré les contraintes, à garder l’idéal fixé qui est de former des garçons et des filles conséquents et responsables pour un Haïti meilleur. « Neque turbulentus abire, duc in altum » les responsables du club.

Makenson JEAN-PIERRE
Ancien débatteur de Côte plage
2009-2010


Structurer ma pensée, coordonner plusieurs positions hétéroclites en une solution homogène. Dépasser ma phobie de prendre la parole en public… Plus qu’une expérience, le club de débat de Côte-Plage a été une leçon de vie. Là-bas j’ai appris à transmettre mais aussi à recevoir. Refaire le monde un sujet de débat à la fois, discutant de notions que je croyais, à première vue, hors de portée.

Timide au début, j’ai appris petit à petit à m’exprimer en public. J’ai compris au final que mon opinion valait bien celle d’un autre. Outre l’aspect éducatif, je me souviens également de nos sorties. De ces nombreuses rencontres avec les débatteurs des autres clubs. On a tissé des liens qui ont résisté à l’épreuve du temps. Sans oublier les camps où on s’affrontait dans les compétitions dont la férocité n’avait d’égale que la camaraderie qu’on partageait entre nous. Sans oublier la joie de représenter mon pays. (Turquie, 2011).

6 ans plus tard, le débat a toujours un impact durable dans ma vie. Aujourd’hui, je ne suis plus  un débatteur, mais à chaque fois que je dois faire un discours, un toast lors d’un dîner, une conférence, un exposé ou tout simplement une discussion entre amis…ma base de débatteur refait surface. Les préceptes que j’avais appris me permettent d’aborder ces exercices de manière sereine.

Comme disait l’un de mes coachs : « Le débat c’est comme marcher. Difficile au début mais après c’est d’un naturel tellement déconcertant qu’on se demande comment on a fait pour vivre sans. »

Giorgio Ken Renet PREVILON
Ancien débatteur de Côte-Plage
2009-2012


J’aimerais d’abord comment J’aimerais d’abord commencer par la raison qui m’a poussé à intégrer le club de débat de Côte-Plage. En fait j’ai suivi, en 2010, la  finale d’un concours de débat interclasse au Collège de Côte-Plage et j’ai tout de suite remarqué certaines failles dans les arguments et dans les réfutations des deux équipes. Je me suis dit alors que je devais intégrer le club de débat afin de mettre en valeur mes reflexes sur les arguments et mes réflexions. C’est ainsi que j’ai intégré le club de débat. Je pense que c’était une belle aventure qui avait commencé. Il y avait une certaine hospitalité et une convivialité entre les membres du club que je me suis tout de suite senti intégré dans une famille. Le débat m’a beaucoup aidé dans la mesure où, d’une part, elle m’a permis d’aiguiser ma force de persuasion, de maitriser mon stress, d’avoir une meilleure ouverture d’esprit, de développer mon sens critique, de vivre en équipe, d’écouter et de comprendre l’autre, d’avoir le gout de l’information, d’être plus tolérant, … D’autre part, elle m’a permis de découvrira certains lieux historiques et certains aspect de la culture d’Haïti et d’autres pays (Irlande, Aout 2013).

En ce qui a trait à ma formation universitaire, le débat m’a non seulement permit d’intégrer la faculté des sciences humaines de l’UEH, mais aussi d’avoir une avance sur beaucoup d’autres étudiants en ce qui concerne la façon de voir le monde et le sens critique.
En somme, le débat m’a non seulement aidé à comprendre la vie, mais aussi à la vivre en guidant chacune de mes actions et chacune de mes décisions

Nixon DESTINÉ
Débatteur 2010-2014

Juge dans le programme de débat

mercredi 17 août 2016

Trois idées drôles sur le travail du troisième orateur d'une équipe de débat

Wedly Mozart Mozeau
On compte sur les doigts les bons troisièmes que le programme de débat a connus. Il est rare d'entendre un juge féliciter un 3e affirmatif ou négatif pour son travail et les jeunes s'en plaignent assez souvent. Tout porte à croire que le travail de synthèse apparemment simple est le plus difficile du format Karl Popper et que les coachs eux-mêmes ne s'entendent pas sur la méthode idéale puisque d'un juge à l'autre les commentaires diffèrent. 

En effet, les juges ont souvent des remarques contradictoires sur le même travail et les débatteurs et débatteuses se perdent trop souvent en confusion face à cette situation. Il y a donc un réel souci de standardisation à ce niveau - comme à d'autres niveaux d'ailleurs - et cet article se donne pour objectif de poser les premières pierres. 

