La finale que j’ai raté
Charlancia Rémy |
Il était aux
environs de 11h am quand le verdict fut prononcé :“LE CLUB DE BMC, CHAMPION DES CHAMPIONS”. Une décision
irréversible. Car, les trois votes, furent en faveur de l’équipe de BMC qui défendait
la position affirmative, tandis que celle de Darbonne, la négative, autour de
l’énoncé du match des animateurs lors du tournoi national aux Gonaïves en
juillet 2014: « Les concours de
beauté devraient être interdits ».
Je n’arrivais
pas à le croire! J’étais comme hypnotisée. J’avais du mal à me faire à l’idée
que nous n’avions pas remporté ce titre ou pour dire mieux, gagné la coupe.
Finalement, j’avais osé dire à Max Gregory Saint-Fleur que nous ne remportions que des titres mais quand il y a une
coupe, jamais.
Ben mais,
au fond. Tout au fond de moi, je sentais que je n’avais rien perdu. Non !
On a rien
perdu du tout.
COMMENT TOUT CELA A COMMENCE pour moi
Je me
rappelle que j’étais à l’institution St Esprit de Darbonne quand j’ai ouïe dire
“VAGUE DU FUTUR”. On m’avait invité à maintes reprises, mais je n’y répondais pas.
Je ne sais toujours pas si c’était par
jalousie ou par timidité, mais j’aurais quand même aimé que ce soit Max Gregory Saint-Fleur qui m’invite.
Il avait un
club et il ne m’en avait pas parlé. Pour moi qui prenais part à toutes les
activités de la bibliothèque, c’en était trop! Je continuais à aller à la
bibliothèque en toute quiétude, mais pas le vendredi! Et vous savez pourquoi?
Parce que c’était ce jour là que le club se réunissait. Et même si le hasard ou
le Bon Dieu, par un caprice, aurait
permis que j’y sois un vendredi, je
faisais toujours en sorte de quitter avant 2h pm. Toujours parce qu’il allait
se réunir ce jour-là vers les 3h.
Mais un beau
jour, tout cela allait changer. Et vous savez comment?
Eh! Bien, la
bibliothèque, disons mieux le club, voulant y intégrer de nouveaux membres,
avait organisé une formation interscolaire, et avait envoyé ainsi des lettres
dans les différentes écoles avoisinantes, dont la mienne. Quand la lettre fut
parvenue à l’école, j’ai été choisie avec deux autres élèves pour la
représenter. Et en arrivant, au lieu de me sentir privilégiée, j’étais très gênée et je voulais retourner
chez moi sur le champ. Car Il n’y avait
que des élèves en classe de rhétorique et de philo, alors que moi j’étais à
peine au secondaire. Et en plus, la plus jeune de toute !
Rose Berline
qui faisait la même classe que moi, mais déjà majeure, alla dire à Max Grégory
St Fleur mes intentions. Et à lui de me tenir les propos suivants : (permets
moi de ne pas traduire afin de les laisser toute fraiche): « Ou pa gen pou santi w jennen. Mwen menm, mwen
se pi jèn animatè, pi jèn fòmatè e mwen gen pou m vin nasyonal. Se pou w fyè
paske w pi jèn. Epi w ka pi fò ». Ce discours m’avait vraiment motivé,
je l’avoue. Et j’y suis restée.
Une fois la
formation terminée et le tournoi
organisé, mon équipe était sortie vice-championne. Les 2 animateurs du
club avaient fini par me remarquer lors des matchs et surtout celui du débat d’exhibition,
grâce à mes questions surprenantes et de mes conclusions pertinentes.
COMMENT TOUT CELA A EVOLUÉ ?
Ben, après
le match, surtout la finale, j’avais laissé derrière moi ma fierté et mon orgueil
pour commencer par venir prendre part timidement et irrégulièrement aux
réunions. Tout au début, j’avais eu du
mal à comprendre ce qu’on faisait. Mais à force de savourer les livres qu’on
m’avait offerts, j’avais finis par m’adapter comme tous les autres. Trop même, car
j’étais devenu très régulière, mais pas ponctuelle pour autant!
