mardi 27 novembre 2018

Droits Humains en Haïti, quel avenir?



L’histoire des droits de l’homme n’est ni l’histoire d’une marche  triomphale ni celle d’une cause perdue d’avance : elle est l’histoire d’un combat.1
Nombreux sont les organismes en Haïti qui embrassent la cause des droits humains, cependant leur présence n’empêche qu’on assiste à des situations continuelles de dégradation continue des conditions d’existence de la personne humaine. Ce qui parfois nous pousse à questionner la mission de ces organismes qui est de promouvoir et de protéger les droits de tout individu. En conséquence, parfois nous avons l’impression que les efforts de ces instances organisationnelles n’aboutissent pas à des résultats susceptibles d’améliorer les conditions de vie des individus.

Selon le dernier rapport de développement humain publié par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), Haïti est chuté d’une place (167 à 168) dans le classement des Indices de Développement Humain(IDH). Ainsi, affichant un score de 0.498, le pays reste encore figé dans le rang des pays à faible développement humain. Avec une espérance de vie fragilisée, n’atteignant même pas 65 ans, 5 ans de scolarisation en moyenne et d’un revenu national brut per capita de 1665 USD, presque l’équivalent du coût d’entretien d’un chien en dehors des aléas vétérinaires2  (1270 euro équivalent à 1460 USD) dans un pays développé. Voilà l’état de vie d’un haïtien. Tandis que tout près de nous sur la même île en République Dominicaine, le revenu national brut per capita d’un dominicain s’estime à 13.921 USD.3

De tels indices pourraient nous inciter à remettre en question le résultat du travail de ces organismes. Et cette remise en question s’avère importante, par le fait qu’elle nous permettra de jauger qualitativement leur travail et leur méthode d’y procéder. Par rapport à ce constat, (au  constant déclin des conditions de vie du peuple haïtien), devrions-nous plus faire acte foi dans la crédibilité de ces organisations et groupes d’intérêt ou du moins devrions-nous continuer d’apprécier leur travail tout en essayant de leur convaincre de changer de méthode ?   

Quoi qu’il en soit, on ne saurait ignorer l’importance d’une société organisé en pleine modernité. Cependant les groupes organisés de la société civile haïtienne font preuve d’une grande faiblesse, celle de se montrer incapable de se converger autour d’un projet social commun. Ils se repoussent et se méprisent sans même parfois se rendre compte, en oubliant qu’ils travaillent tous au profit d’une société meilleure et d’un avenir prometteur. Par exemple comment comprenez-vous la froideur des organisations féministes envers les mouvements de revendications des syndiqués salariés, ou du moins comment comprenez-vous l’indifférence des syndiqués salariés aux mouvements revendicatifs des étudiants. Pourtant, ils pourraient tous se prêter main forte en vue de se renforcer dans la défense de leur cause.                                                                                                                                                                                                                       
Mais, comment s’attendre à  des résultats efficaces dans le cadre de la lutte des Droits de l’homme, pendant que ces vagues mouvements ne sont accompagnés d’aucun projet de société, autrement dit, sans une vision cohérente ou même partielle de l’organisation et du fonctionnement de la société, soutenue par des valeurs morales ou éthiques, formulant des principes et des orientations ? En fait, C’est comme vouloir faire de l’omelette sans casser des œufs.

Sachant que la société est un système complexe, constitué de phénomènes sociaux inter-reliés,  la démarche compréhensive d’un phénomène social ne saurait ignorer la pertinence de cette interrelation. En effet, Il est évident que dans la dynamique réflexive sur les droits humains, le droit est l’élément dominant, cependant il y a d’autres éléments qui entrent en jeu. Car ce n’est pas le droit en tant que tel, qui protège les droits de l’homme, ce qui compte, c’est le contenu de ce droit lequel dépend à son tour des facteurs : sociaux, politiques, idéologiques, extérieurs au champ juridique4

Par conséquent, il est inconcevable d’appréhender les droits de l’homme sans un projet social partagé par l’ensemble de la société civile, celle-ci constituée par l’ensemble des acteurs : des associations, des organisations, des mouvements, des lobbies, des groupes d'intérêts, etc… plus ou moins formels qui ont un caractère non gouvernemental et non lucratif, constituant ainsi une forme d'auto-organisation de la société.5 Elle se veut comme un instrument porteur d’un projet alternatif en réaction au statut quo. Ayant des objectifs fondés sur l’intérêt de la collectivité, elle englobe des domaines divers et sert de moyen de pression contre l’Etat.

Etant une dimension de l’Etat  de droit, les droits de l’homme ne peuvent se concevoir ni d’avoir de réalité en dehors de l’Etat de droit. Celui-ci, étant le lieu où l’autorité s’exerce conformément à des règles connues d’avance, reconnait aux citoyens des droits qu’ils peuvent faire valoir à l’encontre de l’Etat. Donc, il serait maladroit  de concevoir les droits humains dans une atmosphère sociétale dysfonctionnelle. Toutefois, entant qu’entité impersonnelle, l’Etat tient son essence d’une bonne organisation sociétale, des individus bien éduqués et conscients de la réalité de la société à laquelle ils appartiennent, à savoir que ces derniers ne sont pas les fruits du hasard, mais les fruits d’une société bien organisée, ou les groupes organisés quel que soit leur secteur d’appartenance et leur centre d’intérêt, soient capables de se mettre ensemble sur un modèle sociétal axé sur le respect de la dignité humaine, la solidarité, la justice sociale etc…, car ceux  qui auront le privilège d’accéder au sommet de l’Etat, parviendront de la société, ils seront le reflet de celle-ci, et agiront au profil de leur éducation.

Les mouvements sociaux revendiquant le respect des droits de l’homme s’avèrent importants, mais, ils n’aboutiront à aucune finalité s’ils sont conçus en dehors d’un projet de société soutenu soit par des partis partageant un même projet de société, ou par d’autres groupes organisés au sein de la société qui sont conscients des problèmes sociaux, aux fins  de se concerter et s’entraider vers l’obtention des justes solutions tendant vers une amélioration à tous égards. Car, la lutte pour le respect de la dignité humaine est notre chemin, la cohésion sociale notre seul moyen de nous  projeter vers l’avant et le changement via un projet commun est notre destinée.  Luttons pour atteindre cette destinée !                   

Jonas ANÉLUS
Animateur du club de Diquini
Novembre 2018

Références Bibliographiques

1.- Danièle LOCHAK, Les droits de l’homme, La Découverte, Paris 2002, p.117.
3.-PNUD, Human rights report, 2017.
4.-Danièle LOCHAK, loc. cit.

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