Le
club de Santo a réalisé une journée de formation, le samedi 11 avril, à la bibliothèque du Collège Jacques
Stephen Alexis, pour 22 membres (11 filles et 11 garçons) majoritairement
nouveaux et pleins d’enthousiasme, qui en attendaient deux choses : une formation
générale sur les principes du débat scientifique, ensuite l’opportunité de jouer ou d’assister à un bon
match de débat sous le format Karl Popper. La journée a duré environ 5 heures
de temps.
Le
club compte environ 50 membres réguliers et son renouvellement est constant, dû
en grande partie aux jeunes qui progressent vers l’université ou d’autres
objectifs de carrière. Cette formation a été surtout conçue pour les nouveaux
jeunes. Elle devait leur permettre de découvrir le débat scientifique, de
connaitre et de pratiquer le format Karl Popper.
La
journée s’est ouverte dans une ambiance amicale à laquelle tout le monde a
participé avec joie. Venaient ensuite les séances de travaux en atelier. Chaque
groupe devrait travailler sur des éléments
tels que :
ü Le
débat Karl Popper (Présentation)
ü La
structure de l’argumentation
ü Les
arguments fallacieux
Les
jeunes ont travaillé sur ces points et chaque atelier a été représenté par un
membre pour la séance plénière sur le thème. Cette
méthodologie a été privilégiée parce qu’elle permet aux jeunes de découvrir par
eux-mêmes certaines subtilités du débat et de les partager tous ensemble, bref
de participer davantage. Comprendre, c’est pouvoir expliquer. Ainsi, ils sont
plus actifs et plus impliqués dans la formation aussi.
En
outre, cette méthode aide l’animateur à bien identifier ce qui est bien compris
et ce qui est à revoir ou à corriger dans la formation. Suivant la logique, si
les jeunes sont bien imbus des notions et
des techniques du débat, ils donneront de meilleurs résultats au niveau de la
pratique.
Le brainstorming et la recherche documentaire
L’animateur
de la formation, Francklin Louis-Jean, a assuré une présentation sur les
notions de brainstorming et de
recherche documentaire, fondamentales pour la préparation d’une bonne
argumentation, avec en support le sujet suivant : « Les pays de la Caraïbe devraient adopter le
protocole de Kyoto pour lutter contre le changement climatique ».
L’accent
a été mis surtout sur le brainstorming
et la recherche, parce que ce sont des aspects cruciaux du débat que les jeunes
négligent certaines fois pour sauter aux arguments sans chercher à faire
émerger d’abord toutes les idées qui leur permettraient de bien cerner et de
mieux comprendre les difficultés, les défis, les enjeux de la résolution.
En
un mot, nous voulons que le débatteur soit bien imbu du sujet et s’y retrouve
comme un poisson dans l’eau avant même de passer à l’étape
de l’argumentation. On ne peut argumenter efficacement sur un sujet qu’on
ne maîtrise pas sur le bout des doigts. Sinon on va juste faire une lecture et
faire le marronnage à chaque question, au lieu de défendre sa position avec
conviction et honnêteté, lors du débat.
A
vrai dire, un brainstorming ne
permettra de comprendre un sujet de débat dans sa globalité. Il y a des débats
aussi vieux que l’humanité ! Il y aura toujours quelque chose de nouveau à
découvrir ou à redécouvrir. C’est pourquoi la recherche doit être constamment renouvelée,
les sources multiples, authentifiées et crédibles.
Certainement,
le bon débatteur possède une bonne culture générale qu’il construit avec le temps. Il/elle a souvent des idées
originales et parfois même une maîtrise du sujet qui se présente à lui/elle. Il/elle
lit beaucoup, se nourrit chaque jour des informations diffusées dans les
médias, fait montre d’une grande curiosité, autant d’atouts qui lui permettent de
surprendre ou de faire la différence face à ses interlocuteurs dans un débat
formel ou informel.
Le match d’exhibition
L’énoncé
n’est pas nouveau, car il a été déjà débattu au tournoi national 2014 aux
Gonaïves : Les pays de la Caraïbe
devraient adopter le protocole de Kyoto pour lutter contre le changement
climatique. C’est certes un sujet compliqué pour un match
d’exhibition. Mais le club l’avait choisi compte tenu des expériences de débat
qu’on a eues dans le précédent tournoi
qui nous facilitait l’exercice.
Selon
l’équipe affirmative, l’adoption du protocole de Kyoto par les pays de la Caraïbe :
1. contribuerait
à la protection de la biodiversité Caribéenne.