Puis, chaque
fois qu’on faisait une formation, j’en profitais toujours pour faire un petit
recyclage.
Et enfin,
c’est tout cela qui m’avait aidé à mieux comprendre le débat. Car, même si je
ne me rappelle avoir gagné un tournoi local, cela ne m’avait jamais empêché
d’être en tête de liste pour participer à un tournoi à l’extérieur.
MES DEUX PREMIERS VRAIS MATCHS
Je me rappelle
que mes deux premiers vrais matchs étaient surement:
1- Celui que
je jouais quand on devrait faire un petit exercice ou le fameux match
d’exhibition, car on m’avait dit que j’avais épaté tout le monde, malgré mes
petits tremblements! Ben ça arrive toujours, surtout si c’est un premier pas! Ne
riez surtout pas, svp. Ce fut sur le sujet qui suit : « La télévision a un effet néfaste sur les
élèves haïtiens ».
2- la finale
du tournoi local (Déc. 2012-2013) où mon équipe avait finit par être vice-championne sur le
sujet suivant : « On devrait
dispenser l’éducation en Haiti seulement en créole ». Je fus la 3e meilleure,
Rose Berline Auguste, la deuxième et Rose-Mica, la meilleure. Mais malheureusement,
elle n’a pas pu mettre ses compétences au profit du club. A part cela, je ne comprenais pas vraiment ce que je faisais entre ces deux-là.
LE DEBAT POUR MOI
Comme je l’avais déjà dit lorsqu’on m’avait interviewé
pour mon article, « Le débat, c’est
toute une vie ! ». On l’apprend pour la vie. Au début, quand on
me disait ‘débattre’, je ne voyais rien d’autre que ‘bavarder’. Au cours des formations que
j’ai reçue, j’ai retenu la définition qui suit: c’est une confrontation d’idées, documentées et panifiées tournant
autour d’un sujet controversé entre deux personnes ou deux équipes.
En dépit de tout,
l’expérience me montre que le débat
n’est qu’un jeu.
LE DEBAT
N’EST QU’UN JEU?
Et Comme tout jeu, le débat a ses règles. Il suffit
seulement de savoir comment on le joue!
On a souvent
perdu un match parce qu’on croit que c’est gagner qui compte. Mais ce qu’on ne
sait pas, c’est que plus on est obsédé par la victoire, plus on perd tout
contrôle. La différence peut se faire à l’œil nu entre deux équipes qui jouent.
Si l’une en est passionnée, amoureuse et sait ce qu’est débattre, elle fera
tout pour montrer qu’elle a raison avec des preuves tangibles, pour réfuter les
arguments de l’équipe adverse, tout en défendant les siens, les reconstruisant,
en répondant correctement aux questions, etc.
Mais en revanche,
si l’autre en est obsédée par la victoire, c’en est une tout autre chose. Elle fera tout, et vraiment tout,
pour gagner même si elle doit en inventer des sources et déformer le terme ‘audace’ qu’on demande aux débatteurs.
Je me
rappelle qu’un jour notre équipe avait perdu un match face à l’équipe de Diquini lors du tournoi national aux Gonaïves. Sachernka qui y
assistait nous avait félicités ... et
nous a affirmé qu’elle était très contente de voir refléter notre amour du
débat. Cela l’avait vraiment plu, car ajouta-t-elle, « il y a des débatteurs qui viennent, qui ne
font que débattre et ne savent même pas
ce qu’ils font ».
QUE REPRÉSENTE POUR MOI LE PRIX QUE J’AVAIS REMPORTÉ ?
Si aujourd’hui je parvenais à être l’une des meilleures
débatteuses de l’année 2014, c’est pour moi le prix de mes durs labeurs, en travaillant
avec soin et patience. C’est aussi le fruit de tous les sacrifices que j’ai
consentis pour y arriver. Et c’est devenu possible jusqu’à se concrétiser grâce
à la confiance qu’on m’avait faite, et aux espérances qu’on avait en moi. Grace
aux encouragements venant de la part des animateurs, des coéquipiers, des coaches,
formateurs, parents et amis. Pour tout cela, je peux m’y permettre d’être
fière. Car sans vouloir me surestimer, j’ose le dire, je les méritais ces prix.