Voici donc trois idées inédites dans le programme, et surtout drôles puisqu'elles peuvent étonner et même brouiller, mais une lecture attentive permettra de comprendre leur bien-fondé.

 1- Un(e) troisième parle avec des boites 

Je n'ai pas arrêté de le répéter dans les derniers tournois officiels, mais je crois que les jeunes n'ont pas encore saisi le sens de cette assertion. Pour moi, parler avec des boites, c'est pouvoir rassembler les idées éparpillées de l'équipe adverse et les mettre dans des paniers où elles se confortent. Une équipe, dans un match donné, a toujours une approche du sujet en question et quelque soit les détours qu'elle prend au cours du match, cela la ramènera toujours à son approche de base. 

C'est la raison pour laquelle je suis d'avis que les jeunes doivent, dans le cadre de leur formation en techniques de débat, apprendre les grands courants de pensée et les grandes visions du monde. Il leur faut apprendre, en d'autres termes, l’histoire des idées politiques, économiques et sociales puisqu'ils (elles) font des débats qui reviennent à la base à ces mêmes idées. Le libéralisme, l'humanisme, l'idéalisme, le socialisme, l'impérialisme, le protectionnisme, la mondialisation, la démocratie populaire, la démocratie libérale, les valeurs républicaines, l'Etatisme, les rapports Nord-Sud, etc. sont autant de termes et de concepts (je les ai notés pêle-mêle comme ils viennent dans ma tête)  qui devraient être familiers aux débatteurs des 2 sexes.

Bien sûr, il ne s'agit pas d'essayer de leur inculquer à tout prix des notions trop compliquées pour leur niveau, mais de leur donner une formation de base à partir d'ateliers de lecture et d'exposés qu'ils (elles) peuvent eux-mêmes présenter. A ce moment n'importe quel troisième devrait pouvoir identifier l'approche d'une équipe et montrer ses limites dans le contexte du débat, tout en proposant la sienne comme meilleure en attirant l'attention sur ses avantages. En ce qui a trait aux limites des approches, il s'agit bien sûr de les étiqueter à partir des connaissances de base qu'on a et des utilisations qui en ont été faites dans le débat. Ainsi deviennent t-elles simplistes, réductionnistes, alarmistes, trop idéalistes, etc. dans le cas de l'équipe adverse et réalistes, globales, concrètes, etc. dans le cas de son équipe.

Et c'est ce que j'appelle parler avec des boites !!! Ça peut paraître compliqué, mais en réalité c'est très simple. Et je vous assure que ça fait de l'effet sur les juges (Anizabelle, une débatteuse de Jacmel, membre de l’équipe championne du tournoi mixte, peut en témoigner) car ce que vous faites au fond, c'est clarifier le débat pour ces juges! 

2 - Un(e) troisième ne cherche pas à se faire comprendre 

Cette idée - un peu plus drôle que la première - je l'ai lancée pour la première fois dans le cadre du dernier tournoi mixte alors que je coachais la Team B : "Annie, en tant que troisième tu n'as pas à te faire comprendre". Elle a souri et j'ai su qu'elle avait compris. En effet, cette idée traduit l'esprit du travail de troisième qui n'est autre qu'un travail de synthèse. Le plus grand danger pour un(e) troisième - et ça arrive souvent - c'est de tomber dans la réfutation. Face à ce problème, on doit se mettre en tête qu'on travaille en tant que troisième sur des idées qui ont déjà été développées dans le match. On n'a donc pas à les ré-expliquer et encore moins y ajouter de nouveaux éléments. Le travail du troisième à ce niveau se résume à rappeler les points essentiels et ce faisant les porter dans le camp de son équipe.

Je sais que c'est facile à dire et que c'est beaucoup plus difficile sur le terrain, mais j'ai pensé à une technique que je vous propose d'expérimenter : Et si vous parliez avec une phrase par point? L'idée c'est de noter dans votre feuille les points essentiels que vous aller toucher et de n'en faire qu'une phrase pour chacun de ces points, pas d'explication, pas de raisonnements donc pas de réfutation. Un(e) troisième ne cherche pas à se faire comprendre, un(e) troisième est là pour aider aux juges à mieux comprendre l'approche de son équipe !!! 

3- Montrer les enjeux, c'est être hors-du-sujet 

Bon, c'est l'idée la plus drôle des trois, mais on va quand même s'en sortir... 

