mercredi 17 décembre 2014

Duel des champions: Le club BMC a frappé un grand coup !

Le club de BMC a encore frappé cette année : son équipe, composée de Ruth Sara Monteau, de Wilbert Fortuné et de Laudney Amboise, a remporté le duel des champions qui l’opposait à l’équipe du club de Darbonne, formée de Gayle Sloane Saint-Louis, de Kindro Cadet et de Charlancia Rémy, ce samedi 13 décembre 2014, au centre culturel Pyepoudre situé au quartier de Bourdon (Port-au-Prince). Les 2 clubs ont aligné exactement les mêmes équipes qui ont triomphé des compétitions de débat précédentes.

L'équipe du club de BMC
Dans la salle de conférence du centre Pyepoudre archicomble, l’ambiance était fort électrique tant par le stress des supporteurs et des coaches des 2 clubs en confrontation, la concentration nerveuse des débatteurs des 2 équipes, que par l’excitation du public. Plus d’une centaine de jeunes, étaient venus en délégations de Cote-Plage, de Martissant, de Darbonne, de BMC, de Fond Parisien, de Christ-Roi, et de Diquini, accompagnés des animateurs de leurs clubs respectifs.





L'équipe du club de Darbonne
Les filles, qui ont constitué la majorité de l’auditoire de ce match de débat, étaient parées comme pour venir à un concours. Effectivement le sujet de ce débat inédit a été : « Les concours de beauté devraient être interdits ». Par contre, les 3 juges du débat (Wisguerby Bellegarde, Magalie Civil, Jean-Marie Pierre) n’en menaient pas large tant il a été difficile pour eux, selon leurs propres dires, de voter pour une équipe. Voilà pourquoi.




De la tyrannie des apparences

L’équipe de BMC qui défendait la résolution (coté affirmatif) a soutenu que « les concours de beauté encouragent la tyrannie des apparences », c’est-à-dire l’idée que « ce qui est beau doit être bon ». L’équipe affirmative a expliqué aussi que ces concours encouragent l’intoxication de l’être (promotion d’une typologie de la beauté par la chirurgie esthétique) au profit du paraitre, font primer l’apparence sur la compétence, des tendances qui poussent les individus vers un mauvais exemple de la beauté.
Ruth Sara Monteau (BMC) interrogeant Kindro Cadet (Darbonne)
L’équipe de Darbonne a rétorqué que « les concours de beauté ne demandent pas aux participants d’aller faire des opérations esthétiques. Si une Miss fait cela, c’est de son propre gré, et non parce que les concours l’y ont obligés ».

L’équipe affirmative a avancé un deuxième argument qui dit que les concours de beauté « …provoquent l’hyper sexualisation des enfants ». L’expression hyper sexualisation renvoie à la sexualisation précoce des enfants quand ces compétitions encouragent les stéréotypes de genre chez eux. « Si, tôt, on prive les enfants de leur enfance, quand ils seront adultes, ils seront déjà trop vieux », dixit Sarah de BMC.
Kindro Cadet (Darbonne) interrogeant Wilbert Fortuné (BMC)
Mais là où BMC a parlé de tyrannie, Darbonne, dans sa réfutation, a vu au contraire valorisation de la beauté dans ces concours. Quand BMC déplore l’hyper sexualisation des enfants, leurs adversaires de Darbonne ont rétorqué pour dire que les concours de beauté leur permettent seulement de développer leurs talent et capacités.


De la confiance en soi à l’engagement

L’équipe de Darbonne, qui s’opposait à la résolution (coté négatif), a soutenu l’idée que ces types de concours « …permettent aux participants d’avoir une pleine confiance en soi (…) à savoir parler en public, à mieux se comporter ». Ce qu’a réfuté une débatteuse de BMC qui a rétorqué que « s’il faut ressembler à un top model pour avoir une estime de soi, il doute de notre idéal du moi. […] Si nous détestons nos imperfections (texture de nos cheveux, grosseur de nos seins…), nous n’avons donc aucune valeur de nous-mêmes».

Un autre intérêt de ces compétitions pour l’équipe négative (Darbonne) est qu’elles «…permettent aux participants de promouvoir les valeurs socioculturelles de leur pays » (ils citent le cas de Miss Congo qui a contribué à changer l’image négative sur son pays), poussent les jeunes femmes vers « …un engagement dans la vie sociale, à s’intéresser à des problèmes sociaux, à soutenir des causes nationales ou mondiales ».
Laudney Amboise (BMC) interrogeant Gayle Sloane (Darbonne)
L’équipe de BMC a rebondi sur l’exemple de Miss Haïti en dénonçant le fait que le comité du concours l’a forcée à couper ses cheveux crépus. « Quelles valeurs d’Haïti le comité et la Miss ont voulu promouvoir ? Est-ce que le bikini est une valeur socioculturelle ? Est-ce que les profs à l’école récompensent ceux qui sont beaux ? », a t-elle  demandé. Autant de questions posées pour illustrer la vanité et la vacuité des concours de beautés.

Les concours de beauté, un bucher des vanités

Dans son discours de clôture, Sara Monteau de l’équipe de BMC, a fondé son argumentaire sur la relativité de la beauté. « Les concours de beauté ne valorisent pas la beauté, mais plutôt les gens qui sont beaux aux yeux des organisateurs. Ils véhiculent des stéréotypes (au lieu des valeurs culturelles) qui rendent vulnérables les enfants exposés à ce genre de choses.
Discours de clôture de Sara Monteau (BMC)
Ces concours font primer la beauté physique sur les valeurs intrinsèques de l’individu. Les candidates sont soumises à des critères pour leur participation, et des fois sont obligées de se faire opérer pour se refaire [certaines parties du corps], ce qui en aucun cas n’encourage la confiance en soi.