MON PARCOURS
S’il y a une chose que j’aime
me dire, c’est que tout que vous faites dans la vie ne requiert que de la
pratique. De la pratique, de la pratique, encore de la pratique et vous
deviendrez un génie. Il en est de même pour le débat. A moi, cela m’a permis de
faire beaucoup plus d’efforts. Surtout après chaque expérience vécue. Car Chaque
tournoi, chaque match même moins important que cela me paraissait à l’époque,
était une opportunité pour m’améliorer, une opportunité pour aller vers l’avant
afin d’atteindre le sommet. En fait, C’était tout un travail, aussi bien
d’équipe que personnel.
MON TOUT
PREMIER TOURNOI A FOKAL
Il faut dire qu’après mon intégration au sein du club, Sloane,
Sandrine et moi étions sélectionnées pour représenter le club dans le tournoi régional
qui se faisait à FOKAL en 2013. Cela n’avait pas mal tourné, bien sûr. Car ce n’était
qu’un début pour nous trois. Sous peu, on serait qualifié pour les demi-finales. Mais malheureusement pour nous,
l’équipe de Christ-roi avait eu quelques points de plus.
Eh ! bien, Ce tournoi se déroulait autour de l’un
énoncé suivant : « L’utilisation
de l’internet devrait être interdite aux personnes soupçonnées d’activités
criminelles ». Et Merci à toi Jefté dit Jerry, parce que tu étais
notre coach!
Il y avait
trois rounds. Notre premier, avec l’équipe de Diquini (Carrefour) qui s’appelait
à l’époque, Mon Repos. Un seul juge officiait, Jean Marie Pierre, et il avait
voté en notre faveur. Et vous savez pourquoi nous avons gagné ce match? Nous
l’avons gagné parce que le premier orateur de l’équipe adverse qui jouait
l’affirmative, une fille, n’avait pu
gérer son stress et s’était perdu dans son discours. Le deuxième orateur, n’avait
pas fait le travail qu’il fallait, c’est-à-dire réfuter et reconstruire. Et
enfin, la troisième n’était pas assez cohérente et n’avait pas su gérer son
temps.
Le deuxième
round fut avec l’équipe de BMC, dans la sale polyvalente. Je me rappelle la
tête de ces trois braves garçons qui ont voulu nous intimider ayant mis chacun
une paire de lunettes. Pure fantaisie,
voyons ! (sourires)!!!!
Ils étaient
si sûrs d’eux que leur premier orateur qui devait réfuter et présenter le cas
négatif n’avait fait que réfuter ! Et franchement, c’est la plus belle réfutation
que j’ai jamais vue de ma vie. Malheureusement pour eux et heureusement pour nous,
il avait oublié de présenter son cas. Ce qui nous était plus que favorable! On
n’avait pas donné les résultats de ce match. Mais il n’y avait aucun doute que
c’est nous qui avions gagné la faveur des 3 juges : Jennifer, Jean-Marie
et Francklin.
Le troisième
round, a été avec un sujet-surprise, qui affirmait ceci : « Les parents doivent avoir le contrôle de l’utilisation
d’internet par les enfants ». Et c’est là que l’équipe de CRX nous
avait battus.
Le fait que
toutes les équipes ont gagné deux matches et que Jean-Marie, juge compétent, j’en
doute pas, a arbitré tous nos matches, nous avait mis dans une mauvaise
position.
Je
me rappelle aussi que nous étions si boudeuses et irritées que nous sommes parties sans même attendre Max,
notre animateur, qui avait été retenu pour juger l’un des matches des
demi-finales. Ce qui était un manque de fair-play chez nous et une mauvaise compréhension
du débat. Même s’il n’en existe pas de bonne !
