mercredi 16 juillet 2014

« La recherche documentaire nous implique dans des sujets qu’on ignorait», dixit Kant Lundi, débatteur de Jérémie



« La recherche documentaire nous implique dans des sujets qu’on ignorait» nous a affirmé Kant, de son vrai nom Kant Garibaldi Bercy LUNDI, élève de seconde au collège Sacré-Cœur de Jérémie. Son équipe a été finaliste malheureuse au tournoi de débat interscolaire de Jérémie, organisé en avril dernier par Waldinde Germain, animateur du club de débat de Jérémie du réseau de FOKAL.

Indécollable sur ce point, Kant nous livre ses secrets de son expérience de débatteur : « Les points concrets qui m’ont aidé à débattre : faire de la recherche de documents et le plus important de les utiliser à bon escient… Cela m’a beaucoup apporté ».

Il y a quelques mois, il est devenu membre du club de débat de Jérémie, au Centre Numa Drouin, après avoir participé à un tournoi de son école. Ce qui l’a poussé à intégrer le club ? « Je suis très intéressé au concept même du débat. J’aime débattre car on a l’habitude de débattre à l’école. C’est rare de ne pas trouver des jeunes à l’école qui discutent de Christiano et de Messi pour savoir lequel des 2 [joueurs de football dans 2 clubs espagnols] est meilleur. A l’école on débat sur la pollution et autre…».

Ce qu’il a appris des débats, c’est que « le débat me force à faire des recherches pour être meilleur et m’aide à acquérir de l’expérience ». Mais Kant préfère le débat formel, règlementé, « parce qu’on voit ce qu’on doit faire ».

Kant avait suivi une formation de 2 jours à Jérémie avec Maitre Waldinde, avant le tournoi (voir article correspondant sur le blog): « Il nous a fait avoir un point de vue plus large sur ce qu’est le débat, particulièrement le débat formel, le format Karl Popper ». Et plus loin d’ajouter : « On apprend à améliorer ses capacités oratoires, à appréhender des sujets ».

La vie dans le club

"Lap mache byen. Toujou gen deba, entèaksyon ant jèn yo nan klèb la. Moman ki pi enteresan pou mwen se lè nou tout gen posiblite pou nou bay sa nou konn fè, sa nou konnen tou."

Selon lui, sa première expérience dans le tournoi a été plaisante mais stressante. Nous avions débattu d’un sujet qui traite de l’opportunité d’une rupture entre Haïti et la République dominicaine. L’argument le plus convaincant du débat pour défendre la rupture entre les 2 pays a été « lorsque un débatteur a parlé des maltraitances subies par nos compatriotes en Rep. Dom., d’un dictateur dominicain [Rafael Leonidas Trujilio en 1936] qui ordonné le massacre de plusieurs milliers d’Haïtiens sur son territoire ».

Un bémol cependant. Le jeune Kant a tenu à préciser que ces évènements historiques douloureux ne sauraient justifier tout à fait une rupture entre nos 2 pays. « Mais puisqu’on doit défendre une position dans lorsqu’on débat, alors… », a-t-il soupiré sans terminer sa phrase.

Il s’est repris tout de suite pour avancer ceci: « Le débat me fait voir que je ne dois rien admettre, c’est-à-dire puisque telle chose est ainsi, c’est ainsi qu’elle doit être. Cela demande que nous fassions toujours des recherches à propos de n’importe quel sujet. Un avocat pourrait vous le dire, aucun cas, aucun sujet n’est indéfendable. Nous devons toujours chercher les failles, et vous en trouverez quand même. Je considère de la même manière qu’un avocat qui plaide au tribunal ». Kant ne veut pas apprendre le droit pour autant. Il préfère la médecine.

Notre jeune débatteur est revenu sur la cause de l’échec de son équipe à la finale du tournoi. Il a avoué que son équipe n’a pas remporté la finale parce qu’elle a manqué de préparation, mais surtout  « parce que l’autre équipe a été plus convaincante et a mieux joué que nous », a t-il  lâché, lucide.

Lorsqu’on l’a interrogé sur la façon qu’il croit que le débat peut permettre aux jeunes de faire l’apprentissage de la démocratie, Kant a répliqué ainsi : « La démocratie, c’est le droit qu’a chacun de parler comme il l’entend, mais sans faire de diffamation. Je crois que le débat, grâce aux arguments qu’ils avancent, permettra aux jeunes d’être plus ouverts, plus tolérants ».

« La leçon que j’ai tirée du tournoi, c’est que le débat est une école, conclut-il. On y apprend beaucoup de chosesJ’aimerais que cette initiative soit implantée partout dans le pays. Ainsi les jeunes qui en sont touchés débattraient davantage de sujets dont ils tireraient différents points de vue. »

A la question de partager une expérience faite qu’il n’a pas aimée le débat. Sans hésiter, Kant a répondu sèchement : « Lè m pèdi !  [Quand j’ai perdu !]. Lorsqu’on a déclaré l’équipe adverse championne du tournoi, j’étais un peu fâché. Mais j’étais en même temps content pour eux, car je reconnais qu’ils ont mieux joué la finale que nous ».

Une leçon de fair play.

Propos recueillis par 
Jean-Gérard Anis & Yvens Rumbold

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