vendredi 26 juin 2015

Tournoi de débat interscolaire à Jérémie: 2e édition

Contexte et objectifs du tournoi

Suite au tournoi de débat en créole, le club de débat de Jérémie a organisé la deuxième édition du tournoi de débat inter-scolaire dans la cité d’Etzer Vilaire, les 16, 17 et 24 mai 2015. L’année dernière, le club avait organisé le premier tournoi de débat inter-scolaire. Et, comme l’expérience était réussie, et qu’elle nous a permis d’occuper une place supérieure au classement des équipes et des débatteurs au tournoi national de l’année dernière, on a l’a renouvelée cette année.

En effet, en analysant les bienfaits du tournoi de débat pour le club et pour les élèves qui y ont pris part, selon leurs témoignages, nous comprenons qu’il a été un devoir d’organiser cette année la deuxième édition. Nos jeunes, bien qu’ils aient laissé le club pour la grande majorité après la terminale, manifestent dorénavant un esprit de gagne, maîtrisent l’utilisation des supports, exploitent les réponses de l’adversaire obtenues au contre-interrogatoire pour réfuter et reconstruire leur cas, développent chez eux l’esprit de tolérance et certaines valeurs démocratiques.

Nous avons pu comprendre que, vu l’importance du débat, et comme ont témoigné certains jeunes qui nous ont laissé, il faut continuer à motiver plus de jeunes à pratiquer le débat. Les jeunes s’adonnent beaucoup plus aux activités intellectuelles et aux recherches qui sont d’une extrême importance dans leur formation.

Préparatifs

Le club a compté sur ses propres ressources pour réaliser cette deuxième édition. Des inscriptions ont été lancées dans les écoles et des affiches ont été accolées dans les centres culturels et la bibliothèque de la ville deux semaines à l’avance. Les listes d’inscription ont été recueillies dans les écoles depuis 5 jours précédant la formation.

Une formation au format de débat Karl Popper a été organisée à l’intention des 32 jeunes issus 8 écoles secondaires, inscrits pour intégrer le programme. Cette formation, donnée au centre Numa-Drouin, local de réunion du club, a duré en 4 jours, à raison de 3 heures par jour.  

Durant les sessions, plusieurs point ont été abordés : définir le débat, analyser et comprendre un énoncé de débat, construire, réfuter et reconstruire un argument dans le format Karl Popper, réussir un contre-interrogatoire… la structure du format Karl Popper. Le guide DVD de FOKAL sur le débat a permis à la fin de clarifier certains points et a surtout servi à faire la synthèse des quatre jours de formation.

Une petite séance de formation pour les juges a été également organisée. Il y avait parmi eux  des professeurs de lettres, des inspecteurs scolaires des anciens débatteurs du club qui avaient participé au séminaire qu’avait organisé le coordonnateur national du programme de débat pour les juges en 2012.

Le tournoi
Le tournoi a porté autour de deux sujets d’actualité qu’on a communiqués aux débatteurs pendant les inscriptions: « Un niveau universitaire devrait être exigé à tous les candidats aux élections nationales » (sujet surprise débattu au tournoi de Darbonne).

Huit équipes venant de huit établissements secondaires de Jérémie ont pris part à la compétition : les collèges Jean Wesley, Immaculée de Conception, Cœurs-Unis, Sacré-Cœur, Saint Louis ; les lycées des jeunes filles, Saint Luc et Nord Alexis.

La finale a opposé le lycée Nord Alexis, représenté par Bazar Seevlay, Désir Hennely et Milord Peterson, et l’équipe du lycée des jeunes filles composé de Sylla Valéry, Taïna Dimanche et Claricia Clerveaux. Voici un résumé du débat autour de la résolution suivante : « Un diplôme universitaire devrait être exigé à tous les candidats aux élections ».

1-      Position de l’équipe affirmative

1. Cette exigence va aider à diminuer le nombre élevé de candidat dans le pays.
Diminuer ou réduire sur le nombre élevé des candidats qui participent aux élections est un grand défi à relever par l’Etat haïtien durant ces dernières années. A chaque élection, le nombre de candidats augmente, ce qui n’est pas du tout avantageux pour le pays. Lorsque le nombre des candidats augmente comme c’est le cas des prochaines élections, cela conduit à un affaiblissement économique du pays et augmente les conflits politiques. Malheureusement un grand nombre de ces candidats inscrits possède uniquement leurs diplômes de bac. Sans avoir une formation universitaire, ils veulent diriger le pays alors que les études classiques sont insuffisantes pour être candidat.