Je
ne pourrais ne pas me rappeler que j’ai pleuré amèrement, ce qui m’a valu le
nom de’Ti kriye’. Sloane a pleuré un
petit peu aussi ; mais Sandrine, elle, avait été en colère. Mais en dépit
de tout, cela ne nous avait pas empêché de faire beaucoup d’efforts et
d’avancer la tête haute.
Quelques
heures plus tard, le club de Cote-Plage avait été sacré Champion.
LE TOURNOI National DE JACMEL
Jacmel, ma ville natale. Le dire me renvoie à Eco-Resort
des Orangers, l’hotel où a lieu le tournoi qu’on devrait surnommer binational, à
cause de la participation de l’équipe venant de la République dominicaine. On
était bien restauré et le séjour y était
aussi très bien. Mais dans tout tournoi,
malgré les nombreux divertissements existants, ce qui primait, c’était le
débat. Alors, parlons débat !
La
résolution stipulait que « Les états
caribéens devraient libéraliser la circulation des personnes et des
marchandises entre leurs pays ». 16 équipes se disputaient le titre. Comme
toutes les équipes, nous avions à jouer trois matchs, mais nous avons seulement
gagné le premier. C’était un véritable fiasco! La question que je me posais après cela a
été : Qu’est-ce qui en était la cause?
A bien y réfléchir,
je dirais qu’il y a eu un manque de préparation. Je n’ai pas l’intention de
justifier notre équipe. Non. Et ce n’est pas parce qu’on n’avait pas préparé
notre match non plus. Au contraire, nous avions pris tout un mois pour cela.
Mais deux jours avant le départ, nous avions montré notre travail à notre
animateur. Catastrophique !
C’était du pur plagiat. Et de plus, pas maitrisé. Donc, on
n’avait d’autre choix que de tout recommencer à zéro. Et, arrivé au tournoi, nous
étions très stressés en voyant toutes
les équipes très motivée, en train de se préparer, alors que nous, nous ne
l’étions qu’à moitié. Vous pouvez vous imaginer cela? Pour moi, personnellement, j’avais peur.
C’était comme si le lendemain, lors des matchs, elles allaient toutes nous
sauter dessus. Et je manquais de confiance. En nous, en notre équipe…je croyais
que nous étions incapables de les affronter. Et cela s’est confirmé encore plus,
lorsque le lendemain, en plein tournoi, nous sûmes que le sujet qu’on nous
avait communiqué n’était pas complet.
Qu’y a-t-il de plus démoralisant pour une équipe à peine émergente.
Enfin, même si cela s’est passé comme je l’avais prévu, cela m’avait permis à
devenir plus mûre, plus mature, de savoir à quoi m’en tenir dorénavant parce
que le tournoi antérieur qui se faisait à FOKAL n’avait été qu’un petit avant-goût…
J’avais pu
voir à la volée les deux demi-finales. Celle de la Rep. Dom contre Cote-Plage
et celle de Santo contre Fond Parisien.
Mais la
finale de Santo contre la Rep. Dom a été conclu par la victoire de l’équipe
dominicaine… Max Grégory SAINT-FLEUR, notre animateur revient avec le titre de
meilleur juge de l’année. Pendant que nous, nous finissions très déçus.
LE TOURNOI LOCAL
Après le
tournoi national ou binational, le club se réunissait comme d’habitude. Et en
attendant le tournoi qui devrait suivre, nous devrions nous y préparer. Ce
qu’on doit faire savoir, c’est que pour
participer dans les autres tournois avec le club de Darbonne, il y a des critères
à remplir. On s’en moque que vous soyez ancien ou pas. Personne n’échappe à la règle.
Tout le monde doit suivre les principes. Parmi ces critères nous pouvons citer:
1-suivre la formation antérieure.
2-participer au tournoi qui suit.
3-être sélectionné parmi les 6 meilleurs.
4-se montrer intéressé
Ce tournoi
se déroulait autour de l’énoncé suivant : « Les examens d’Etat ont un effet néfaste sur l’école en Haïti ».
