Ce samedi 26 avril 2014,
s’est déroulée dans les locaux du centre socioculturel Rasin Lespwa la
troisième édition du tournoi local du club de débat de Darbonne (Léogane). Elles
étaient six équipes de jeunes, formées de 10 garçons et de 8 filles, à
participer à ce tournoi réalisé après deux week-ends consécutifs de formation organisée
par les animateurs Maxandre Bien-Aimé et Max Grégory Saint-Fleur, assistés de
deux anciens débatteurs expérimentés du club.
Apprendre pour mieux
comprendre…
Ils étaient au nombre de
vingt cinq à prendre part le samedi 5 et le samedi 12 avril 2014 à ces deux journées de formation. Si
certains d’entre eux font pour la première fois l’expérience du débat, d’autres
ont décidé de participer à cette formation afin de renforcer leurs capacités.
Tout au début, les jeunes
ont pu comprendre que, contrairement aux débats qui se font dans les radios, le
type de débat formel auquel ils sont invités à expérimenter, c’est une joute
intellectuelle planifiée, organisée et surtout documentée qui suit un format
bien précis, le format Karl Popper, opposant 2 équipes de 3 débatteurs. D’où
l’importance d’une bonne documentation pour préparer un débat. Les animateurs-formateurs
du club ont pris aussi le soin de mettre l’accent sur les notions-clefs du
débat, telles que l’énoncé, le brainstorming et la recherche documentaire, la
réfutation et le contre-interrogatoire.
Jefté THELISMA, ancien débatteur
du club a abordé la notion de réfutation et les différentes manières de la
réussir. Avec moult explications et exercices, il a expliqué aux jeunes que la réfutation
est l’une des parties les plus importantes du match, car certains juges se
fondent souvent sur la qualité la réfutation pour voter pour une équipe à
l’issue d’un match de débat, a-t-il fait savoir.
En abordant la question du
contre-interrogatoire, Jefté a expliqué
aux jeunes que cette phase de questionnement stratégique dans le débat
Karl Popper permet de mettre à nu les failles de l’argumentation de l’équipe
adverse. Plus loin, il a continué pour dire que « le contre-interrogatoire donne au débatteur
qui pose les questions la possibilité de clarifier les arguments mal entendus,
de faire émerger les failles, les limites et les contradictions des propos de
l’adversaire, de repousser ce dernier dans ses retranchements. »
D’autres points importants
ont été soulevés avec Nerline TOUSSAINT lors de ces deux séances tels que :
comment construire un bon argument, l’importance du travail de groupe, la
gestion du temps de parole.
Pour aborder le premier
point Nerline, s’est servi du guide débat édité par FOKAL en 2008, avec le
soutien de la Commission Européenne. Elle a expliqué aux jeunes qu’un bon
argument est d’abord le fruit d’un raisonnement solide. Elle a mis l’accent sur
plusieurs types de raisonnement comme : les arguments basés sur
l’induction et l’analogie, les arguments basés sur l’observation, les arguments
fallacieux.
« Le travail de groupe joue un rôle très important
dans la préparation du match. Il permet de développer une solidarité au sein de
l’équipe, ce qui est fondamental pour gagner
un match de débat», a t-elle fait savoir.
Partant de ces expériences,
l’ancienne débatteuse croit qu’il faut savoir maitriser son temps de parole.
Elle a, en guise d’explication, pris des exemples concrets de certains jeunes
qui, lors des matches, n’ont pas eu le temps de terminer leur discours par le
simple fait qu’ils n’ont pas pris le temps de minuter leur discours.
Débattre pour apprendre, non
pour gagner…
C’est sur l’énoncé
suivant : « Les examens d’Etat
nationaux ont un effet néfaste sur l’éducation en Haïti », que s’est
déroulé le tournoi de débat de ce samedi 26 avril. Après la phase éliminatoire jouée
dans la matinée, deux équipes se sont affrontées lors de la grande finale organisée
un en fin d’après-midi. L’équipe affirmative composée de Jade, Lony et Kindro avance
deux arguments pour soutenir sa position. 1. Les examens d’état nationaux réduisent la volonté d’apprendre chez les élèves.
2. Ils augmentent le taux de médiocrité
des élèves.
Selon l’équipe affirmative,
les élèves, au lieu de chercher à maîtriser les notions enseignées en classe qui peuvent leur donner un savoir, ne font que chercher à réussir leur bac par
n’importe quels moyens. Les
jeunes de l’équipe croient que dans la majorité des cas, ce sont les
professeurs ou les surveillants qui résolvent les exercices en lieu et place des élèves.
Quant à l’équipe négative composée
de Rose Berline, de Gaëlle et de Ralph, elle s’inscrit en faux contre le sujet
car elle croit plutôt que les examens d’Etat « permettent d’évaluer la capacité intellectuelle des élèves ». « Seule
une bonne évaluation permettra de mesurer les connaissances acquises par les élèves
durant l’année scolaire », nous dit Rose Beline. Cela permet aussi à
l’état de sanctionner l’élève par un diplôme de fins d’études.
Le débat, une leçon de choses
Les jeunes des deux équipes
ont offert un match très intéressant. L’exercice de questions/réponses au cours
du débat a suscité parfois soit le rire soit des hochements de tête du public
qui retiendra surtout ce face-à-face entre Kindro et Gaëlle. Deux débatteurs
très astucieux dans leurs réponses et dans leur approche pour défendre leur position. Verbatim.
« N’avez-vous jamais rencontré un surveillant qui guette l’arrivée d’un
superviseur pour permettre à un candidat de copier et quand ce n’est pas lui
qui résout l’exercice à sa place ? » Et à Gaëlle de
répondre : « Jamais ! Jamais !…
Je n ai jamais vu ni entendu une chose pareille. Je viens juste de passer mes
examens d’Etat [9e AF]. »
« Il y a de l’espoir car le pays à besoin de ces
jeunes bourrés de talents », a
affirmé Johny Saint Louis, coordonnateur du centre socioculturel Rasin Lespwa
venu assister à ces joutes intellectuelles. Les jeunes n’ont pas caché leur
satisfaction. « Le débat a développé
chez moi le goût pour la recherche », a reconnu Daphinis Devengshine,
l’une des nouvelles recrues du club. Nous
avons appris beaucoup de choses. Les
heures passées à la bibliothèque en compagnie de mes camarades furent très
bénéfiques » a t- elle conclu.
Le jury formé de Maxandre
Bien Aimé, animateur du club, de Nerline Toussaint, de Jefté Thélisma deux
anciens débatteurs, après voir voté à l’unanimité pour l’équipe
affirmative, ont félicité les jeunes pour les sacrifices consentis. Ils ont porté aussi des précisions concernant
quelques petites lacunes glissées au cours des matchs. Les juges croient que
les jeunes doivent faire un effort pour non seulement respecter le format, mais
aussi maîtriser la responsabilité de chaque orateur.
Max Grégory SAINT-FLEUR
Animateur du club de débat de Darbonne Léogane
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