vendredi 9 octobre 2020

Jean Marie Pierre : une icône du programme de débat de FOKAL


 Par Alex Sylné

Animateur du club de débat de Camp-Perrin

J’ai rencontré pour la première fois Jean Marie Pierre à Camp’Perrin en 2005, si je ne m’abuse. A l’époque, il accompagnait Jacob Gateau, ancien responsable du programme de débat à FOKAL. Ils étaient chargés, au nom de la Fondation, de recruter dans le grand sud des animateurs/animatrices pour les clubs de débat qui allaient être implantés. Tout de suite, j’ai été attiré par la logique du discours – un peu philosophique certes – de cet homme à l’esprit ouvert. Leur mission une fois accomplie, Jacob, Jean Marie et moi avons fait une courte tournée dans la commune et Jean Marie n’a pas cessé de me poser des questions diverses sur Camp-Perrin, questions relatives surtout à l’éducation, à l’environnement, et aux diverses ressources de cette commune qu’il disait aimer plus que tous les autres endroits d’Haïti. Ses interventions surtout m’ont marqué ainsi que tous les animateurs et animatrices de l’époque.

Je me souviens entre autres de celle qu’il avait faite à Jacmel à l’Hotel Cyvadier en 2006 lors d’un camp d’animateurs, d’animatrices. Excellent pédagogue, il s’est servi d’un texte :  « Le fou » (que je conserve précieusement) pour montrer à l’assistance comment il est important que l’on fasse preuve de respect et de tolérance dans toute société qui se veut démocratique. Rares sont les camps où il n’était pas présent. Il était dans ce fameux camp de Camp-Perrin en juillet 2008, et c’est sous ses yeux que Jacob Gateau a passé le flambeau à Anis Jean Gérard, actuel coordonnateur du programme de débats. A la fois formateur, juge de débats, moniteur sportif, agent de discipline, débordant de vie, d’un humour contagieux, Jean Marie était dans les camps - peut-être sans le vouloir- le point de mire pour beaucoup de jeunes, tant il s’impliquait. C’était lui le ‘pipirite’ qui se levait le plus tôt dans les camps et appelait tout le monde pour le sport et parfois faisait le porte à  porte pour réveiller animateurs et jeunes. Définitivement Jean Marie était un homme à l’esprit jeune quand il était avec les jeunes. Aussi, n’est-il point étonnant qu’il ait été plus d’une fois choisi comme le ‘meilleur esprit du camp’.

        En marge des camps, lui et moi, on causait souvent de l’avenir du pays et des problèmes récurrents qui le bouleversent : éducation, agriculture, environnement, élevage (il m’a confié avoir fait des expériences dans l’élevage porcin du côté de Gressier). Pour chacun des problèmes qui rongeaient ces domaines chez nous, il avait des solutions originales, peut-être trop en avance, surtout pour un pays comme le nôtre. Il aimait partager ses expériences avec les jeunes et les animateurs et animatrices. Du simple sujet qui concerne notre quotidien à ceux relatifs aux hautes sphères de la métaphysique, Jean Marie aimait discuter, débattre.

     Que de fois cependant, j’ai lu dans ses yeux et dans le ton  de sa voix, une indicible mélancolie. C’est la mélancolie de l’homme qui aimerait voir enfin souffler le vent du changement, qui souffre de nous voir piétiner en place et qui nous voit ‘révolution après révolution’ demeurer à la même place comme une eau stagnante.  Jean Marie était l’homme qui toujours, questionnait et se questionnait, à la recherche si possible de solutions nouvelles. C’était un homme d’une simplicité et d’une modestie remarquables. Enseignant, il partageait avec moi, ses méthodes originales pour introduire un cours de philosophie dans les classes où il enseignait. Et moi, je prenais note. « Esye l Alex epi wa banm nouvèl !» Dans la huitaine d’après, il m’appelle pour s’enquérir de la façon dont j’ai ‘atterri’ avec l’expérience à Camp-Perrin.

  Le Programme Initiatives Jeunes de la FOKAL (PIJ) perd à coup sûr un maillon important, un homme qui l’a marqué par son exemple et ses remarquables interventions. Il n’y pas eu deux Jean Marie dans ce programme. Que son idéal de tolérance, du bien-vivre ensemble, de transformation de notre société dans le sens positif continue à animer le Programme Initiatives Jeunes (PIJ)! Un jour, alors qu’il recevait, le prix ‘meilleur esprit du camp’, je l’ai entendu déclaré: « l’esprit du camp est éternel »…

                            A sa famille, à toute la communauté PIJ, nos plus cordiales sympathies !

 9 Octobre 2020


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