La question des enjeux a pris beaucoup de place depuis quelques temps dans le programme. On gagne même des matchs pour avoir simplement parlé d'enjeu(x) sans toutefois maitriser ce que c'est au fond. C'est en effet toute un casse-tête pour les débatteurs-euses de montrer le fameux " enjeu du match" et de fait, peu d'entre eux y arrivent. C'est que cette notion n'est inscrite dans aucun document du programme et aucune formation formelle standard n'a été faite à date sur la question. 
En ce qui me concerne, les idées basiques sur la question des enjeux sont les suivantes: 

a) Il n'y a pas d'enjeu du match, mais les enjeux du débat qui devraient être définis dès le début du match par 1A et 1N.

b) Le/la troisième n'a pas à montrer l'enjeu du match, mais à faire ressortir le(s) enjeu(x) qui ont été les plus importants à partir des points-clashs relevés.

 c) L'enjeu se définit comme ce qu'il y a à perdre ou à gagner dans un pari. Dans le cadre d'un débat, on parle d'implications donc d'avantages concrets et de risques. 

Mais par dessus tout, il faut être hors du sujet et j'explique : dans l'une de nos rencontres on faisait un exercice au club de débat de la BMC et il s'agissait de prendre position pour ou contre le fait que Tony Mix ait été nommé ambassadeur de la culture. Ce fut un débat très controversé et les arguments étaient solides des deux côtés. À la fin de l'exercice on m'a demandé de faire une sorte de synthèse à partir des discussions qui ont été faites. J'ai commencé mon discours de la manière suivante : " La semaine dernière, je regardais la cérémonie des Grammy awards à la télé et Joe Biden (vice-président des Etats-Unis d'Amérique) était venu passer un message sur la violence faite aux femmes, phénomène qui était très en vogue dans son pays au moment de la cérémonie.

Après son speech de moins de deux minutes, il a lui même présenté Lady Gaga qui devait chanter une chanson sur le même thème...". Si vous m'avez bien suivi, je fus à priori hors sujet au début de mon discours, mais j'ai dû prendre cet exemple pour faire ressortir le rapport que l'Etat développe avec la culture populaire et comment il peut au besoin utiliser cette dernière à des fins concrètes. Et c'est justement là l'un des principaux enjeux du débat sur Tony Mix. Etre hors du sujet, c'est donc déplacer le débat le temps de le ramener à des principes beaucoup plus globaux et de rebondir sur le sujet qui nous concerne. Il faut donc souvent  aller chercher ailleurs pour mieux comprendre les implications réelles des débats que l'on fait. 

En guise de conclusion 

En lieu et place de conclusion, je voudrais reprendre le canevas que je propose à chaque match pour le travail des troisièmes : 

 - Approche de mon équipe et ses avantages/Approche de l'équipe adverse et ses limites 

- Force de mon équipe tout au long du match/Faiblesse de l'équipe adverse tout au long du match 

- Rappel de mes arguments et des raisonnements; ce que l'équipe n'a pas pu comprendre au final/ rappel des arguments et raisonnements de l'équipe adverse; ce que l'équipe n'a pas pu montrer au final

- Points clashs du match, pourquoi c'est mon équipe qui a gagné sur ces points; les enjeux qui découlent de ces points 

- Ouverture pour l'équipe affirmative/Alternative pour l'équipe négative

- Citation finale si possible

Voilà! Ça a été assez long, mais j'espère que ce ne fut pas trop lassant et que cela contribuera à monter le niveau des prochains matchs !!! 

Wedly Mozart Mozeau

Juge, coach et animateur du club de débat de la BMC

20 ans de lutte… En avant !

L’homme est un être grégaire…

Louis-Jean Francklin
Je l’ai appris d’un professeur assez intelligent, mais pas assez célèbre pour que je retienne son nom.
Qu’à cela ne tienne, puisque la phrase est restée gravée dans ma mémoire. C’est ma phrase à moi, elle est peut être courante mais le temps ne l’a pas érodée quinze ans après…

L’homme est un être grégaire…

Le professeur voulait dire que cet animal porte en son gêne le désir de se regrouper, de vivre en groupe, en société.

Aujourd’hui je me permets d’aller plus loin pour dire ceci : La seule façon pour un homme de réaliser le meilleur de lui-même, c’est de se joindre à un groupe. Il existe dans le regroupement, l’association des individus un secret que notre cerveau tarde encore à percer. Tout au moins, nous savons qu’il existe.

Comment on peut arriver à cette réflexion ?

Si vous êtes né en Haïti, et que vous avez vécu votre jeunesse dans ce pays pendant ces 20 dernières années, vous avez certainement traversé l’une des tranches d’histoire les plus difficiles de cette nation.

Mais entre temps il y a une question à se poser. Pendant que tous crient que ce pays est invivable, que les lignes devant les ambassades s’allongent de plus en plus à la recherche d’un visa pour se « jeter », que ceux qui n’ont même pas les moyens pour le visa traversent clandestinement la frontière ou se risquent dans la mer dans des embarcations de fortune, existe-t-il encore quelques cerveaux audacieux qui osent penser au delà de cette misère ?

La réponse est heureusement OUI !

Ils sont peut être deux ou trois, mais ils sont là. Ils sont peu, mais ils résistent en pleine conscience. Ce qui fait la force de ces esprits ne réside pas en ce qu’un individu peut réaliser seul dans un coin. C’est leur capacité à se joindre et se dire, faisons quelques chose d’autre pendant que les autres s’inquiètent.

Quelque chose d’autre ? C’est quoi exactement ? Apprendre une autre manière de se voir en voyant l’autre. Se rencontrer. Se rencontrer pour réfléchir ensemble. Du moment où ce phénomène se produit, notre vision du monde change. Notre réalité est vue autrement, et de nouvelles voies s’ouvrent devant nous.  

L’homme n’est pas seulement un être grégaire, c’est aussi un être de combat. Il est capable de déclarer la guerre contre la médiocrité sur la terre du génie Toussaint Louverture et de l’Empereur Jean Jacques Dessalines. De quelles armes disposons-nous pour cette guerre ?

Il y a, d’une part, les armes de destruction massive et d’autre part, les armes de construction massive comme Michaëlle Jean, la présidente de l’Organisation Internationale de la Francophonie, le voit. Elle voulait parler d’éducation... Y a t-il un lien entre éducation et désarmement ?

En 2004, à l’arrivée des casques bleus en Haïti, nous avions entendu parler de désarmement. Aujourd’hui encore, on cherche à contrôler la circulation des armes. Récemment une décision gouvernementale interdisait pendant un certain temps le port d’arme à feu dans le pays.

Pourtant, il y a une minorité qui croit que la meilleure façon de désarmer c’est d’armer. Oui, il faut armer pour pouvoir désarmer, car l’arme du savoir et de l’éducation sont les seules qui puissent vraiment offrir une alternative au bandit et faire fleurir la vie là où la mort régnait en maitre et seigneur !

Mais avant de faire de l’homme un être de combat, il faut lui faire comprendre qu’il est un être  grégaire. Peut-on construire une armée avec une bande d’inconnus ? Non. Il y a tout un ensemble de mécanismes à mettre en place pour arriver à des frères d’armes invincibles !

Mais comment créer cette ambiance ?

Il existe en Haïti un programme qui le fait depuis 20 ans, c’est le Programme Initiative Jeunes de la Fondation Connaissance et Liberté (FOKAL). Depuis 11 ans que je participe à ce programme, j’ai fait cette conclusion : Il crée les conditions pour que le jeune haïtien réalise le meilleur de lui-même ! Pas seulement en lui offrant la possibilité de se joindre à un groupe mais aussi et surtout la possibilité de s’exprimer dans un cadre où l’on se sent valorisé non par sa condition socio-économique mais par la pertinence de ses idées.

Depuis 2 décennies, des cerveaux haïtiens travaillent de manière à ouvrir les yeux des jeunes sur l’immensité de la richesse à laquelle nous pouvons accéder. Peu importe ce que l’on entend. Des histoires comme le pays le plus pauvre de l’hémisphère, de mendiant international et de compatriotes qui ont développé une expertise dans la médiocrité. Oui il y a ça, mais il y a aussi ce pays dans le pays. Celui du petit groupe, celui de la minorité. La minorité qui ose penser autrement. La minorité qui croit dans un avenir meilleur. Et qui travaille vers la concrétisation de ce rêve.

Une infime partie de cette minorité (80 jeunes venant de 14 clubs du pays) se retrouvent à la fondation Vincent dans la ville du Cap du 13 au 18 juillet pour leur traditionnel camp d’été.

Ce n’est pas pour rien qu’ils se retrouvent au Nord. C’est pour dire que nous n’avons pas perdu le Nord ! Que la boussole est parfaite. C’est au navigateur de savoir la suivre contre vents et marées.

C’est aussi pour se retrancher à Vertières  et dans la Citadelle à coté des Héros. En avant ! Le combat doit se poursuivre ! Avec les nouvelles armes et munitions proposée par FOKAL depuis 20 ans. Celles de la connaissance et de la pensée libératrice!   


Francklin Louis-Jean
Animateur au Programme Initiative Jeunes
Skype : francklin17

Tel : (509)3849-0523 

Une année à la tête du PIJ

  cher.es ami.es, Depuis janvier 2022, je suis appelé par la direction de la FOKAL à assumer la charge de la coordination du Programme Initi...