Une initiative
pour favoriser les débats des jeunes dans le club
Le coordonnateur des Programme Initiative Jeunes de FOKAL a
formé dix (10) nouveaux juges de débat, le samedi 20 avril à Jacmel. Ces nouveaux
juges sont constitués de 6 étudiants en économie, gestion et administration, de
2 anciennes
débatteuses expérimentées du programme de débat des années 2000, de 2
journalistes et d’un enseignant.
Cette formation itinérante (les clubs du Cap-Haïtien, des
Cayes, de Camp-Perrin, de Port-au-Prince en ont déjà bénéficié) a visé donc
surtout à créer un corps de jury local dont la l’existence et la disponibilité favoriseraient
l’organisation régulière de débats et de tournois locaux dans le club de Jacmel.
Les juges face
aux exigences et contraintes de l’arbitrage
Les dix participants ont appris les exigences pour un juge
d’arbitrer un débat, affrontement d’idées
entre 2 personnes ou 2 équipes défendant chacune une position opposée sur un
sujet controversé : se concentrer pour écouter les débatteurs, prendre de
notes sur un ordinogramme, remplir le bulletin de vote.
Ces exigences citées auparavant font pendant aux contraintes de
l’arbitrage : prendre une décision rapide en votant, résister à la tentation de
se mettre à la place du débatteur, contrôler la durée des interventions de
chaque débatteur et le temps de préparation de chaque équipe, être objectif
dans sa décision.
Quand les juges
endossent la place du débatteur…
Ils ont ensuite effectué en groupe l’exercice de construire
des arguments structurés pour et contre un énoncé, à partir d’un sujet
controversé qu’ils ont eux-mêmes proposé (« L’euthanasie devrait être autorisée en Haïti »), de les
réfuter et de les reconstruire, afin de pouvoir comprendre la démarche des
débatteurs et les attentes à avoir de leur discours.
La richesse des arguments qui rejettent l’énoncé a contrasté
avec le peu de diversité des arguments le soutenant. Un des trois arguments
(similaires somme toute) proposés par les participants pour justifier la
résolution a considéré que « l’euthanasie permettrait d’abréger les
souffrances extrêmes et irréversibles d’un malade ». Cette décision
selon eux s’apparenterait à une forme de libération pour le malade et sa
famille.
En
essayant ensemble d’expliquer l’expression « souffrances extrêmes »
dans l’argument, les juges ont compris la difficulté pour un débatteur de
réussir un tel exercice. Doit-on comprendre cette expression au sens de
souffrances physiques et/ou psychologiques ? Lorsqu’on vit un homme ou une
femme mette fin à ses jours à cause d’une rupture amoureuse, ne peut-on pas là
parler d’un état de souffrance extrême ayant précipité ce drame ?
Les arguments exprimés contre l’euthanasie ont parlé de
préférence de violation du droit à la vie
du patient, d’atteinte à la dignité
de la personne humaine, de risque
grave de dérives conduisant vers de nombreux crimes opportunistes.
Le format de
débat Karl Popper au menu de la formation
Dans un 2e temps, les participants ont été
initiés au format de débat Karl Popper : 2 équipes de 3 débatteurs chacune,
s’affrontant durant une heure avec des arguments structurés et opposés sur un
énoncé. Puis ils ont été introduits à la fonction et responsabilité d’un juge
de débat par le visionnage d’un module du Guide Pédagogique sur le débat, édité
par FOKAL en 2008.
Chaque participant a bénéficié d’une documentation technique
sur les critères pour juger un débat, dont un aide-mémoire pour les juges et un
guide pédagogique sur le débat Karl Popper. Enfin, ils ont répondu à un quizz
qui évalue rapidement les connaissances apprises sur la fonction de juge et les
critères de juger.
Non seulement le juge est responsable de veiller au bon
déroulement du débat (veiller à ce que les débatteurs appliquent les règles du
format et respectent les principes du débat), mais aussi il doit aussi être objectif,
impartial, et capable d’expliquer sa décision par
écrit sur son bulletin de vote. Sa décision est définitive et irrévocable.
Elle ne peut souffrir d’aucune contestation venant d’un coach ou d’un
débatteur.
Critères pour
juger un débat
Le dimanche après-midi, 6 des 10 apprentis-juges ont eu à
arbitrer un débat entre 2 équipes de débatteurs du club de Jacmel, dont
l’énoncé a été : « L’armée
devrait être rétablie en Haïti ». L’équipe affirmative a soutenu que l’armée
est une exigence constitutionnelle (selon
l’article 263 de la Constitution haïtienne de 1987) et qu’elle générera des emplois directs et indirects, tandis que l’équipe
négative a considéré que l’armée est
budgétivore par rapport aux priorités plus urgentes de la Nation, et sans nul
doute un instrument au service du pouvoir.
A l’issue de ce match de démonstration, ils ont eu à faire
l’exercice de voter pour une équipe. A l’unanimité, ils ont voté pour l’équipe
affirmative et ont fourni les raisons objectives de leur décision, et commenté
la performance des débatteurs. Leur vote similaire envers l’équipe gagnante a
fait converger les raisons suivantes : cohérence des arguments, clarté des
discours, qualité des supports aux arguments.
Bien que les justifications des juges fussent valables et
correctement expliquées, le coordonnateur a complété leurs commentaires en
insistant sur l’importance à accorder aux réfutations, aux points de clash
entre les 2 équipes, aux définitions des termes clés de l’énoncé.
Conclusion
Les participants sont sortis globalement satisfaits de la
formation. Même s’il est encore tôt pour affirmer qu’ils maîtrisent parfaitement
les critères pour bien arbitrer un match, la qualité des commentaires qu’ils
ont fournis au débat de démonstration des jeunes de Jacmel augure des
lendemains meilleurs.
Il revient au club de Jacmel de leur offrir la possibilité
d’acquérir de l’expérience en les invitant régulièrement à arbitrer des débats.
Le club a tout intérêt à profiter de ces ressources disponibles pour satisfaire
son désir de refaire son blason et de rejoindre le top des clubs champions du réseau.
Jean-Gérard
Anis
Coordonnateur du PIJ