Contexte et objectifs du tournoi
Suite
au tournoi de débat en créole, le club de débat de Jérémie a organisé la
deuxième édition du tournoi de débat inter-scolaire dans la cité d’Etzer
Vilaire, les 16, 17 et 24 mai 2015. L’année dernière, le club avait organisé le
premier tournoi de débat inter-scolaire. Et, comme l’expérience était réussie,
et qu’elle nous a permis d’occuper une place supérieure au classement des
équipes et des débatteurs au tournoi national de l’année dernière, on a l’a
renouvelée cette année.
En effet, en analysant les bienfaits du tournoi de débat
pour le club et pour les élèves qui y ont pris part, selon leurs témoignages,
nous comprenons qu’il a été un devoir d’organiser cette année la deuxième
édition. Nos jeunes, bien qu’ils aient laissé le club pour la grande majorité
après la terminale, manifestent dorénavant un esprit de gagne, maîtrisent
l’utilisation des supports, exploitent les réponses de l’adversaire obtenues au
contre-interrogatoire pour réfuter et reconstruire leur cas, développent chez
eux l’esprit de tolérance et certaines valeurs démocratiques.
Nous avons pu comprendre que, vu l’importance du débat, et comme ont témoigné certains jeunes qui nous ont laissé, il faut continuer à motiver
plus de jeunes à pratiquer le débat. Les jeunes s’adonnent beaucoup plus aux
activités intellectuelles et aux recherches qui sont d’une extrême importance
dans leur formation.
Préparatifs
Le
club a compté sur ses propres ressources pour réaliser cette deuxième édition.
Des inscriptions ont été lancées dans les écoles et des affiches ont été accolées
dans les centres culturels et la bibliothèque de la ville deux semaines à
l’avance. Les listes d’inscription ont été recueillies dans les écoles depuis 5
jours précédant la formation.
Une formation au format de débat Karl Popper a été
organisée à l’intention des 32 jeunes issus 8 écoles secondaires, inscrits pour
intégrer le programme. Cette formation, donnée au centre Numa-Drouin, local de
réunion du club, a duré en 4 jours, à raison de 3 heures par jour.
Durant les sessions, plusieurs point ont été abordés : définir le
débat, analyser et comprendre un énoncé de débat, construire, réfuter et
reconstruire un argument dans le format Karl Popper, réussir un contre-interrogatoire…
la structure du format Karl Popper. Le guide DVD de FOKAL sur le débat a permis
à la fin de clarifier certains points et a surtout servi à faire la
synthèse des quatre jours de formation.
Une
petite séance de formation pour les juges a été également organisée. Il y avait
parmi eux des professeurs de lettres, des inspecteurs scolaires des
anciens débatteurs du club qui avaient participé au séminaire qu’avait organisé
le coordonnateur national du programme de débat pour les juges en 2012.
Le tournoi
Le
tournoi a porté autour de deux sujets d’actualité qu’on a communiqués aux
débatteurs pendant les inscriptions: « Un
niveau universitaire devrait être exigé à tous les candidats aux élections
nationales » (sujet surprise débattu au tournoi de Darbonne).
Huit
équipes venant de huit établissements secondaires de Jérémie ont pris part à la
compétition : les collèges Jean Wesley, Immaculée de Conception, Cœurs-Unis,
Sacré-Cœur, Saint Louis ; les lycées des jeunes filles, Saint Luc et Nord
Alexis.
La
finale a opposé le lycée Nord Alexis, représenté par Bazar Seevlay, Désir
Hennely et Milord Peterson, et l’équipe du lycée des jeunes filles composé de
Sylla Valéry, Taïna Dimanche et Claricia Clerveaux. Voici un résumé du débat
autour de la résolution suivante : « Un diplôme universitaire devrait être exigé à tous les candidats aux
élections ».
1- Position
de l’équipe affirmative
1.
Cette exigence va aider à diminuer le nombre élevé de candidat dans le pays.
Diminuer
ou réduire sur le nombre élevé des candidats qui participent aux élections est
un grand défi à relever par l’Etat haïtien durant ces dernières années. A
chaque élection, le nombre de candidats augmente, ce qui n’est pas du tout
avantageux pour le pays. Lorsque le nombre des candidats augmente comme c’est
le cas des prochaines élections, cela conduit à un affaiblissement économique du
pays et augmente les conflits politiques. Malheureusement un grand nombre de
ces candidats inscrits possède uniquement leurs diplômes de bac. Sans avoir une
formation universitaire, ils veulent diriger le pays alors que les études
classiques sont insuffisantes pour être candidat.