Une équipe nouvelle avec des joueurs compétents a été formée. À nous les
anciens, la peur qu’on nous trouvait rouillés et vieux se faisait sentir. Mais,
être expérimenté compte aussi bien. Cela m’avait vraiment plu. Même si je me rappelais
avoir remis à Sloane l’affront qu’elle m’avait fait à un de tournoi antérieur.
LE Tournoi
régional des cayes
A dire vrai, je surnommerais, moi, ce tournoi le début de la gloire. La vie est une
question de choix. Qu’on le veuille ou non, on en fera tout le temps. Parmi les
six meilleurs débatteurs qui ont été retenus lors du tournoi local, trois
seulement d’entre nous ont été retenus dont Sloane, Kindro et moi qui allions
former l’équipe qui s’avérait une et indivisible.
Etant donné
que Sloane et moi étions très expérimentées, et Kindro très intelligent, nous étions
l’équipe en qui suscitait l’espoir pour le club. L’espoir des Darbonnais et Darbonnaises.
L’espoir d’arriver au sommet, là où tout le monde rêve d’y être un jour et de
compter parmi les grands.
Quelques
temps plus tard, à Laborde, c’était le résultat des travaux assidus que nous
avions consenti à faire. Des sacrifices faits quand il fallait venir se préparer…
C’était aussi un moment très spécial pour l’une de mes meilleures amies, Gayle
Sloane ST-LOUIS, meilleure débatteuse de ce tournoi régional. Je me souviens
toujours de ce moment, comme si cela datait d’hier. Quand monsieur Anis allait
citer le nom du meilleur débatteur du tournoi, elle répétait sans cesse mon nom
alors que ça allait être elle. Elle, la meilleure débatteuse. J’étais fière
d’elle. Et je rayonnais avec elle… Lorsque nous
étions partis de très tôt avec notre coach Maxandre BIEN-AIME, déjà dans le minibus,
la seule équipe dont nous avions peur d’affronter était celle de Cote-plage.
Car ce club avait gagné plus de titres que n’importe quel autre. Mais arrivés à
destination, on nous avait fait savoir que le premier club que nous devions
affronter sera lui. Nous étions effondrés ! Pour nous, c’était comme nous
emmener à la boucherie.
Mais c’était
aussi un défi à relever. Il fallait le jouer à tout prix. Et je présume que
c’est ce match-là qui allait nous motiver, puisque nous avions gagné contre
l’équipe que nous redoutions le plus. Car après ce match là, je sentais que c’était
une équipe qui était prête à jouer le jeu avec toutes ses audaces. Quant à moi,
je me sentais vivre le débat, je me sentais comme une bonne et vraie débatteuse,
prête à donner la meilleure d’elle-même, à jouer la dernière carte ou le
dernier tour qu’elle avait dans son sac pour contribuer au bonheur de son équipe.
La finale, encore
avec Cote plage, avec le même sujet : « Les pays en voie de développement victimes de catastrophe naturelle
doivent bénéficier d’un allégement de leur dette », sans pour autant
garder la même position. A noter que l’uniforme nous allait à merveille. Même l’animateur, en portait. Sans le
vouloir ! Et un grand merci a tous les amis qui nous ont aidés.
Le débat nous rend curieux, non !
Apres avoir célébré
notre victoire dans le silence, le cadeau qui nous y attendait, c’était que
nous allions regarder le tournoi régional de l’Ouest. Ce n’était pas nécessaire
mais c’était tout un travail d’espionnage et de prévention que nous avions eu
l’audace de faire. Ainsi, en regardant les faiblesses et les forces des
arguments des autres équipes, leur style, leurs façons d'argumenter et de se défendre,
nous serions mieux préparés psychologiquement à affronter n’importe quelle
autre équipe. Même l’équipe de Diquini qui venait de gagner le titre face à l’équipe
de BMC.
Dès lors, la
finale des finales nous attendait. Mais d’abord, partons dans la cité du
drapeau !
LE Tournoi national des Gonaïves !
