Débatteuse du
club PIJ/FOKAL de Camp-Perrin
D’abord, ce fut la surprise. C’est
l’événement auquel on s’attendait le moins, en particulier à Camp-Perrin. Pour
nous, les séismes de cette magnitude, c’est l’affaire du département de l’Ouest
frappé en 2010, ou du Grand Nord, ravagé il y a près de deux siècles. On
pensait qu’à part les cyclones dont Matthew était jusqu’ici le plus terrible,
les inondations ou parfois des sécheresses, on ne pouvait connaitre d’autres
catastrophes naturelles. Mais hélas ! On ne pouvait pas s’imaginer qu’un
beau samedi matin ensoleillé, nos vies seraient à jamais bouleversées par une
pareille catastrophe.
Ensuite, ce fut la peur, la panique
pour mieux dire. Les quelques secondes que ce tremblement de terre a duré et
les désastres qu’il a causés en termes de vies humaines détruites, maisons
transformées en décombres, glissements de terrains, ont provoqué la frayeur
dans la population. Partout, des gens étaient rassemblés autour des décombres
pour tenter de sauver des vies humaines, ou d’y retirer des corps sans vie. A
chaque réplique les enfants se coinçaient entre les jambes de leurs parents, ou
affolés voulaient courir on ne sait où. Quant à moi, et c’est pareil pour beaucoup
de mes amis (es), il m’arrive si souvent depuis ce jour-là de faire des
cauchemars. La maison de mes parents fortement endommagée, nous dormons à la
belle étoile dans les deux premiers jours qui ont suivi l’événement et
aujourd’hui sous un simple abri que nous avons construit. Malgré cela, j’ai
l’impression qu’à chaque réplique la terre va nous avaler. On dort avec un œil
ouvert et un œil fermé comme si l’on s’attend à ce que la terre tremble à
chaque instant. On est pour ainsi dire traumatisés. Les enfants en particulier
craignent d’entrer dans les maisons restées encore debout.
Je constate enfin que, parmi les
jeunes de mon âge surtout, souffle un vent de désespoir après ce séisme.
Certains réalisent qu’ils ne peuvent pas avoir un avenir souriant en Haïti, non
seulement à cause des problèmes socio-politiques qui tracassaient déjà le pays,
mais aussi à cause de ce dernier événement. Ils estiment que le pays est
malchanceux. Moi, je me dis, un peu pour me tranquilliser, qu’on n’aura pas
tous les jours un séisme de cette force. Mais cela ne m’empêche pas de penser à
la nouvelle année scolaire. Je me demande si les élèves seront assez concentrés
pour apprendre. Le moindre bruit, comme un pneu qui éclate, un camion qui passe
ou même un banc qu’on traine dans une classe pourrait gâcher une journée de
classe et provoquer des blessés. Cela est d’ailleurs déjà arrivé à Camp-Perrin
à cause de ce qui s’est passé en à Port-au-Prince en 2010.
En fin de compte, le séisme du 14 Aout
2021 laissera un goût amer dans le cœur de chaque habitant du Sud, en
particulier de ceux qui vivent à Camp-Perrin. Désormais, la vie ne sera plus la
même. A la liste des catastrophes dont est souvent victime le département du
sud, il faut maintenant ajouter le tremblement de terre. C’est pourquoi, je
pense que des campagnes d’éducation de la population sont devenues de plus en
plus importantes, non seulement pour préparer les esprits à s’attendre à de
telles catastrophes, mais aussi pour apprendre aux populations à mieux réagir.
Septembre 2021
Jenny Charles, 19 ans, est membre du club de débat de Camp-Perrin. Elle a participé
au dernier tournoi national de débat de FOKAL aux Cayes. Jenny termine cette
année ses études secondaires au Collège Immaculée Conception de Camp-Perrin.
Brillante élève,
elle a déjà reçu maints prix pour ses remarquables résultats académiques. Elle
a été lauréate aux examens officiels de 9e Année fondamentale pour
l’année académique 2016-2017, performance exceptionnelle pour laquelle elle
avait reçu une distinction présidentielle signée par feu le Président Jovenel
Moïse, le Premier Ministre Jack Guy Lafontant et le Ministère de l’Education
Nationale d’alors, Pierre Josué Agenor Cadet.
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