vendredi 18 décembre 2015

Compte-rendu Rencontre des animateurs du 12 décembre 2015

La réunion des animateurs des clubs de débat du programme Initiative Jeunes de FOKAL s’est tenue le samedi 12 décembre 2015, au Centre Culturel Pyepoudre à Port-au-Prince. C’est une rencontre annuelle qui rassemble les animateurs des clubs de débat implantés dans 6 départements du pays. Ils étaient environs 25 sur 28 à y être présents cette année.

Les objectif de la rencontre ont été de faire  ensemble le bilan des activités de l’année, de partager des témoignages et des bons procédés, et proposer ensemble de nouvelles initiatives dans le cadre du débat, et de discuter et développer de nouvelles stratégies pour le programme.

La rencontre s’est concentrée davantage sur la stratégie pour faire fructifier le programme et les méthodologies de travail pour accompagner les animateurs dans l’animation des clubs. Des tables de réflexion, des travaux collaboratifs, des témoignages seront les principales activités de cette journée.

Retour sur le bilan

Un rappel sur le bilan de l’année en plusieurs étapes :

         la phase de recrutement de nouveaux membres prend trop de temps.


         le processus de formation au débat. La formation commence trop tard dans certains clubs car trop d’animateurs pensent (encore) que la formation au débat n’est là que pour préparer le tournoi des camps d’été du programme.  « le tournoi n’est pas une finalité en soi » ; c’est un moyen d’évaluer, de voir si les jeunes ont bien assimilé les notions et les techniques de débat. Selon des témoignages recueillis de jeunes dans des clubs visités, certains montrent des difficultés pour comprendre certaines notions du débat. L’idéal est de consacrer au moins deux mois à la formation. 
         certains animateurs ne font pas les réunions hebdomadaires demandées, ne fournissent pas systématiquement les comptes-rendus d’activités. De plus certains jeunes se plaignent de la routine qui s’installe dans certains clubs. Il leur a été précisé qu’il est important de communiquer ces documents afin d’évaluer l’activité du club et de partager dans le réseau via le blog, des idées, des savoir-faire, des initiatives intéressantes expérimentées par d’autres clubs, etc.

•     les rapports de dépenses sont faits de manière aléatoire. Une des dispositions sera de fournir l’allocation          des clubs uniquement après avoir soumis le rapport de dépenses de la période précédente. L’autre                      possibilité étudiée sera de fournir les allocations uniquement pour financer des activités prévues dans le          club. 

Deux témoignages, deux partages d’expérience

Afin d’illustrer ce « partage de bons procédés », deux animateurs de deux clubs différents ont témoigné sur la façon dont ils ont géré leur club, comment ils ont surmonté certains problèmes, comment ils ont motivé les jeunes.

-          Alfred Désir, animateur du club de Christ-Roi. Il dispose d’un noyau dur de 45 jeunes sur un effectif qui dépasse 80 membres. Alfred note qu’il y a un fort lien d’attache entre les membres de son club. Afin de sensibiliser les jeunes et de permettre aux parents de comprendre ce qu’ils font dans les clubs, son collègue et lui organisent des réunions avec ces derniers, car il faut noter que la plupart des parents sont réticents à laisser leurs enfants participer à une chose dont ils ne comprennent pas l’utilité ni le fonctionnement, surtout en ce qui concerne le camp d’été.

Alfred Désir utilise  un procédé pour éviter une certaine routine et par conséquent le départ des jeunes. A part la formation continue au débat, le club effectue entre autre d’autres activités telles que les tournois interscolaires - qu’ils ont dû abandonner par la suite à cause des rivalités entre les élèves de différents établissements scolaires. Les tournois entre groupes au sein du club ont remplacé cette activité-; les conférences sur des thèmes spécifiques, organisées par le club à l’attention des jeunes.

Alfred use d’un autre procédé pour améliorer la performance de ses débatteurs : impliquer des anciens débatteurs comme coaches pour les nouveaux membres du club.
Il a enfin créé un groupe WhatsApp afin de rester connecté avec les jeunes. Il conseille à ses pairs de rester à l’écoute des jeunes tout en gardant une certaine autorité.


