mercredi 23 janvier 2013

12 janvier 2013 : les jeunes du club de Christ-roi s’interrogent sur l’avenir d’Haïti


12 janvier 2010 - 12 janvier 2013 : où en sommes-nous ?

Pour commémorer le séisme du 12 janvier 2010 qui a causé d’énormes pertes humaines et  matérielles, le club de débat de Pyepoudre a profité de l’occasion pour lancer, le samedi 12 janvier 2013, une demi-journée de réflexion sur la situation actuelle du pays. Les différents articles sortis dans la presse nationale et internationale à la fin de l’année 2012 ont servi d’éléments déclencheurs pour l’organisation de cette activité. Il a effectivement paru nécessaire de commencer cette série de réflexions sur le pays afin que les jeunes, considérés comme les leaders de demain, puissent déjà identifier les problèmes et réfléchir à des solutions appropriées, à leur niveau. Une trentaine jeunes, avec comme invitée-surprise Ginia Alcimé, l’ancienne animatrice du club de débat du centre-ville, ont fait le déplacement pour cette occasion.

Présentation des activités

Les activités ont commencé à 13h30 et ont pris fin à 17h30. Trois grands points étaient à l’ordre du jour : une interview, un panel et des ateliers de réflexion.

a)      L’interview

Le but de cet exercice était d’explorer le sentiment des jeunes sur leur vécu dans un pays comme Haïti. En d’autres termes, voir comment ils se représentent le pays ainsi que leur avenir. Trois jeunes prirent part à cet échange sous la houlette d’une facilitatrice chargée de mener la discussion.

La première question fut : quelles étaient vos attentes après le séisme du 12 janvier 2010 ? Les réponses ont convergé presque dans le même sens : ils n’avaient pas d’illusion que la situation changerait. Pour l’un, il était évident que le processus de reconstruction serait extrêmement lent, à cause surtout des gens qui ne voulaient pas voir avancer le pays. A son avis, ces gens auraient souhaité qu’il y ait un tremblement de terre chaque année afin de continuer à se remplir les poches. Il a évoqué en autres les ONGs qui dilapident l’argent destiné au pays.

Pour un autre, il est clair que l’avenir des jeunes n’est pas assuré dans ce pays. Apres les études classiques, ils n’ont qu’un rêve : aller étudier à l’étranger. Ce qui est compréhensif puisqu’il n’y pas une université capable de tous les accueillir. Il n’y a pas vraiment une instance qui pense pour la jeunesse.
L’un des intervenants a renchéri pour dire que le changement du pays devrait passer par un changement dans la manière de penser. La façon dont les gens vivaient après le séisme avait présagé un changement dans leur attitude, mais ce n’est qu’illusion.

La discussion a ensuite pris une autre tournure quand la question de l’intérêt collectif et de l’intérêt individuel est venue sur le tapis. Selon eux, il est presqu’impossible de penser maintenant collectif, paradoxalement dans un pays à forte tradition de solidarité. L’intérêt collectif est difficile à réaliser, faute de moyens et de volonté. On peut avoir de grandes idées mais pas les moyens pour les exécuter. L’Etat est celui sur quoi il faut s’appuyer pour effectuer certaines réalisations essentielles. Mais l’Etat n’est pas pour nous, n’est pas « nous ». Il faut donc partir de l’intérêt individuel pour parvenir à l’intérêt collectif. Mais surtout, il faut aussi que les jeunes se mettent ensemble, appellent à une révolution pour changer la situation.

En conclusion, ils pensent que l’avenir s’annonce sombre pour le pays. On ne va pas évoluer. Ils admettent toutefois que le destin d’Haïti est entre les mains des Haïtiens.

b)      Le panel

Constitué de deux jeunes du club, le panel avait à présenter le pays trois ans après le séisme du 12 janvier 2010. La première intervenante a fait un survol de la situation du pays suivant différents axes :
·         - Politique, avec les promesses électorales non tenues (l’éducation gratuite pour tous, les universités à mettre dans chaque département etc.) 
·         - Economique, avec la réduction de la productivité, la cherté de la vie, les incendies de marchés
·     - Social, où Haïti est un pays « chen manje chen », où les rapports de production sont en faveur des bourgeois.