Débatteuse que je suis! Je vous avais bien prévenu, svp. Alors
continuons !
Nous voilà à
l’hôtel Amiral Killick, prêts à enrichir notre savoir historique et culturel,
mais aussi à débattre sur les sujets suivants : « Les pays de la caraïbe devraient adopter le protocole de Kyoto
pour lutter contre le changement climatique » et « Les pays développés ont davantage
l’obligation de lutter contre les changements climatiques que les pays en voie
de développement ».
Le premier
jour, il y a eu 4 rounds à passer. Une fois que vous aviez gagné deux d’entre
eux, vous voilà qualifié pour le second tour du tournoi. Pour nous, Ce tournoi a été un
véritable succès ! Car nous avions battu tous les matchs du premier tour.
Je me les rappelle bien. Le premier contre l’équipe de BMC, qui défendait la
position affirmative sur le sujet à préparer, le second contre Fond-parisien, négative,
le troisième contre Jacmel, affirmative sur le sujet-surprise, et enfin le quatrième
contre l’équipe de Jérémie, négative encore sur le sujet-surprise. Mais le
lendemain de très tôt, Diquini allait nous disqualifier. Ce fut notre premier
match de perdu.
Je ne peux pas dire comment cela s’était passé pour les
autres clubs. Mais par contre, plus tard, en tenue de soirée, nous étions
spectateurs du grand club champion national, BMC. Avec comme second le club de
Martissant. Et tout de suite après Diquini et Jérémie, venait nous, l’équipe
de Darbonne, titrée Meilleur club de l’année 2013.
La Finale des finalEs
Après le
tournoi national où on avait vu le sacre de BMC ainsi que de son meilleur débatteur
Fortuné, la communauté du débat attendait
impatiemment le match qui opposerait les deux champions régionaux :
Diquini, club champion du tournoi régional de l’Ouest et nous, Darbonne
champion de celui du Sud.
Ainsi, un
beau samedi, vers les dix heures, nous voilà au parc mémorial de Martissant, à
l’habitation de Catherine Dunham, en train de disputer le match reposant sur le
sujet : « Les produits locaux
sont à privilégier chaque fois que possible même si les recettes de l’Etat dépendent
des taxes sur les produits importés ». Nous qui défendions la position
négative, nous avons été sacrés gagnants.
Et ce à quoi
je m’attendais le moins depuis que ce titre existe dans le programme, c’est que
cela a été moi la meilleure débatteuse. Moi qui m’attendais à ce que ce soit
Sloane ou Stanley ! Mais quand même, j’avais le droit aussi de gouter à ce
plaisir.
C’est ainsi
que l’équipe de BMC nous attendait avec impatience !
LE Champion
des champions
Maintenant nous voilà revenus au point de départ, le sacre de l’équipe de
BMC. Je crois que c’est l’un des matchs qu’on n’oubliera jamais. Surtout si
c’est pour la première fois qu’une équipe ne vous ait jamais battus. Toutefois,
je suis fière, très fière de mes coéquipiers !
Les bienfaits du débat
Le débat avec ses multiples
facettes, loin de nous être défavorables, au contraire nous procure beaucoup de
bénéfices.
Pour tout dire, je ne savais
pas comment disserter. Le débat me l’a appris. En troisième, on n’a eu que le
temps de m’apprendre à faire une bonne introduction. Mais avec le débat, j’ai créé
mes propres astuces dont je vais vous en faire part le plus bref que possible.
Quand on me donne un sujet à disserter, la première chose qui me vient à
l’esprit, c’est le débat.
Pour introduire le sujet, il
suffit de suivre le schéma du discours du premier orateur. Il fait une mise en
contexte, c’est le sujet qui s’amène, dans trois phrases. Il annonce le sujet à
débattre, c’est le sujet posé. Enfin, il déclare ses arguments et le sujet est
posé ! Sauf que pour un sujet, au lieu d’annoncer ses arguments, on met en
évidence le plan du développement, c’est-à-dire ce que l’on va faire.