En transition, le coordonnateur a rappelé que le club de débat n’appartient pas à une école, il faut une diversité de jeunes venant de différents établissements des environs du club. Si le club se réunit dans une école et qu’une certaine exclusion ou discrimination est remarquée, il faut le « délocaliser ». 
-          Réginal Raymond-Fils, co-animateur du club de débat de Jacmel dont l’effectif actuel est d’environ 45 jeunes. Ce club a connu avant son entrée en fonction en avril 2015 une sérieuse baisse de performance et d’effectif, parce que les précédents animateurs étaient accaparés par leur travail. Ils ont demandé eux-mêmes à être remplacés.

La première action des 2 nouveaux animateurs, Bettina Perono et lui, ont été de mettre en place un plan prévisionnel d’activités sur 3 mois pour préparer le camp d’été de fin d’année : 2 semaines de formation intensive au débat et 1 semaine consacrée à la projection de film sur le débat avec interaction avec les jeunes.
Pour le recrutement des jeunes, les animateurs ont d’abord voulu être à l’écoute des jeunes. Dans ils leur ont fait remplir un questionnaire, dont les réponses leur ont permis déterminé de nouveaux horaires de réunions (samedi et dimanche).

Afin de sensibiliser les jeunes mais aussi les parents et la communauté, ils ont organisé des matchs d’exhibition, des réunions avec les parents, et ont invité les médias de la ville.  Des anciens débatteurs du club sont mis à contribution

Le point fort de ce club est l’organisation préétablie du mois : dans leur programme mensuel, les animateurs ont introduit une formation de débat en continu ; la préparation sur place de sujets de débat ; des tournois ; des conférences et des loisirs à la fin du mois.


Comme le club de Christ-Roi, le club de Jacmel possède un groupe WhatsApp pour communiquer et rester en contact. 

En résumé, ces deux clubs ont choisi d’être à l’écoute des jeunes et de diversifier les activités afin de les motiver. Il y a aussi un vrai travail auprès des parents, des directeurs d’écoles, de la communauté afin de faire connaître le programme débat. Enfin, les clubs ont innové avec la mise en place d’une feuille de route et l’utilisation des technologies et d’internet. 

Nouvelles dispositions

Les dispositions ont concerné 2 principaux points :

         Le CUG, qui est un dispositif qui permet aux animateurs de communiquer gratuitement entre eux, via le réseau Digicel. Il est remarqué que ce réseau est sous-utilisé ce qui implique par déduction que les animateurs ne communiquent pas entre eux. Le point à soulever est de savoir s’il serait mieux de choisir d’autres applications gratuites ou d’abandonner définitivement ce réseau CUG.


Un des animateurs note qu’il est plus indispensable pour deux animateurs du même club de discuter entre eux pour organiser les réunions. Etant donné que le réseau est limité aux communications entre animateurs principaux, il n’est pas très utilisé pour cette raison. Un autre souligne aussi le fait que certains animateurs ne se connaissent même pas. 
         les allocations attribuées aux clubs. Beaucoup de clubs gardent sur leur compte en banque ces allocations sur de longues périodes, ce qui pose problème. L’administration de FOKAL exige que les clubs fassent des activités en rapport avec l’idée fondatrice du programme. Il faut donc que cet argent soit dépensé pour ces activités. L’idée qui prédomine quand l’argent reste sur le compte, c’est que le club ne fait aucune activité. En conséquence, la coordination du PIJ pense à une nouvelle manière d’attribuer les allocations : elles seront accordées quand le club proposera une activité.


S’il est vrai que certains clubs économisent leurs allocations pour préparer une plus grande activité prévue, il leur a été précisé que des allocations supplémentaires peuvent leur être accordées si le club fait part de besoins spécifiques ou si leur demande est raisonnable et justifiée.