L’autre intervenant a pour sa part mis l’accent sur les opportunités qu’a offert le tremblement de terre, mais dont on n’a pas su profiter. Pour lui, les maisons détruites, particulièrement celles dans les bidonvilles, auraient dû être rasées celles afin de construire des banlieues. L’argent décaissé pour la reconstruction aurait pu servir à cet effet.

Il a ensuite présenté Haïti comme le bourbier des ONGs. Mais ce qui a suscité la réaction de l’assistance, c’est quand il a rapporté que Haïti est le pays le plus pauvre du monde. Les jeunes ont protesté, mettant en garde contre les propagandes sur le pays. C’est vrai que les choses ne vont pas comme on le souhaiterait, mais il faudrait pour s’en sortir, créer de l’emploi, permettre aux gens d’avoir un revenu, aussi mener des actions concrètes, ne pas rester dans les discours.

c)      Les ateliers de réflexion

Après ce panel, les participants ont été divisés en cinq groupes afin de constituer des ateliers de réflexion. Cinq articles de presse, notamment celui de Michel Soukar soumis à Alter-presse et titré Bilan de l’Année 2012 : les ‘E’ sont vides, ont été soumis aux groupes pour lecture et commentaires. Ils devaient également, à partir des textes lus, proposer des solutions pour une sortie de crise. Faute de temps, les groupes ont travaillé seulement sur l’article de Michel Soukar et ont mené une discussion dessus.

En séance plénière, la plupart ont jugé que l’auteur était assez critique dans sa présentation. Le bilan qu’il a fait est négatif mais instructif, car il relève les failles du pouvoir en place. Ils ont admis que les slogans ont primé sur les actions concrètes, qu’il y avait beaucoup de scandales politiques et de conflits, que la corruption règne, que le président gaspille l’argent du pays dans des voyages incessants sans résultats concrets, des per diem, des dépenses inutiles.

Tous les groupes ont conclu que vu sous l’angle de Michel Soukar, le pays est dans l’impasse, dans  « la merde » selon leurs propos termes. L’avenir s’annonce sombre. Ils ont tout de même émis certaines propositions :

Sur le plan économique :
v  investir dans l’humain
v  Encourager la production nationale
v  Assurer la bonne gestion du trésor public
v  Investir dans la création d’emploi

Sur le plan social
v  Investir dans l’éducation
v  Investir dans la protection de l’environnement (la gestion des déchets en particulier)
v  Mettre en valeur la culture haïtienne.
v  Mettre sur pied un plan de sécurité sociale

Sur le plan politique
v  Assurer la stabilité politique
v  Réduire l’influence des pays étrangers
v  Mettre sur pied d’autres critères pour élire un président
v  Augmenter l’effectif des policiers, ceci dans chaque quartier, tout en leur assurant une bonne formation
v  Veiller au respect strict de la loi

Conclusion

Il en ressort des cette activité de réflexion que les jeunes sont très pessimistes par rapport à leur avenir dans un pays comme Haïti. Ils ne croient pas dans les dirigeants en place. Cependant, ils arrivent à identifier des solutions justes et raisonnables, mais ils redoutent que leur application relève de l’impossible. Et comme il n’y a pas une instance qui les entend, ils se sentent perdus.

Il y a donc urgence de créer des espaces institutionnels où ils peuvent s’exprimer librement, porter leurs doléances. Bien qu’ils prennent conscience de ce qu’ils représentent en tant que jeunes, catégorie majoritaire dans ce pays, ils sont en l’occurrence, de ne pas disposer de leviers pour pouvoir d’agir, pour se transformer et transformer leur réalité.

Bengie Alcimé
Animateur du club de débat de Christ-Roi

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