« On dit souvent que lorsqu’une personne prend
les chemins de l’université, elle aura la capacité de bien gérer, d’être un
leader. Pour cela, on devrait exiger un diplôme universitaire à toute personne
qui veut être candidat. Nous avons 20139 inscrits pour participer aux élections
et l’Etat doit financer tous ces candidats, selon le nouvelliste daté du 8 mai
2015, citant M. Louis Opont président du Conseil électoral provisoire. Mais, c’est
absurde d’avoir tous ces candidats dans un pays pauvre comme Haïti, alors que
beaucoup d’entre eux ne sont même pas détenteurs d’un diplôme universitaire. »
2.
Cette exigence va permettre d’avoir des dirigeants plus compétents.
Il
est impératif pour l’Etat d’exiger un diplôme à tous les candidats aux
élections nationales, car détenir un diplôme universitaire est synonyme d’une
compétence évolutive, de meilleures possibilités d’avancement, et d’accès à un
emploi. Pour des dirigeants plus compétents, c’est avoir un pays à gérer sur le
plan intellectuel et aussi c’est favoriser les opportunités d’investissement
sur le plan social.
« Nous sommes au 21èmesiècle, le siècle
de mondialisation. Il faut que l’Etat fasse cette exigence aux candidats afin
que le pays soit dirigé par des personnes compétentes pour favoriser son
développement. Et il est presqu’impossible de parler de développement dans le
21eme siècle dans un pays sans avoir des têtes pensantes. Les universitaires
forment l’élite intellectuelle du pays. Il faut que le pays soit dirigé par des
intellectuels, des universitaires. En somme, l’exigence d’un diplôme à tous les
candidats sera la meilleure voie pour l’Etat de parvenir à des solutions,
d’après Fabienne Blaise, présidente administrative de l’université Lille 3, en
France. »
2- Position
de l’équipe négative
Clerveaux
Claricia, de l’équipe négative a rétorqué : « Nous ne voyons pas pourquoi il faut exiger un diplôme universitaire à
un candidat aux élections nationales. Il y a une grande différence entre avoir
un diplôme et avoir la capacité de gouverner un pays. Cela peut arriver qu’un
candidat qui n’a aucun diplôme arrive à mieux gérer le pays qu’un autre qui a une
maîtrise et un doctorat.
Prenons le cas d’Antoine
Simon qui avait fait rentrer la première automobile en Haïti et Nord Alexis qui
a construit le lycée Nord Alexis de Jérémie, grâce auquel vous faites votre
philosophie aujourd’hui. Les diplômés auraient-ils fait mieux que ces présidents-là ?
Prenons le cas du Président Martelly qui n’a aucun diplôme universitaire. Il a
créé un tas de programmes sociaux (Ede pèp, Ti manman cheri, PSUGO) qu’aucun
président diplômé qui l’a précédé n’a pu faire.
Vous avez dit aussi
qu’on pourrait diminuer le nombre de candidat, ce n’est pas évident. Nous
vivons dans un pays où des gens possèdent des diplômes sans pour autant avoir
passé deux mercredis sur les bancs d’une faculté. Donc, ils pourraient se
procurer de faux diplômes. »
L’équipe
négative a fait valoir, par contre, que cette exigence de diplôme universitaire
peut contribuer à l’affaiblissement de la démocratie dans le pays. Exiger un diplôme universitaire aux
candidats, c’est favoriser l’exclusion qui s’oppose à l’instauration de la démocratie.
« Ceux-là qui n’ont pas de diplôme
universitaire sont aussi des personnes humaines et, comme je l’ai dit plus,
peuvent arriver à mieux gérer le pays que celui qui a des maîtrises et
doctorats. De plus, dans quel domaine faut-il avoir ce diplôme universitaire ?
Est-ce qu’un diplômé en médecine a les compétences qu’il faut en matière de
gestion du peuple, de gouvernance. Ce serait le monde à l’envers. »
L’équipe
affirmative a réfuté cet argument ainsi : « Il n’y a aucune source pouvant justifier ce que tu as avancé sur ce
qu’ont réalisé les présidents Nord Alexis, Antoine Simon et Michel Martelly. Le
médecin n’apprend pas seulement à soigner les malades, il apprend aussi à
gérer. Il y a des cours qu’on lui donne, mis à part des cours ayant rapport
avec la médecine qui lui permettent de gérer ».
Pluie de cadeaux pour
les 2 équipes finalistes
L’équipe
championne, le lycée des jeunes filles, a reçu en primes du matériel
scolaire, des ouvrages, des bourses d’études à UP-TO-DATE English School et un guide
de débat.
L’équipe finaliste
en a reçu également 1 gros cahier de notes et une bourse à UP-TO-DATE English School
et un livre sur le débat. La meilleure
débatteuse du tournoi, Taïna Dimanche, du lycée des jeunes filles, une bourse
en Informatique à NTS.
Waldinde Germain
Animateur
du club de débat de Jérémie