BILAN DES DÉGATS DU TREMBLEMENT DE
TERRE SUR LES COLLABORATEURS DU P.I.J
Et de deux ! Que dis-je ? Et de quatre ! C’est le 4e
tremblement majeur qui a frappé le pays, après le Nord en 1882 et l’ouest en
1948 et 2010. Cette fois-ci c’est le grand Sud qui a subi les turbulences de la
terre et les impressionnants dégâts matériels et les déplorables pertes en vies
humaines. Plus de 2,000 morts déjà dénombrés et les milliers de blessés et des
dizaines de disparus dans les 3 départements touchés, Nippes, Sud et
Grand-Anse.
Malheureusement, FOKAL dispose de 3 clubs de débat de son réseau qui se
situent dans 3 villes de 2 ses départements sinistrés, Cayes, Camp-Perrin et
Jérémie. Nos six collaborateurs, nos dizaines de jeunes débatteurs et
débatteuses de ces villes, ont tous été durement impactés par ce violent séisme
survenu au matin du 14 Aout 2021.
Le coordonnateur du Programme Initiative Jeunes (PIJ) de FOKAL a
contacté le jour même les animateurs de ces clubs pour savoir s’ils étaient en
vie avec leurs familles, puis dans les jours suivants pour s’enquérir de leur
situation au quotidien et celle de nos débatteurs ainsi que leurs familles. Une
véritable tragédie. Voici un bilan condensé élagué de nombreux détails, sur la
foi des de ce que nos animateurs nous ont rapporté.
Yvens ÉLIZAIRE, animateur du club des Cayes,
Entrepreneur, marié, père d’un petit garçon
Physiquement, Yvens, sa mère, sa femme et son fils en bas âge ont été
épargnés. Sa maison est fissurée, un mur est tombé, mais la maison a
globalement tenu. Ils étaient à l’intérieur quand le séisme a commencé. Pendant
le passage du cyclone Grace, le lendemain, ils ont pris le risque d’aller
s’abriter dans la maison pour dormir, à cause de la pluie et par peur du risque
d’inondation.
Sa femme, originaire de Camp-Perrin déplore plusieurs victimes dans sa
famille là-bas. Les maisons de toute sa famille se sont effondrées. Vendredi,
il ira lui-même évaluer les dégâts.
Il est extrêmement difficile de se nourrir aux Cayes. Il n’y a
quasiment plus rien à acheter à manger. Sa famille et lu se nourrissent tous
les jours de soupe (des sachets noodles), puisées dans le stock
qu’il constituait pour son fils qui devait se rendre à l’école bientôt.
L’essentiel pour lui est de rester vivant, selon ses propres mots.
Ils arrivent à bien gérer l’eau car il la puise dans un puits artésien
à côté de chez lui, même si l’eau a été trouble au début. Mais elle est devenue
claire maintenant. Est-elle souillée ? potable ? je ne sais pas.
Elle perdu totalement sa petite entreprise dont le bâtiment dans lequel
elle logeait s’est effondrée.
Il donne son concours à la Protection civile des Cayes. Ils ont
récupéré 24 personnes en vie et 9 morts dans une même maison.
Les jeunes du club sont vivants, 10 ont perdu leurs maisons, d’autres
ont les leurs endommagées. 1 jeune a perdu sa mère sous les décombres de sa
maison détruite.
Le
lieu de réunion du club des Cayes, la bibliothèque de
l’IPDEC, s’est effondrée.
James NONÇANT, animateur du club
des Cayes
Avocat, journaliste, célibataire, locataire d’un appartement
Sa famille est vivante et physiquement bien. La maison où il habitait
est sérieusement endommagée. Il était à l’intérieur quand cela est arrivé. Il a
logé avec d’autres personnes sous une galerie, et depuis dans la cour d’une
maison d’en face à la belle étoile.
La maison en toit de tôle de ses parents et ses frères, elle aussi en
ville, tient debout mais est fissurée. On peut y rentrer pour prendre quelque
chose vite fait, mais pour le moment elle est inhabitable.
Il y a un besoin urgent d’abris, d’eau et de nourriture très difficile
à s’en procurer. Il confirme qu’un jeune du club a perdu sa mère.
Alex SYLNÉ, animateur du club de Camp-Perrin
Cultivateur, enseignant, marié, père de 4 enfants, propriétaire de sa
maison
Pas de victimes directes dans sa famille. Sa
maison en béton a tenu le coup. Il reste cependant prudent, à cause des
répliques sismiques de temps à autre. Ils dorment tous, sa femme, ses 4 enfants
et 12 autres personnes de sa famille dans un abri de fortune dans la cuisine à
l’extérieur de la maison de son frère.
Ses poissons dans ses 5 bassins d’aquaculture sont cependant en grand
danger car, à la suite du séisme, le système irrigation est à sec. Il récupère
l’eau du canal qui passe devant chez lui pour alimenter ses bassins. Mais il
aurait plutôt besoin d’une pompe pour faire remonter l'eau de la Ravine du Sud
juste en face de chez lui. La pluie a affecté le rendement de son jardin de
légumes. Il va y perdre son investissement et ses moyens de subsistance.