Développer le sujet n’est que la
formule DESC. On choisit le DES, c’est-à-dire autre que la déclaration, il y a
l’explication et le support.
Et la conclusion, qui n’est que le travail du troisième
orateur. On reprend le tout dans quelques phrases et on ouvre le débat sur
d’autres horizons. A part ça, ce
n’est que tout le blablabla qui s’entremêle et s’entrechoque.
Quoi qu’on
dise, que que soit les nombreuses opinions et conceptions négatives que l’on
vous force à avoir du débat, sachez qu’on débat toujours pour apprendre quelque
chose. Je me rappelle qu’après avoir joué le match du tournoi local sur le
sujet stipulant qu’on devrait dispenser l’éducation seulement dans la langue
nationale du pays, j’étais allée chez un ami.
Arrivée chez
lui, j’ai trouvé deux étudiants et un professeur de langues vivantes discutant vivement sur le problème du bilinguisme en Haïti.
Je les écoutais sans mot dire jusqu'à ce que vient un moment où ils se sont mis
tous d’accord à parler contre la langue de Voltaire. Alors sans m’en rendre
compte, j’avais déjà rétorqué. Et
j’étais comme Kirikou au milieu d’eux. Mais cela ne m’a pas intimidé.
Bien au contraire. Car, déjà j’étais bien documentée sur le sujet. Ainsi je
pourrais jouer n’importe quelle position.
Le
troisième interlocuteur, qui m’était parfaitement inconnu, se déclarait surpris
de voir une toute jeune fille défendre ses opinions avec autant de tact et
poser des questions aussi pertinentes.
Je ne
saurais jamais dire ce qu’a fait pour moi le débat. Vraiment ! Cela m’a permis de n’avoir pas peur de
m’affirmer, d’avoir la capacité de contrôler définitivement ma timidité, de
savoir me renseigner et me documenter sur un sujet en sachant quoi prendre et
comment le prendre, d’augmenter mon savoir culturel et historique et de créer
des liens en participant aux camps.(Est-ce pour cela que je plains tous ceux qui n’y ont pas la chance d’y
participer!). Le débat m’a aussi permis de faire beaucoup plus d’efforts en matière de
communication. A développer mon langage, ma façon de parler, mon art oratoire.
Ainsi, je peux m’exprimer n’importe où avec la méthode Karl Popper.
Mais cela à
ses défauts aussi, hein ! Car ainsi, j’ai du mal à supporter qu’on dise
n’importe quoi devant moi. Et une fois qu’on prend à contre pied mes paroles,
j’ai tendance à rétorquer et parfois à
hausser le ton. Ce qui me donne du fil à retordre à ma famille. Mais j’espère
bien qu’elle me comprend.
Des petites astuces…
Ce qui me
plait le plus avec le débat, c’est qu’on n’y perd rien. A vous, jeunes qui y
sont intéressés, cherchez à être intelligents, curieux et avides de
connaissance. Que rien de ce qui se passe ne vous échappe, que ce soit national ou international. Car
cela vous permettra d’avoir une assez vaste culture qui vous aidera beaucoup
lors des contre-interrogatoires.
A vous, premier orateur, premier à parler. La place
que j’aime bien jouer surtout pour le cas affirmatif ! Vous avez comme tâche
d’ouvrir le débat, on s’attend à ce que vous épatez tout le monde, que vous
mettiez l’assistance dans le bain de ce qui va suivre, que vous définissiez les
mots clés en votre faveur. Mais ne vous arrêtez pas à cela ! Vous devez définissiez le débat
ou le champ de bataille tout de suite après, quand il s’agit du cas affirmatif,
selon Jean Marie et d’apporter beaucoup
de preuves fiables et tangibles avec plein de données statistiques, selon Francklin.
L’équipe négative, elle, doit réfuter, réfuter et réfuter encore.
Pour la
négative, la réfutation s’avère être l’élément clé. C’est ce qui compte. Car si elle n’accepte pas le champ de bataille
pour réfuter, c’est comme le dit Jean Marie, il n’y a pas de débat…
Sachez répéter, répéter et répéter
votre discours jusqu'à en faire sien. Ainsi le juge aura l’impression que vous
avez bien maitrisé le discours.