« On dit souvent que lorsqu’une personne prend les chemins de l’université, elle aura la capacité de bien gérer, d’être un leader. Pour cela, on devrait exiger un diplôme universitaire à toute personne qui veut être candidat. Nous avons 20139 inscrits pour participer aux élections et l’Etat doit financer tous ces candidats, selon le nouvelliste daté du 8 mai 2015, citant M. Louis Opont président du Conseil électoral provisoire. Mais, c’est absurde d’avoir tous ces candidats dans un pays pauvre comme Haïti, alors que beaucoup d’entre eux ne sont même pas détenteurs d’un diplôme universitaire. »

2. Cette exigence va permettre d’avoir des dirigeants plus compétents.
Il est impératif pour l’Etat d’exiger un diplôme à tous les candidats aux élections nationales, car détenir un diplôme universitaire est synonyme d’une compétence évolutive, de meilleures possibilités d’avancement, et d’accès à un emploi. Pour des dirigeants plus compétents, c’est avoir un pays à gérer sur le plan intellectuel et aussi c’est favoriser les opportunités d’investissement sur le plan social.
« Nous sommes au 21èmesiècle, le siècle de mondialisation. Il faut que l’Etat fasse cette exigence aux candidats afin que le pays soit dirigé par des personnes compétentes pour favoriser son développement. Et il est presqu’impossible de parler de développement dans le 21eme siècle dans un pays sans avoir des têtes pensantes. Les universitaires forment l’élite intellectuelle du pays. Il faut que le pays soit dirigé par des intellectuels, des universitaires. En somme, l’exigence d’un diplôme à tous les candidats sera la meilleure voie pour l’Etat de parvenir à des solutions, d’après Fabienne Blaise, présidente administrative de l’université Lille 3, en France. »

2-      Position de l’équipe négative

Clerveaux Claricia, de l’équipe négative a rétorqué : « Nous ne voyons pas pourquoi il faut exiger un diplôme universitaire à un candidat aux élections nationales. Il y a une grande différence entre avoir un diplôme et avoir la capacité de gouverner un pays. Cela peut arriver qu’un candidat qui n’a aucun diplôme arrive à mieux gérer le pays qu’un autre qui a une maîtrise et un doctorat.

Prenons le cas d’Antoine Simon qui avait fait rentrer la première automobile en Haïti et Nord Alexis qui a construit le lycée Nord Alexis de Jérémie, grâce auquel vous faites votre philosophie aujourd’hui. Les diplômés auraient-ils fait mieux que ces présidents-là ? Prenons le cas du Président Martelly qui n’a aucun diplôme universitaire. Il a créé un tas de programmes sociaux (Ede pèp, Ti manman cheri, PSUGO) qu’aucun président diplômé qui l’a précédé n’a pu faire.

Vous avez dit aussi qu’on pourrait diminuer le nombre de candidat, ce n’est pas évident. Nous vivons dans un pays où des gens possèdent des diplômes sans pour autant avoir passé deux mercredis sur les bancs d’une faculté. Donc, ils pourraient se procurer de faux diplômes. »

L’équipe négative a fait valoir, par contre, que cette exigence de diplôme universitaire peut contribuer à l’affaiblissement de la démocratie dans le pays. Exiger un diplôme universitaire aux candidats, c’est favoriser l’exclusion qui s’oppose à l’instauration de la démocratie. « Ceux-là qui n’ont pas de diplôme universitaire sont aussi des personnes humaines et, comme je l’ai dit plus, peuvent arriver à mieux gérer le pays que celui qui a des maîtrises et doctorats. De plus, dans quel domaine faut-il avoir ce diplôme universitaire ? Est-ce qu’un diplômé en médecine a les compétences qu’il faut en matière de gestion du peuple, de gouvernance. Ce serait le monde à l’envers. »

L’équipe affirmative a réfuté cet argument ainsi : « Il n’y a aucune source pouvant justifier ce que tu as avancé sur ce qu’ont réalisé les présidents Nord Alexis, Antoine Simon et Michel Martelly. Le médecin n’apprend pas seulement à soigner les malades, il apprend aussi à gérer. Il y a des cours qu’on lui donne, mis à part des cours ayant rapport avec la médecine qui lui permettent de gérer ».

Pluie de cadeaux pour les 2 équipes finalistes

L’équipe championne, le lycée des jeunes filles, a reçu en primes du matériel scolaire, des ouvrages, des bourses d’études à UP-TO-DATE English School et un guide de débat.

L’équipe finaliste en a reçu également 1 gros cahier de notes et une bourse à UP-TO-DATE English School et un livre sur le débat. La  meilleure débatteuse du tournoi, Taïna Dimanche, du lycée des jeunes filles, une bourse en Informatique à NTS.

Waldinde Germain

Animateur du club de débat de Jérémie

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