Ateliers de réflexion 

Durant cette partie, 3 questions importantes ont été abordées sous la forme d’ateliers de réflexion :

1.       Quel suivi à faire avec la consultation nationale ?
2.      Quelles perspectives pour le programme de débat ?
3.       Quelle programmation pour les 20 ans du programme ?


Elisabeth Pierre-Louis Augustin, la directrice des programmes de FOKAL, a tenu à animer ces ateliers. L’objectif a été, à partir d’un brainstorming, dans 3 groupes de discussion constitués à cette fin, de trouver des réponses, surtout des idées venant des acteurs du programme, correspondantes à ces trois points. 
De la consultation : les différents groupes ont été d’accord sur le fait qu’il fallait valoriser le livre « Paroles de Jeunes » et le rendre accessible au plus grand nombre
• soit en le mettant à disposition dans les bibliothèques, les écoles ;
• soit en organisant des émissions radiodiffusées avec libre antenne sur les thèmes abordés dans le livre ; etc.

D’autres idées ont émergé comme la vulgarisation du libre dans une traduction en créole, ou encore dans un élargissement de la consultation nationale aux jeunes qui ne sont pas membres d’un club de débat.

Des perspectives du programme de débat. Les animateurs ont soulevé que le programme de débat est bien mais qu’il est un peu restreint. Pour certains, il manque une implantation plus forte, au sens de plus visible, des clubs dans la communauté, avec par exemple des activités civiques, ou encore une diversification des formations accordées aux jeunes.

D’autres soulignent le manque de suivi avec les anciens débatteurs (on ne sait pas ce qu’ils sont devenus, quel a été leur parcours après leur départ du club), ainsi que la demande pressante de création d’un club de débat universitaire [Il en existe déjà dans certaines institutions supérieures à P-au-P].


D’autres encore voudraient plus de formation et de rencontres pour les animateurs, et surtout une implication des animateurs dans la préparation du camp d’été. 
Des 20 ans du programme de débat. Une liste de propositions a été établie pour les 20 ans du programme de débat.
• Tout d’abord, le lancement du livre blanc.
• Des activités de sensibilisation dans les clubs ainsi que le suivi de ces activités (afin de partager les difficultés rencontrées et les solutions trouvées).
                • Le camp d’été deviendra un camp thématique que les animateurs aideront à préparer. Une rencontre à cette fin est programmée au mois de juin 2016.

A la recherche d’un canevas de réunion hebdomadaire à l’intérieur d’un club


Dans la structuration actuelle des réunions hebdomadaires des clubs de débat, chacun a développé sa propre méthodologie. Même si les activités varient d’un club à l’autre, leur programmation se ressemble. Cependant certains problèmes ont été soulevés, par exemple la difficulté d’agencer la formation entre les nouveaux membres du club et ceux qui ont déjà suivi la formation, mais aussi d’intéresser les anciens membres à des sujets nouveaux. 
Pour pallier à ce problème, les animateurs ont décidé d’impliquer les anciens dans le processus de formation en tant que coaches. Un canevas général sera fourni à tous les animateurs pour harmoniser et formaliser la méthodologie des réunions dans les clubs avec les débatteurs.


Les autres problèmes soulevés se rapportent surtout au manque de communication dans le réseau, à l’absence d’une base de données recensant l’effectif des clubs  et les sujets de débat. Enfin les animateurs recommandent que le guide du débat soit mis à jour. 

Retour sur les perspectives à venir et les recommandations des jeunes

Le coordonnateur est revenu sur ce besoin de débat universitaire. En effet, on constate que ceux qui sont à l’université aimeraient beaucoup faire partie d’un club de débat. C’est bien pour cette raison que des étudiants de l’Université Quisqueya ont mis en place un club de débat universitaire. FOKAL va voir dans quelles mesures la fondation pourra soutenir ces initiatives. Dans cette perspective de débat universitaire pourrait aussi émerger un partenariat plus approfondi avec Dominicana Debate, l’association de débat de la République dominicaine, dans l’objectif de faire pour eux des formations de débat. 
Le rappel s’est achevé sur les recommandations des jeunes qui ont envoyé une pétition à la directrice des programmes de FOKAL et au coordonnateur, afin de demander plus de débats dans leur club, plus d’activités et une promotion du programme auprès de leurs parents et dans leur ville.  