Le bilan est lourd à Camp-Perrin. La
communication est extrêmement est difficile. Ce qui aggravé les choses, c’est
la pluie qui est arrivée très peu de temps après. Ces 2 catastrophes naturelles
quasi simultanées (séisme + cyclones) les a prises de court, car ils ne s’y
étaient pas préparés et il n’avait pas de stock de nourriture en prévision.
Il y a beaucoup de victimes à Camp-Perrin. Les
dommages matériels sont colossaux dans cette petite commune. Beaucoup de jeunes
du club ont perdu complètement leurs maisons ou ont perdu un proche. Une
débatteuse de ce club a été opérée du bras qui a subi multiples fractures. Ils
ont aussi des problèmes pour se procurer de la nourriture et se fournir en
besoins essentiels.
Rolin SAINT-VIL, animateur adjoint du club
de Camp-Perrin
Enseignant, marié, père de 3 enfants, propriétaire
de sa maison
Aucune victime à déplorer dans sa famille vivant
avec lui, composée de 8 personnes : sa femme, ses 3 enfants, sa mère, 2
nièces et 1 neveu. Sa maison est détruite avec 97% de ses biens à l’intérieur.
Il dort avec les siens sous un abri de fortune créé avec des matériaux de
récupération, et à la belle étoile dans sa cour.
L’accès à la nourriture, à l’eau, à l’énergie
sont très difficiles pour eux. La communication téléphonique et par internet est
épisodique, car le signal est très mauvais. Les gens aux alentours sont aux
abois.
Le propriétaire du collège CUC (le lieu de
réunion du club de Camp-Perrin), dans lequel il enseigne et dont il est le
censeur, a perdu ses 2 filles et l’état de santé de l’épouse est très grave.
90% des jeunes du club qu’il a pu contacter
ont leur maison soit effondrée soit endommagée. Beaucoup d’entre eux ont perdu
un proche.
Waldinde GERMAIN, animateur du club de Jérémie
Enseignant, marié, père d’une petite fille, propriétaire de sa maison
Sa famille est sauve. Sa maison, dont la construction n’est pas
achevée, est gravement fissurée. Il n’aura pas de moyens pour la réparer,
encore moins de l’achever, dans un proche avenir. Il dort avec sa femme, sa
fillette, et ses proches qui vivent avec lui, dans un abri provisoire pas loin
de chez lui. Photos à l’appui.
Problème de courant électrique. Difficulté pour se procurer de la
nourriture et d’autres biens essentiels pour survivre, faute d’argent aussi.
Toutes les personnes dans sa maison dépendent de lui.
Il y a 2 débatteuses dans son club dont il n’a aucune nouvelle. Tous
les autres qu’il a contacté (près d’une quarantaine) sont sains et saufs, mais
plusieurs d’entre eux soit ont perdu leur maison soit elles sont endommagées.
John Feguerson BELRIS, animateur adjoint du
club de Jérémie
Etudiant, bibliothécaire, célibataire, locataire d’une maison
La maison où il vit, en dehors de la ville de Jérémie, est fissurée.
Seul un mur séparant la galerie de la rue est tombé. Il loge avec sa famille, composée
de 6 personnes, chez un proche.
Il dispose d’un bassin d’eau chez lui, et il n’est pas difficile de se
fournir en eau traitée. Ils s’organisent pour manger en restant économes et
solidaires.
Points communs à tous :
Les animateurs sont décapitalisés. Leurs maisons endommagées ou
effondrées, donc inhabitables. Ils vivent dans des abris improvisés, donc
précaires, dans une cour, à la belle étoile, ou sous la galerie d’une maison
debout.
Ils ont tous perdu au moins un membre dans leur famille (un oncle, une
tante, une nièce, un cousin…). Difficulté de se procurer de la nourriture, de
l’eau traitée et des biens essentiels pour survivre. Difficulté pour
communiquer au téléphone et par internet.
Aucun mort à déplorer parmi les jeunes de ces 3 clubs, mais des
blessés. Beaucoup souffrent de la mort d’un parent ou d’un proche. Ils sont,
comme tout le monde, à la rue.
Les lieux de réunion de de clubs ne sont plus disponibles, car sévèrement
affectés par le séisme.
Les besoins :
Les besoins de nos sinistrés sont considérables, car ils manquent de
tout, particulièrement d’un abri et de quoi se nourrir, et même se vêtir. Leur
situation est aggravée par le manque d’électricité et les défaillances des
systèmes de communication téléphonique et internet, et l’effondrement du
service public dans ces communautés.
Nos 6 animateurs Des Cayes, de Jérémie et de Camp-Perrin ont fait un
travail formidable en allant à la recherche de chaque jeune de leur club, leur
apportant un soutien moral. Il y avait fort à faire pour les contacter. Mais
ils y sont parvenus dans le chaos et la détresse qui s’installent dans ces
régions. FOKAL les remercie pour leur sens de responsabilité et de solidarité,
deux valeurs cardinales de l’institution.
FOKAL et le PIJ demeureront à leurs côtés durant cette épreuve terrible
de leurs vies, car les animateurs et ces jeunes ont besoin de notre soutien et
nous ferons en sorte de leur apporter notre aide au moment opportun. Nous y travaillons
activement.
Kenbe la, mezanmi !!!
Jean-Gérard ANIS
Coordonnateur du PIJ
24 août 2021