Par Abiel Abdonel DEVILMÉ
17 mai 2018
Abiel Abdonel
Devilmé est un ancien débatteur du club de débat de Santo, à
Croix-des-Bouquets. Il a représenté Haiti au tournoi international de débat à
Istanbul, en Turquie, en Aout 2011. Il a une formation en économie appliquée au
Centre Technique de Planification et d’Economie Appliquée (CTPEA), et une
formation en ligne en ‘Data Science’ avec Harvard University et Massachusetts
Institue of Technology. Il travaille actuellement sur un projet national de la
Banque mondiale (Projet de Développement des Affaires et des Investissements)
pour le Ministère du Commerce et de l’Industrie, depuis mars 2018.
FOKAL et le Programme
Initiative Jeunes sont intéressés par la proposition d’Abdonel, et envisagent la
possibilité d’implémenter, à moyen terme, ce dispositif dans le programme
d’amélioration du débat.
Lors du tournoi régional du 12 mai 2018, Abiel Abdonel Devilme ancien débateur
du club de Santo a été invité à être juge à un match opposant le club de Santo
et celui du Cap-Haïtien. Or, les règlements interdisent à un juge de juger un
club dont il a été membre. Dans un petit échange avec M. Anis et Daana Roc, stagiaire à FOKAL et commissaire du
tournoi, je leur ai expliqué qu’on pouvait utiliser les techniques et les
logiciels de Data Science afin que
ces petites erreurs humaines ne se répètent plus, en donnant cette tâche à un logiciel de programmation de traitement de
données comme Excel, R….
Et de fil en aiguille, on est arrivés à parler de ma spécialisation en Data science et comment on pourrait améliorer
considérablement le programme de débat si on faisait le monitoring &
évaluation du projet. Cette amélioration viendrait en exploitant toutes les données
du nouveau système de notation des discours pour déterminer les points faibles
des débatteurs, des juges et de faire des formations spécifiques et adaptées sur
ces points faibles pour les débatteurs, les juges, les formateurs.
Le Data
science, un outil pour améliorer l’expérience du débat pour tous
Le data science est une
science en pleine expansion. Il est outil indispensable dans le monde actuel
pour la prise de décision dans quel que soit le domaine d’activité. Le data science permet de prendre des décisions
les plus éclairées, les plus intelligentes que possible. Les entreprises les
plus puissantes dans le monde actuellement comme Amazon, Facebook, Google, etc.,
doivent leur puissance à la maîtrise des techniques de sauvegarde, de
visualisation et d’exploitation de toutes les données possibles.
Ces dernières sont en mesure de prendre des « sciences-based decisions »; elles adaptent très rapidement
leurs offres de produits et services à destination des utilisateurs. Elles
offrent leurs produits en tenant compte des moindres détails sur les caractéristiques
de la demande. Même dans le sport l’analyse de données est très poussée. Des
entreprises ont développé un heat map
pour montrer où un joueur est le plus dangereux, le plus influent et comment l’empêcher
de recevoir le ballon dans cette zone, que l’analyse des données a été capable
de déterminer.
C’est dans ce contexte mondial d’utilisation, d’exploitation maximale de
cette richesse qu’est l’information que j’introduis ma proposition. Mes expériences comme ancien débatteur
et mon expertise en Data science seraient d’une grande utilité afin aider les décideurs
du programme a mieux comprendre les points faibles et les points forts dans
l’exercice du débat, et de prendre les meilleures décisions pour que le
programme soit plus efficace et plus efficient.
Objectifs du modèle proposé
Le travail que j’aurai à faire aura pour objectif de solutionner 3 problèmes :
- Premièrement, résoudre le casse-tête que représente la répartition équilibrée
des juges, en fonction des contraintes réglementaires lors des tournois de
débat, un travail qu’un logiciel programmé ferait en un clic.
- Deuxièmement, faire le monitoring & évaluation des activités du
programme, c’est-à-dire utiliser les données produites dans les tournois de débat
à travers la feuille détaillée de notation des orateurs, pour voir les domaines
où les débatteurs sont les moins performants afin qu’on puisse travailler sur
ces faiblesses spécifiques.
- Troisièmement, utiliser ces mêmes feuilles pour évaluer la
compréhension des juges des différents points de chaque discours des orateurs.