Témoignage de Dangelo Néard

Afin de sensibiliser davantage les animateurs sur comment le débat peut transformer les jeunes, Dangelo Néard, un ancien débatteur du programme Living Together réalisé avec IDEA NL dans 6 lycées de Port-au-Prince, de 2008-2009, a été invité. Son équipe avait gagné la finale du tournoi de débat, dans le format  Public Forum, entre ces différents lycées de la capitale (Toussaint, Pétion, Firmin, du Cent cinquantenaire, Marie-Jeanne, Jean-Jacques) en mars 2009, match qui a été filmé par FOKAL.


Dans l’échange avec les animateurs, Dangelo a expliqué que le débat lui a beaucoup apporté : il a libéré sa parole. Il a acquis une compétence certaine notamment dans l’art de parler au public, de mobiliser le langage dans la communication publique. Il a développé un véritable talent dans l’art d’argumenter et convaincre ses adversaires. 
Dans sa vie professionnelle, Dangelo a démontré comment intérioriser les techniques de débat l’a beaucoup aidé dans sa vie d’enseignant e surtout d’animateur pour aborder les écrivains dans son émission du dimanche sur le livre et la lecture, sur télé Caraïbes.

Une expérience l’a beaucoup marqué dans ce programme : son ami Léxima et lui perdaient leurs moyens quand ils se rendaient compte qu’ils allaient perdre un débat. Il ne s’est jamais laissé abattre même quand son ami lui disait à l’oreille qu’ils vont perdre. Il a appris à garder confiance en son discours.

Autre enseignement qu’il tiré du débat : il s’est rendu compte qu’il ne faut jamais sous-estimer ses adversaires, qu’il fallait  apprendre à se taire pour écouter les autres : « la défaite rend humain », affirma-il doctement. 
La question de l’éloquence est aussi importante pour lui dans le débat. Au lycée Toussaint, il a suivi des cours d’éloquence et d’improvisation. Le coté théâtral et la mémoire sont aussi importants : « il faut toujours se souvenir » pour pouvoir gagner un débat et contrecarrer les arguments d’un adversaire. 

Dangelo Néard est l’un des fondateurs de l’académie du Bon Langage, une école qui enseigne les prises de parole en public, l’éloquence. Pour Dangelo, le débat est important, car il permet la démocratie, il permet d’exprimer ce qu’on veut.

Conclusion

A la fin de la rencontre, un lot d’exemplaires du livre « Parole de Jeunes », a été remis aux représentants des clubs de province, afin qu’ils le distribuent à tous les jeunes ayant participé à la consultation au sein de leur communauté. Un document de présentation de notre partenaire IDEA leur a été également distribué.

En préparation pour les animateurs :
• une feuille de route qui servira de guide aux animateurs dans leurs taches,
• un calendrier d’activités pour l’année 2015 auquel ils pourront greffer leur propre agenda,
• un canevas de réunion,
• un plan de formation au débat.

Cette journée s’est achevé par le duel de débat entre Martissant, champion national au camp d’été, et Camp-Perrin, champion régional du tournoi du grand Sud. Plus de 60 jeunes  venant des clubs de Christ-Roi, de Darbonne, de BMC et de Martissant y ont assisté. A l’issue du match arbitré par un jury de 5 animateurs, le club de Martissant a gagné le titre de « Champion des champions 2015 » des tournois de débat organisés par FOKAL pendant l’année 2015.

Compte-rendu effectué par :


Jessica Saint-Louis
Étudiante en 3e année à Sciences -Po
Rennes (France)
Stagiaire à FOKAL


Jean-Gérard Anis
Coordonnateur du PIJ


Décembre 2015

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