L’équipe
négative a réfuté cet argument en affirmant que les pays ayant signé le
Protocole de Tokyo ont échoué. Plus loin ils allaient prendre l’exemple du Pérou
et des Philippines comme des exemples de cet échec sur le plan environnemental
et économique.
2. contribuerait
à leur croissance économique [argument trop général]
En
guise de réfutation, l’équipe adverse a fait valoir que le Protocole de Kyoto
ne permettra pas aux pays de la Caraïbe de développer et d’atteindre la
croissance économique mentionnée dans l’argumentation de l’équipe affirmative,
sans apporter plus de clarté.
3. contribuerait
au bien-être de la population Caribéenne [argument
trop général]
L’équipe
négative a réfuté cet argument par une négation. Au moment du contre-interrogatoire,
ils allaient prendre l’exemple de la Jamaïque comme pays ayant signé le
Protocole pour justifier leur position.
4. faciliterait la
diversification de l’économie Caribéenne. [argument
trop général]
Cet argument n’a pas du
tout été réfuté par l’équipe négative, bien que l’équipe affirmative n’a pas
remarqué l’erreur de son côté.
L’équipe
adverse, quant à elle, défendait son cas à partir de l’argumentation
suivante : L’adoption du protocole de Kyoto par les pays de la Caraïbe:
1. renforcerait
leur dépendance vis-à-vis des pays développés.
L’équipe
adverse a fait valoir que leurs adversaires n’ont pas suffisamment de preuves
pour asseoir une telle argumentation.
2. nuirait
au développement de ces pays. [argument trop
général]
La
réfutation mettait l’accent sur le fait que le protocole serait plutôt en
faveur des pays de la région en les protégeant des effets du changement
climatique.
3. est
inefficace pour résoudre le problème du changement climatique.
L’équipe adverse n’a
pas pris frontalement le contre pied de cette idée mais a précisé que c’est
l’effort commun de tout les pays joint à ceux de la Caraïbe qui aidera à lutter
contre le changement climatique.
De l’importance des
commentaires des juges
J’ai
eu l’opportunité de juger trois matchs d’exhibition pendant ces deux dernières semaines
dont deux dans mon club et un à Léogane. Ce qui m’intéresse en tant que juge,
animateur et formateur, c’est qu’un débatteur ne refasse pas la même erreur
dans un prochain match. Pour les habitués du débat, ce sont souvent les mêmes
erreurs qui se répètent. Ainsi mes recommandations se formulent sur les points
suivant :
1. Eviter
de faire des attaques personnelles (argument ad hominem)
2. Bien
maitriser le sujet et toutes les informations que l’on présente dans son
argumentation
3. Faire
une réfutation ordonnée (citer les arguments)
4. Réfuter
tous les arguments de l’équipe adverse. L’oubli est impardonnable.
5. L’importance
du travail du deuxième orateur (La réfutation et la reconstruction)
6. Faire
un bon résumé et bien réussir sa conclusion
7. La
maitrise de la langue et de l’art oratoire
8. La
nécessité d’utiliser les réponses obtenues dans un contre-interrogatoire pour
préparer la réfutation.
Pour
cela, il faut au débatteur des commentaires précis et constructifs qui lui permettent
vraiment de s’améliorer. Cela dit, j’ai vu des débatteurs faire des progrès
spectaculaires pendant mes 11 ans de carrière dans ce programme.
C’est
pourquoi j’estime que les commentaires adressés à toute une équipe pour mettre
l’accent sur le travail d’équipe est important, mais les remarques
individuelles valent aussi leur pesant d’or.
À re-faire
La
journée s’est terminée en laissant un goût d’inachevé pour les participants.
Deux étudiants de l’UEH, anciens débatteurs du club, ont aidé dans
l’organisation de la formation. Il s’agit de Daphnée Geffrard, étudiante en
Psychologie, et Jeff Jean-Francois, étudiant en Communication Sociale et ancien
débatteur.
Les 22 jeunes n’ont pas caché leur volonté de
poursuivre ces activités et manifestent un grand désir d’apprendre. Le prochain
rendez-vous est fixé pour le samedi 18 avril. Dans le menu : une heure de
partage d’informations, de comptes-rendus de lectures, d’exercice de prise de
parole en public et d’improvisation, une heure de débat scientifique suivi des
commentaires, et la cerise sur le gâteau : les artistes en herbe auront un
espace réservé pour exposer leurs talents à la fin de la rencontre. Les jeunes n’en demandent pas plus pour leur
formation et leur intégration !
Francklin Louis-Jean
Animateur
du club de débat de Santo
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