- Et enfin tout autre point pour lequel les décideurs auraient besoin de
mon expertise.
Pour résoudre le problème de la répartition des juges sous contraintes,
que les juges ne peuvent pas juger les clubs dont ils sont d’origine, éviter
qu’un juge arbitre la même équipe deux fois de suite, etc., j’ai déjà fait une
simulation avec Excel et R : J’ai pris en compte toutes les contraintes
qu’il peut y avoir dans le choix des juges, et laisser le logiciel choisir les
juges de façon aléatoire, en fonction des contraintes prédéfinies.
Le système de notation des discours, une
richesse brute peu exploitée
Avec la nouvelle méthode de notation des discours des différents
orateurs lors d’un débat, le programme produit une richesse brute
d’informations peu exploitées. Cette richesse brute de données que contiennent les
ordinogrammes des juges peut être exploitée de manière optimale et enrichir le
programme. Pour rendre ces données exploitables, les étapes à suivre devraient être
les suivantes :
- la saisie de tous les points que les juges donnent à chaque orateur
pour chaque partie de son travail. Par exemple, pour l’orateur 2A, il y aura
les points pour la reconstruction, subdivisée en points pour support, qualité de
l’argument, structure de l’argument. Toutes les notes pour toutes les
catégories et sous-catégories seront saisies avec un logiciel statistique SPSS
ou Excel.
- Le traitement des données, puis l’analyse des données sous forme de
graphe et de tableau pour mettre en évidence là où les jeunes ont été très bien, et là où ils ont
été moins bien.
- Il y aura un autre niveau d’analyse statistique plus poussée, qui
consisterait à faire des tests statistiques afin de vérifier le bien-fondé de
certains à priori qu’on pourrait avoir
sur les notes. Ce travail permettra d’identifier
les faiblesses par poste d’orateur, par club, par sexe, etc., afin de faire des
ajustements spécifique pour chacun des groupes.
Monitoring du travail des juges &
évaluation du système de notation des discours
Comme ancien débatteur, et une personne qui fréquente régulièrement le milieu
du débat, la question de la façon dont les juges comprennent le rôle de chaque orateur
est souvent sujet de discussion. Très souvent des jeunes (se) disent que si tel
juge arbitrait mon match en lieu et place de tel autre juge, je gagnerais probablement
le match. Ils pensent que les juges n’ont pas une compréhension uniforme de ce
qu’ils devraient attendre de chaque débatteur lors de leur présentation. Ils
n’ont, en fait, ni tout à fait tort ni tout à fait raison. Mais on peut vérifier
à travers les données s’il y a une différence statistiquement significative
dans la compréhension des juges du débat.
Encore une fois l’analyse de données est la solution. Cependant la méthodologie
pour le faire sera un peu différente de celle décrite plus ou moins dans le
paragraphe précédent. Pour faire ce travail,
on devra s’y prendre de la manière suivante :
- choisir un même match de débat que nous avons en vidéo, l’envoyer à tous
les juges et qu’ils l’arbitrent;
- en même temps, utiliser les juges les plus expérimentés ou qui
maitrisent le plus le débat, pour qu’ils notent en groupe ce même match;
- une fois que toutes ces données recueillies et saisies, on procédera à
des tests statistiques sur les données afin de voir là où il y a une différence
statistiquement significative entre la décision du groupe de juge d’élite et le reste des juges-témoins;
- une fois qu’on a les résultats, on saura si ce que disent les débatteurs
sont vrais ou pas, et si ceux qu’ils disent sont vrais, comment résoudre ce problème.
- et à plus long terme, on pourrait évaluer la nouvelle feuille de
notation des juges avec une méthodologie beaucoup plus développée (est-ce que ce
système de notation permet réellement à la meilleure équipe de gagner), faire
des simulations sur le système de notation, évaluer les forces et les faiblesses
du ce dit système, et enfin déterminer s’il y a lieu d’apporter des
modifications pour améliorer ce système déjà en œuvre.
Le data
science, un outil puissant au service du succès du programme de débat
Ainsi le programme de débat produirait de meilleurs débateurs et le jeu sera
le plus objectif que possible. L’intégration du data science dans ce programme de façon continue sera pour son plus
grand bien et succès. Ce serait un grand pas vers une démarche scientifique des choses.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire