lundi 25 mars 2013

Des étudiants de l’Université Quisqueya sont formés au débat


Le débat, un savoir-faire recherché par les étudiants de l’UniQ

Le coordonnateur des Programmes Initiatives Jeunes (PIJ) de FOKAL a réalisé, dimanche 24 mars, de 9h am à 4h pm, une formation sur les techniques de débat pour une trentaine d’étudiants du club de débat de l’université Quisqueya, à Port-au-Prince. En suivant cette formation au débat, ces étudiants qui étudient soit les sciences politiques et juridiques soit les sciences économiques et administratives soit les sciences de la santé, ont dit être motivées principalement par le désir de vouloir partager leurs idées, d’enrichir leurs connaissances, de savoir communiquer en public et de défendre leurs opinions.
Des membres du club de débat de l'UniQ
Cette journée de formation est une initiative du comité exécutif de ce club qui, avec l’appui avec la direction des affaires estudiantines de l’université Quisqueya, se donne l’ambition de populariser le débat dans leur établissement. Cette initiative visait donc à former les membres du club de débat de cette prestigieuse université privée aux techniques du débat. En ce sens, FOKAL leur a apporté son soutien technique et l’accompagnement nécessaire à l’accomplissement d’une telle ambition.

Le débat, ses exigences, ses contraintes

La formation a démarré par les réactions des participants sur les différents débats auxquels ils ont eu l’occasion de voir à la télévision ou d’entendre dans les stations de radio de la capitale. Selon eux, ce genre de débat est biaisé car ils s’apparentent plus à de la conversation ou à des exposés dirigés. Ils ont été très critiques et désappointés envers un débat réalisé dans leur université le 22 mars entre 2 équipes de leur club, qui ressemblait plus à une foire d’empoigne, où même le public s’est donné à cœur de joie en intervenant de manière intempestive.
Une formation très interactive

Par contre, les débats opposant Barack Obama au candidat Mitt Romney à la présidentielle américaine, à leur avis, n’ont été en rien comparables à ce qu’ils ont l’habitude d’assister en Haïti : une profusion de données et de chiffres à l’appui des arguments, des propositions claires et simples pour convaincre l’électorat, le sang-froid des candidats durant le débat, le respect de l’adversaire, une grande capacité des 2 débatteurs à s’écouter l’un l’autre, la prise de notes.

Après leur avoir défini le débat, « un affrontement d’idées entre 2 (groupes de) personnes qui s’opposent sur un sujet controversé », le responsable des PIJ de FOKAL, leur a expliqué les exigences d’un débat formel (préparer son plaidoyer, rechercher des documents, être rigoureux et méthodique dans son argumentation, être tolérant, être fair play) et ses contraintes (gérer les temps de parole, avoir un discours clair, prendre des notes, demeurer concentré, être honnête).

Le débat, un exercice permanent de l’étudiant

La formation s’est poursuivie avec l’analyse d’un énoncé de débat qu’ils ont proposé : « La peine de mort devrait être rétablie en Haïti ». Cet exercice a été l’occasion pour eux de comprendre l’importance de délimiter un sujet de débat en définissant les termes de la résolution. Il leur a été démontré que la définition de la peine de mort, qu’ils ont caractérisée comme une sanction légale contre un crime, ne saurait occulter l’idée de « mort d’homme », qui évite tout amalgame avec d’autres types infractions majeures apparentées (viol, trahison d’Etat, corruption, trafic humain…).

Des participants construisent ensemble un argument

Ensuite, les étudiants ont effectué en atelier l’exercice de construire un argument pour et contre la motion suivante : « Les étudiants devraient pouvoir noter leurs professeurs à l’université ». Quinze minutes après leurs réflexions en ateliers, chacun des 5 groupes créés à l’occasion a fourni un argument.  Si pour les 2 groupes qui ont supporté la résolution, cette disposition « permettrait d’améliorer la compétence des professeurs », et « …la qualité de l’enseignement à l’université », les 3 groupes contre ont considéré en revanche qu’« elle inciterait les étudiants à fuir leurs responsabilités », et que « déontologiquement, elle est inacceptable ».

Les participants étaient invités à réfuter l’argument de la partie opposée en suivant la démarche que le coordonnateur du PIJ a pris soin de leur expliquer. La réfutation qui est l’attaque frontale de l’argument adverse a été une épreuve difficile, car la réaction spontanée et le raisonnement rapide qu’elle exige nécessite  dans le débat la capacité d’identifier correctement les faiblesses d’un argument. Ce qui na pas été pas du tout évident pour eux. Un exemple de réfutation a été que la qualité de l’enseignement ne saurait se réduire à faire obtenir de meilleures notes aux étudiants ; de même, loin d’inciter les étudiants à fuir leurs responsabilités, noter ses professeurs aurait le résultat inverse.

Le meilleur moyen de comprendre, c’est de faire

La formation s’est achevée par un match de démonstration entre 2 équipes de volontaires dans le format Karl Popper, avec la motion suivante : « Les universités en Haïti devraient être entièrement publiques ». Même si ce match a révélé des faiblesses prévisibles chez les débatteurs (difficulté à épuiser son temps de parole, discours mal organisé, réfutations approximatives…), il a été un exemple instructif pour leurs camarades qui ont compris la nécessité de bien préparer son plaidoyer pour la position défendue, d’avoir des supports pertinents pour les arguments, de réfuter avec discipline, de maîtriser son discours, bref d’avoir une attitude professionnelle dans le débat, pour convaincre.

Séance de contre-interrogatoire lors du débat d'exhibition

Les tenants des universités dans le giron des pouvoirs publics ont affirmé que ce système (à l’instar de Cuba et de la France) permettrait un contrôle direct de la formation des étudiants et une plus grande accessibilité de tous à la formation universitaire, ce qui conduirait à terme à une réduction des inégalités. L’équipe opposée à un tel système a allégué que l’État haïtien n’a pas les moyens budgétaires pour le financer, même si on devait faire payer aux contribuables ce fardeau. Selon ces derniers, l’exemple de l’université publique du Roi Henri Christophe à Limonade est symptomatique de l’incapacité patente de l’Etat face à une telle responsabilité.

Conclusion

Ce match d’exhibition, pour lequel trente minutes de préparation ont été accordées aux 2 équipes, a permis aux étudiants non seulement d’expérimenter les techniques de débat, mais encore de dévoiler les talents de certains débatteurs, de vivre les sensations que procure cet exercice et de les désinhiber par rapport à la pratique du débat. Résultat garanti : la satisfaction des participants à ce débat bien organisé a incité les 2 responsables du club, Dora Lamarre et Christian Lemaine, à fixer rapidement un prochain débat le 26 avril prochain, après leurs examens d’intra.

Jean-Gérard Anis
Coordonnateur des Programmes Initiative Jeunes

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