Les concours de beauté encouragent les participantes à rejeter leur culture parce que les Miss, à l’exemple de Miss Haïti 2014, Caroline Désert, sont obligées de répondre aux critères exigés par les organisateurs [dans les compétitions internationales].

Une partie du public
A qui ces concours profitent-ils ? (…) Pas aux femmes, encore moins à la société », sembla vouloir dire Sara Monteau. Elle pense qu’ « il aurait mieux fallu organiser des conférences ou des séminaires qui amènent les gens à accepter leur corps, à mieux s’apprécier ».

Les concours de beauté, expression du combat pour l’émancipation de la femme

Charlancia Rémy de l’équipe de Darbonne a terminé le débat par ce vibrant plaidoyer :
« S’il est un combat que de nombreuses femmes et associations féministes mènent à travers le monde entier depuis plusieurs décennies, c’est celui de l’émancipation de la gent féminine. Les débats autour du genre et de l’égalité des sexes n’ont jamais eu autant de résonnance qu’en ce début du Xxi siècle.
Discours de clôture de Charlancia Rémy (Darbonne)
Au fond, les gouvernements à l’échelle mondiale s’activent et manœuvrent pour permettre à la femme de s’exprimer, de s’affirmer et de s’émanciper. Tout est ainsi mis en œuvre à celle que des philosophies  rétrogrades considèrent comme le sexe faible, de ne plus se sentir marginalisé et de vivre pleinement à coté de l’homme en bénéficiant des mêmes privilèges que lui.

C’est dans ce contexte qu’on pourrait inscrire la naissance et l’amplification des concours de beauté. Car à travers ces défilés et concours, la femme a l’occasion de montrer que, d’abord et avant tout, elle est propriétaire de son propre corps. Ce n’est pas un hasard si les concours de beauté se multiplient.

Quoi de plus normal et de plus noble pour un peuple que de promouvoir sa culture à travers ses canons de beauté ! Si de temps en temps, des hommes s’offusquent de l’importance grandissante accordée à ces concours, qui mieux que la femme peut incarner et manifester l’idée du beau ?

Dans certaines cultures, la beauté du corps masculin est mise en évidence, mais il faut admettre que lorsqu’on parle de célébrer la beauté, la femme fait presque l’unanimité. Parce que l’objectif, le véritable objectif de ces concours de beauté, malgré toutes les opinions négatives qu’on puisse avancer, c’est de faire en sorte qu’aucune femme ne se sente lésée.
La juge  Magalie Civil
Valorisons la beauté ! Soyons pour ces concours ! Parce que c’est aussi valoriser la femme. Merci ! »

Un verdict sans appel

Les 3 juges du débat ont voté pour l’équipe de la BMC qui défendait le sujet. Pour justifier leur décision, ils ont souligné tour à tour la faiblesse des réfutations de l’équipe de Darbonne, l’incapacité de cette équipe à résoudre la contradiction de la Miss congolaise qui utilise des produits européens alors qu’elle fait la promotion de son pays. Le club BMC a donc fait coup double cette année, en remportant 2 titres et trophées majeurs : Champion du tournoi national 2014, et Club Champion  des champions !
BMC, Club Champion des champions 2014!
Les juges ont tenu quand même à souligner la maîtrise du format Karl Popper par les débatteurs, le la bonne séance de questionnements de part et d’autre, le bon niveau de raisonnement des 2 équipes, le calme et le sang-froid des jeunes. Néanmoins, ils ont tout de même déploré la définition du concours de beauté qui a été sacrifiée, l’hyper féminisation du débat qui se ramène aux filles, l'excès d'explications qui plutôt que de clarifier les arguments ont eu des fois le résultat inverse..

Toutefois, ils ont été séduits tous les trois par le plaidoyer de Charlancia Rémy de l’équipe de Darbonne, dans son discours de clôture sur le combat des femmes dans le monde pour l’égalité, contre l’exclusion et pour leur émancipation. Elle a reçu des applaudissements nourris du public et a  gagné le titre enviable de "Meilleur débatteur du match". Mais cela n’a pas suffi aux juges pour voter en faveur de son équipe.
Charlancia Rémy (Darbonne), meilleure débatteuse du match
FOKAL adresse ses vives félicitations à Laudney, Sara et Wilbert ! Bravo aussi à leurs 2 coaches Ricardo Nicolas et Wedly Mozeau ! Cet exceptionnel résultat démontre 2 tendances qui s’enracinent: 1. les filles réalisent les meilleures performances dans les compétitions de débat organisées par FOKAL ; 2. les clubs les plus réguliers trustent le top du classement des clubs. Les autres clubs seraient bien heureux de s’en inspirer.

Jean-Gérard Anis
Coordonnateur des Programmes Initiative Jeunes
FOKAL – Open Society Foundations Haïti


Score des débatteurs

Charlancia Rémy (Darbonne) =  84 points
Wilbert Fortuné (BMC) =       81 points
Launey Amboise =                    79 points
Kindro Cadet =                         79 points
Gayle Sloane Saint-Louis =   76 points
Ruth Sara Monteau =             76 points

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