Quand je
jouais le troisième orateur, la place dont on dit être tout à fait pour moi, je
prends toujours le soin de bien écouter afin de faire une synthèse assez précise.
Ajouter une note personnelle afin d’ouvrir le débat sur d’autres horizons (ce
qui m’était toujours favorable!).
Je n’ai pas
l’intention de dire que j’étais meilleure que tous. Mais non. Car j’en connais
plus d’un qui se fera un plaisir de vous expliquer leur truc. Pour le troisième
orateur, j’en connais une référence assez fiable et crédible, c’est Stanley.
J’ai toujours apprécié ses discours. Sa façon de vous toucher et de forcer les
juges à voter en faveur de son équipe, lorsqu’on devrait s’appuyer sur les
derniers discours. Cela m’a fallu faire beaucoup d’efforts en sachant qu’en
raison de rôle, j’allais avoir en face de moi un débatteur de renom. Je n’aurais
pas eu honte de l’avoir comme modèle, même
si on me dit que je joue assez bien ce rôle. Mais malheureusement pour Stanley,
j’avais déjà commencé à jouer avant lui.
Pour le
travail du deuxième, la façon de faire de Fortuné me plait beaucoup. Faut que
j’aille lui demander son truc à lui aussi!
Il a toujours quelque chose de drôle ou une quelconque surprise à
offrir. De Sloane? Je ne vais pas en
parler, voyons ! Car elle est moi, elle est nous, elle est notre équipe. Donc excellente !
Il y en a eu d’autres et il y en aura d’autres. Car beaucoup de
débatteurs sont tapis dans l’ombre sans vouloir se décider à se laisser voir.
Des tas de meilleurs débatteurs qui n’ont pas eu la chance de participer à un
tournoi. De ceux que j’ai vus et que je ne connais pas … la mission de FOKAL ne
fait donc que commencer !
A vous qui
savez déjà débattre, vous êtes les
ambassadeurs du débat, vous devez allez faire des disciples partout où vous
passez. Et les ramener au pâturage. Dans votre langage, votre façon de parler,
de raisonner, tout ça. Car vous avez déjà les compétences requises. Ne vous arrêtez surtout pas. Visez plus haut et encore plus
haut. Car comme me l’a dit un jour Sloane, « C’est terminé, mais ce n’est pas fini! »
Le débat, un travail ÉQUIPE !
Enfin le débat est tout un travail d’équipe. Plus vous
vous documentez, plus vous êtes prêts à affronter n’importe quelle équipe. Plus
vous travaillez, plus la confiance règne. Plus vous êtes sûrs de gagner, plus
vous serez à la hauteur. Sachez que vous êtes l’équipe et l’équipe, c’est vous.
Car c’est le travail de tout et chacun qui compte.
Ainsi c’est
une obligation que vous travaillez ensemble. Et ceci, quand l’un de vous est
devant le public à prendre la parole au
nom de l’équipe. Tout ce qu’il ira dire comptera. Il doit essayer de donner le meilleur de lui-même
pour amener son équipe à la victoire. Du moment qu’il est en train de parler,
le meilleur pion de l’équipe, c’est lui.
Que chacun
de vous sache utiliser toute sa capacité pour captiver le public. Créer votre
propre truc. Si vous n’en avez pas, essayez de vous en forger un. Car Comme Malcom X, l’une des étoiles noires,
le disait, chaque fois qu’un individu se proclame le seul, le seul à faire ceci
ou le premier à faire cela, c’est qu’il n’avait pas bien fait son travail. Il
ne faut jamais être seul au sommet. Quand tu es seul, tu es fragile. Ainsi
jamais de désaccords entre vous ! En équipe, il faut savoir maîtriser la
rivalité qui anime chacun d’entre vous, à dépasser la compétition pour
favoriser l’effort commun.
Charlencia
REMY
Ex-débatteuse du club de débat de Darbonne